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Interview exclusive avec Dr Anne Vincent, Chef de file des PTF du secteur de l’Education : « Le dialogue social est quelque chose d’indispensable et il doit être dépolitisé dans l’intérêt des enfants »
Publié le mercredi 30 avril 2014   |  Educ'Action


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© Autre presse par DR
Dr Anne Vincent, Représentante Résidente de l`Unicef au Bénin


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L’école béninoise, durement éprouvée ces derniers mois par la tension sociale, vient de bénéficier d’un accompagnement de taille. 42,3 millions de dollar, soit un peu plus de 20 milliards de Francs CFA, de la Banque mondiale dans le cadre du Partenariat Mondial pour l’Education, pour financer l’enseignement primaire en priorité. Dr Anne Vincent, Représentant résident de l’UNICEF au Bénin et Chef de file des Partenaires Techniques et Financiers du secteur de l’Education, nous livre, à travers cette interview exclusive, une bonne dose d’informations sur ce qu’il faut comprendre de ce partenariat, les domaines clés auxquels il s’adresse et surtout le système de coordination et de gestion à mettre en place pour faciliter le décaissement à temps des fonds afin qu’ils profitent effectivement aux enfants marginalisés des zones déshéritées. Lisez plutôt.

Educ’Action : En tant que chef de file, comment peut-on apprécier votre contribution au décaissement des 42,3 millions de dollar par la Banque mondiale en faveur de l’école béninoise ?

Dr Anne Vincent : Il serait injuste de croire que ce résultat est le fruit du travail d’une seule personne. Il y a, en réalité, un groupe de travail important à la fois du côté du gouvernement béninois ainsi qu’au niveau des partenaires et c’est l’effort conjugué de toutes ces personnes qui a conduit à la signature de cet accord de financement intervenu le 31 mars 2014. Mon rôle en tant que chef de file est d’être l’Agence de coordination du Partenariat Mondial pour l’Education (PME). L’UNICEF joue donc au Bénin le rôle de la coordination du PME. Il nous revient maintenant de mettre en place un système de coordination à la fois transparent, pragmatique tout en restant à la hauteur des défis qui se dressent devant nous. Il s’agit de 42,3 millions de dollar à dépenser rationnellement au profit de l’éducation primaire essentiellement sur deux ans et deux mois. C’est un gros défi. Et déjà, il existe deux groupes de coordination qui ont pris l’habitude de travailler ensemble. Il reste à activer tout ceci pour gagner le pari. Nous sommes à une période où le système éducatif du Bénin est remis en question, non seulement par les parents d’élèves, mais aussi par le chef de l’Etat qui estime que le système ne fournit pas encore la qualité des hommes et femmes dont la République a besoin pour atteindre son émergence. Il revient à faire en sorte que le système forme des enfants qui acquièrent la connaissance, mais qui sont aussi aptes plus tard à contribuer à la construction du Bénin, donc des enfants qui ont pleinement leur place dans la société. Je vois parfois des gens formés qui ont du mal à s’insérer dans la vie active, à s’offrir un emploi. Il y a toute une remise en question, il y a le souci de faire mieux pour l’avenir et je pense que les Partenaires Techniques et Financiers (PTF) sont sensibles à cette situation et sont prêts à accompagner le gouvernement, à inverser l’ordre actuel des choses, à adopter une approche plus pragmatique en faveur du développement.

Quelles seront les actions phares de cet appui de la Banque mondiale ?

Le Partenariat Mondial pour l’Education va essentiellement financer l’éducation primaire. Cela va se traduire à travers la construction d’écoles et là, l’accent sera mis sur les zones déshéritées qui ne disposent pas d’infrastructures éducatives. Donc, nous allons prioriser les localités à faible taux d’équipement scolaire, surtout les écoles primaires. Il s’agira de traiter les enfants de la même manière, de les mettre tous à l’école parce qu’ils ont droit à l’instruction. Dans beaucoup de pays, parlant du système éducatif, on évoque souvent des chiffres, soit 90%, soit 95% d’enfants qui ont accès à l’éducation et il y a toujours 10% ou 5% d’enfants qui sont laissés à eux-mêmes surtout dans les zones déshéritées et enclavées. C’est justement vers ceux-là que nous voulons aller, ces marginalisés de l’école. Il y aura la construction de salles de classes pour couvrir tous les enfants ayant l’âge d’aller à l’école. In fine, il y a des mots clés à retenir comme : communes défavorisées, équipements scolaires, qualité de l’enseignement.

Avez-vous le sentiment que les fonds déjà injectés ont eu véritablement d’impact sur le système éducatif ?

Bien sûr, il y a déjà une grosse amélioration ; on arrive déjà à des taux de 100% d’enrôlement au niveau des enfants pour l’école primaire. Il faut rappeler que l’enrôlement est une chose, mais garder les enfants à l’école et faire en sorte qu’ils aient la formation requise est l’autre problème. On a plus ou moins vaincu au Bénin la problématique de l’accès à l’école, mais il reste à vaincre la problématique de la qualité de l’enseignement, la problématique du temps scolaire et les statistiques globales indiquent qu’un enfant ne reçoit que 15% du temps scolaire. C’est largement insuffisant. Nous avons aussi le problème de rétention des enfants à l’école. La problématique liée à la scolarisation des filles est aussi là, il y a moins de filles à l’école que de garçons, c’est aussi un défi et puis la question de la qualité de l’enseignement reste une préoccupation de toutes les heures.

Parlant justement du temps scolaire, nous avons un problème récurrent au Bénin, les grèves qui handicapent le système éducatif. Quelle est votre appréciation sur le sujet ?

La grève est un droit. Cela fait partie des droits des travailleurs. Mais maintenant, il est question de voir où mettre cette exigence des enseignants ou professeurs pour obtenir plus d’argent ou d’autres choses et le droit des enfants d’avoir accès à l’éducation. Moi je suis un représentant de l’UNICEF, vous savez pour qui mon cœur bat, il bat naturellement pour les enfants ; Je pense aussi que lorsque les enseignants bénéficient de meilleurs conditions, l’effet rejaillit automatiquement sur la qualité de l’enseignement. Vous voyez que c’est difficile, c’est un dilemme et il faut pouvoir trouver le juste milieu. Dans des situations pareilles, le dialogue social est quelque chose d’indispensable et il doit être dépolitisé dans l’intérêt des enfants et comme je l’ai dit, on doit pouvoir mettre dans la balance le droit des enseignants et celui des enfants.

Connaissant les goulots d’étranglement, les lourdeurs administratives, quel mécanisme mettre en place pour faciliter le décaissement des fonds pour qu’ils ne retournent pas aux bailleurs pour non consommation ?

En tant qu’Agence de coordination, c’est l’un de nos gros soucis. Nous avons effectivement des appréhensions par rapport à cela ; c’est une grosse quantité d’argent qui arrive et qu’il faut gérer en peu de temps. Mais il faut rester réaliste et optimiste dans la mesure où il faut réussir, il faut arriver à trouver le bon équilibre au niveau des coordinations : la coordination au niveau du gouvernement et la coordination au niveau des PTF avec les principaux bailleurs de fonds qui veulent voir aussi leurs fonds dépenser. Le secrétariat du Partenariat Mondial pour l’Education, l’Agence de supervision de la Banque mondiale et puis l’Agence de coordination qu’est l’UNICEF, je pense qu’il nous faut créer un cadre de travail efficace. Je ne souhaite pas qu’on crée d’autres comités, il y a déjà trop de comités dans le secteur de l’éducation au Bénin. Je pense qu’avec les comités existants et les PTF, il faut créer la synergie, revoir les termes de référence de ces groupes ou entités pour répondre aux obligations du Partenariat Mondial pour l’Education. Il faut une coordination avec un dialogue constant, un dialogue transparent dès que les goulots d’étranglement surgissent de façon à les régler. C’est un financement, mais c’est avant tout un partenariat.

Dans cette veine, vous avez certainement un mot en direction des différents acteurs impliqués dans ce partenariat ?

Il faut dire à tout le monde, du chef de l’Etat à la maman du village que nous avons besoin du soutien de tous. Il n’y a pas moyen de développer un pays sans l’éducation, surtout l’éducation des enfants. A tous, je dis mettons les enfants à l’école ; aux acteurs du partenariat, que ce programme réponde à vos aspirations et à celles des parents et aux jeunes en quête d’emploi, je dis de garder espoir.

Propos recueillis par Serge-David ZOUEME & Ulrich Vital AHOTONDJI

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