Pour les avocats de Boni Yayi dans les procédures relatives aux affaires dites de tentatives d’assassinat et de coup d’Etat, la décision de la Cour suprême intervenue le 2 mai dernier, cassant les arrêts de la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Cotonou, remet les personnes mises en cause en situation d’accusées devant la juridiction d’appel autrement constituée. C’est ce qu’ils ont soutenu devant la presse hier dimanche 4 mai à Cotonou.
Devant la presse, Mes Sadikou Ayo Alao et Rafiou Guy-Charles Paraïso, Gilbert Atindéhou, Evelyne da Silva Ahouanto, Jean de Dieu Houssou, du collectif des avocats de Boni Yayi ont rappelé que le 17 mai 2013, le juge d’instruction avait rendu des ordonnances de non-lieu dans les procédures mentionnées supra. Ce qui a donné lieu, de la part de l’accusation, à la décision de former appel.
Appel soldé par un arrêt confirmant largement les ordonnances du juge d’instruction et les infirmant partiellement en ce que les cas Patrice Talon et Olivier Bocco, ceux-ci n’étant pas sur le territoire national, devaient être disjoints de ceux des mis en cause sur place à Cotonou.
La décision de la Cour suprême en date du 2 mai a cassé les arrêts de la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Cotonou et les a annulés, renvoyant les parties à nouveau devant cette juridiction ; exactement comme si la Chambre d’accusation n’était pas encore saisie.
Les débats reprendront donc tant au fond que sur la forme du dossier, soutient Me Rafiou Paraïso. Qui rappelle bien que la Chambre judiciaire de la Cour suprême est juge de l’application de la loi.
Et, soutient-il encore, la Chambre d’accusation de la Cour d’appel avait rendu ses décisions en violation de la loi. Pis, les juges de cette juridiction se sont abstenus d’appliquer la loi en vigueur au Bénin au moment de la reddition de leur arrêt. Dans tous les cas, les débats reprendront donc totalement, les parties pourront à nouveau présenter leurs moyens devant la Chambre d’accusation qui appréciera.
De même, les personnes en détention restent derrière les barreaux et les mandats d’arrêt émis à l’encontre des sieurs Patrice Talon et Olivier Bocco restent en vigueur.Par ailleurs, enseignent les avocats de Boni Yayi, «Les juges de la Cour suprême n’ont fait que voir si l’arrêt de la Chambre d’accusation a été rendu en conformité avec la loi».
Or, martèlent-ils, de leur point de vue ces arrêts péchaient en maints points. Mieux, «notre mémoire contenait divers moyens pour justifier la cassation. Mais la Cour a estimé qu’un seul élément pouvait justifier cette cassation : la violation de la loi par refus d’application de la loi», apprécient-ils.
En effet, expliquent-ils encore, «l’ancien code de procédure pénale n’était plus en vigueur le 1er juillet 2013 lorsque la décision a été rendue ; le nouveau code étant entré en vigueur depuis le 29 mai 2013.
Et les dispositions visées n’ont aucun lien avec les mêmes dispositions du nouveau code. Dans tous les cas, c’est en toute légalité que l’arrêt de la Chambre d’accusation a été cassé puisqu’en tant que loi de procédure, le nouveau code de procédure pénale est d’application immédiate».
Désormais, poursuivent-ils, la balle revient au centre et la nouvelle composition de la Chambre d’accusation d’apprécier à l’aune des débats qui devront être entièrement repris. A l’occasion, nous développerons beaucoup plus nos moyens, promettent-ils, non sans exprimer leur joie relativement à cet arrêt de cassation. Ni sans réaffirmer leur confiance en la justice béninoise.
Loin, le bout du tunnel ?
La lecture que font les avocats du chef de l’Etat de l’arrêt de la Cour suprême incline à penser que nous sommes encore bien loin du bout du tunnel dans ces affaires qui ont tenu en haleine le peuple béninois pendant de longs mois avant l’accalmie observée le temps de l’appréciation du pourvoi en cassation par la Cour suprême.
Certes, si la décision de la Cour suprême confirmait les arrêts de la Chambre d’accusation, on peut estimer que le débat serait définitivement clos, du moins en ce qui concerne ceux des mis en cause gardés au Bénin, en attendant l’appréciation du cas des deux autres en exil, Patrice Talon et Olivier Bocco.
Mais ce n’est pas le cas et c’est plutôt à un arrêt de cassation que nous avons eu droit. Il va sans dire que les prochains mois pourraient être très agités encore par ces affaires et interprétations auxquelles l’arrêt de la Cour suprême donnera lieu selon le camp où l’on se trouve ou selon le bon sens juridique tout simplement. L’opinion n’a donc pas fini d’être tourmentée par ces affaires.
La seule attitude qui y mettrait fin plus tôt que prévu serait un désistement d’action de la part du chef de l’Etat, qui renoncerait ainsi à poursuivre. Cela est-il envisageable en l’espèce ? W-L. H.