La guerre contre les bandits est déclarée. 90 jours pour traquer les hors-la-loi qui troublent la quiétude des populations. L’opération a été lancée en début de semaine par le ministre en charge de la sécurité publique. En conséquence, l’Etat sort les grands moyens. "Djakpata" mobilise des milliers de policiers, gendarmes et militaires. L’intérieur du pays sera entièrement quadrillé et tout indélicat systématiquement « broyé ». Et les entrées ?
Les malfrats doivent désormais penser à la reconversion. A tout le moins, l’assaut est lancé contre eux et la bataille sera sans merci. Vaincre ou périr, telle est la mission des forces publiques déployées sur le terrain dans le cadre de la mission nationale "Djakpata". Le message est sans équivoque. Neutraliser tous les chenapans qui osent troubler la quiétude des paisibles populations. La menace se fait grande pour les hors-la-loi qui doivent désormais réfléchir par plusieurs fois avant d’opérer. Même leurs logis seront désormais investis. Tous les ghettos ou cercles de vente de stupéfiants seront détruits. La mission est républicaine et le discours péremptoire. Mais comme nous sommes en l’espèce dans le contexte du grand banditisme où les acteurs sont des professionnels, c’est-à-dire des gangs assermentés, ils ne vont pas vouloir lâcher du lest de si tôt. Dans le cercle de ces divorcés sociaux, des stratégies seront en train d’être peaufinées pour contourner la fougue des forces de sécurité. Lorsqu’on s’appelle malfrat, ce n’est plus seulement les bras qui travaillent c’est aussi et surtout la tête. Et pour qui est friand des films policiers, le terrain du combat flic-malfrat est un terrain où il ne s’agit pas seulement de course poursuite et de tirs mais de stratégies très réfléchies. Ce sont des gens très avisés qui dissimulent facilement leur identité et leur crime. La situation devient un peu difficile lorsqu’on sait que nous sommes également dans le cadre d’une criminalité importée et que des éléments des pays voisins s’infiltrent de plus en plus dans le dispositif criminel pour opérer. Les récentes arrestations et opérations meurtrières réalisées par la Police ont montré que la plupart des malfrats sont de nationalité nigériane. Mieux, ils ont des ramifications chez le grand voisin de l’Est. Ceci repose la question de la sécurisation des frontières. Les frontières du Bénin sont poreuses et plus personne ne le nie désormais. Même les responsables en charge de la sécurité le reconnaissent. Mais suffit-il de le reconnaître et rester passif ? A quoi sert t-il de continuer par saisir des produits douteux à l’intérieur quand on sait qu’ils n’ont pas apparu par miracle sur le territoire béninois et qu’il y a certainement des canaux qu’ils ont empruntés ? A quoi sert-il de continuer par traquer et neutraliser des malfrats uniquement à l’intérieur si l’on est sûr qu’au même moment il y a des dizaines et des dizaines qui y entrent ? A cette allure, on est tenté de dire que la fin du grand banditisme n’est surement pas pour demain. Nettoyer l’écurie au plan interne d’accord, mais renforcer le dispositif de contrôle au niveau des frontières, c’est encore mieux. S’il y a des besoins de déployer d’autres agents à l’instar des éléments de "Djakpata" à ces endroits de souveraineté, il ne faudra pas hésiter à le faire. Ce faisant, on aura franchi un pas très important dans la lutte puisqu’on aura freiné les infiltrations douteuses et faire douter les faussaires et chenapans qui prennent le Bénin comme terre d’asile où le pays dans lequel toute forfaiture est permise.
Le concours des populations
L’artillerie lourde est déployée mais elle ne pourra pas atteindre les vraies cibles s’il y a brouillage dans la visibilité. Si le flic n’a pas l’information à temps, il lui sera difficile de réagir promptement. L’opération "Djakpata" n’aura de succès que dans la disponibilité des populations à collaborer. Les vrais malfrats sont-ils toujours dans les ghettos ? Certainement pas. Le redoutable braqueur Sotima a été tué il y a un an dans une location tenue par un propriétaire d’appartements qui était peut être loin d’imaginer qu’il hébergeait un voleur craint de tout le monde. Les exemples du genre sont légion. Les braqueurs nigérians qui ont opéré à Calavi sont pourtant au Bénin depuis 20 ans. Vivent-ils depuis ce temps dans les ghettos ? Sûrement pas. Même si c’est une petite chambre en matériaux précaires tenue par un propriétaire, ces hors-la-loi réussissent à la louer et à y vivre. C’est d’ailleurs pour eux un vrai moyen de dissimuler leur statut. Ils côtoient tous les jours des gens mais qui s’intéressent très peu à eux et à leur mouvement et s’étonnent par la suite de les voir à la télé ardoise au cou. Qui pouvait imaginer que les deux maliens ‘’duplicateurs’’ de billets qui ont réussi en six mois à escroquer 100 millions auprès des Béninois vivaient à Fidjrossè dans une maison luxueuse dont le loyer mensuel est évalué à plus de 500.000FCfa ? Il se pose alors la nécessité d’un contrôle réciproque à tous les niveaux. Que les colocataires se contrôlent et que les propriétaires cherchent aussi à en savoir davantage sur le statut de leurs locataires. Les autorités locales et communales ont également de leur côté un rôle de premier plan à jouer dans cette lutte implacable initiée contre le grand banditisme. Les sages des quartiers, les jeunes, les femmes, bref tout le monde est invité à contribuer pour la réussite de cette mission.