Le Président de l’Assemblée nationale a rendu public, hier lundi 22 avril 2013, un communiqué de presse relatif à la non-organisation à bonne date des élections communales, municipales et locales. Le Professeur Mathurin Coffi Nago y explique les « vraies » raisons qui justifient le retard dans l’organisation de ces élections. L’une de ces raisons, selon le communiqué, est de prendre des mesures pour stabiliser les règles électorales que les groupes politiques modifient à chaque échéance sur la base des calculs politiques et politiciens. Le Pr Nago souligne que l’institution dont il est le président a décidé de prendre des dispositions pour doter le Bénin d’un instrument juridique comme base pour l’organisation des élections pacifiques et transparentes au Bénin. Ainsi, le Parlement a choisi de baliser le terrain pour éviter désormais l’organisation des élections à la va-vite, évitant des contestations, des conflits post électoraux. L’objectif est de prendre du temps pour bien faire plutôt que de se précipiter pour bâcler les bases de tout un processus électoral.
COMMUNIQUE DE PRESSE DU PRESIDENT DE L’ASSEMBLEE NATIONALE
Depuis l’historique Conférence des forces vives de la nation de février 1990, notre pays s’est résolument engagé sur la voie de la démocratie pluraliste et de la construction d’un Etat de droit.
La conséquence de cet engagement est l’organisation de l’alternance au pouvoir par les urnes.
C’est pourquoi depuis lors, il est régulièrement organisé des élections présidentielles, législatives, communales, municipales et locales.
Cependant, le constat unanimement fait par la classe politique est que lesdites élections accusent des insuffisances et reviennent toujours très chères du fait de l’instabilité des règles et des organes de gestion des élections.
Les instruments d’organisation des élections sont restés archaïques et constituent des sources de contestations de toutes sortes. Malgré l’esprit pacifique du peuple béninois, toutes les élections ont toujours été des moments de vives tensions socio-politiques avec des risques majeurs d’explosion sociale.
Conscients de ce que cet état de chose ne peut perdurer, la classe politique, toutes tendances confondues, a choisi de moderniser les instruments électoraux.
Ainsi, elle a, depuis 1998, opté pour la réalisation d’une Liste Electorale Permanente Informatisée (LEPI). Malheureusement, il y a eu plus de discours que d’actes allant dans le sens de la réalisation effective de cette LEPI.
Dès l’alternance politique au sommet de l’Etat en 2006, la question est revenue sur le tapis et a été résolument prise en considération par le nouveau Président de la République et son Gouvernement.
Tirant leçon des élections passées, surtout celle de 2008, la 5ème législature en a fait son cheval de bataille. Et presqu’à l’unanimité des députés de cette mandature, la loi portant réalisation de la RENA-LEPI a été votée.
Mais hélas ! A son application, des facteurs objectifs et subjectifs et des calculs politiciens sont apparus et n’ont pas permis la réalisation correcte et consensuelle de la LEPI.
La principale conséquence de cette insuffisance a été, une fois encore, les vives contestations des résultats des élections présidentielles et législatives de 2011.
Face à cet état de chose, devons-nous faire comme si de rien n’était et aborder les prochaines élections communales, municipales et locales, élections de proximité par excellence, avec les insuffisances de la LEPI ? Ou faudrait-il abandonner cet instrument qui marque pourtant une nette avancée par rapport aux listes manuelles ?
A l’unanimité, les forces politiques représentées à l’Assemblée Nationale ont reconnu qu’il faut prendre les mesures nécessairesnon seulement pour corriger la LEPI, mais également pour doter notre pays d’instruments modernes et fiables d’organisation des élections.
Ainsi les actions ci-après ont été identifiées pour la modernisation du système électoral dans notre pays. Il s’agit :
1- de la correction, l’actualisation et l’apurement de la LEPI afin de corriger les insuffisances relevées par les différents audits mis en œuvre et prendre en compte les citoyens omis. La proposition de loi faite par le groupe de travail que j’ai mis en place a été étudiée et votée par l’ensemble des députés ;
2- du vote, pour la première fois, d’une loi portant création, organisation et fonctionnement des Unités Administratives Locales. Ce vote aura pour mérite de mettre fin aux procès d’intention entre hommes politiques sur la création de villages fictifs à l’occasion des élections;
3- du vote d’une Loi portant cartographie électorale et fixation des centres de vote, destinée à assurer une bonne visibilité des lieux où se déroule le vote sur l’ensemble du territoire national ;
4- du vote d’un code électoral efficace et durable afin de stabiliser les règles électorales que les groupes politiques, depuis 1990, modifient à chaque échéance sur la base des calculs politiques et politiciens.
Il découle de ce qui précède que la 6ème législature a fait l’option de moderniser et de fiabiliser le système électoral à travers le vote de lois majeures y relatives, afin de préserver notre peuple des gènes de troubles sociaux post-électoraux.
Cette démarche est d’autant plus pertinente que les prochaines élections sont des élections de proximité pour lesquelles un maximum de précautions sont nécessaires afin d’éviter de rééditer ce qui s’est passé en 2008 et qui a amené de nombreuses localités du Bénin à rester sans conseil de village et sans chef de village jusqu’à ce jour.
Il conviendrait donc de mener à terme toutes ces réformes et innovations avant d’envisager l’organisation des prochaines élections communales, municipales et locales.
Par conséquent, la question de l’organisation à bonne date desdites élections doit être appréciée et résolue en tenant rigoureusement compte de ces impératifs.
Au demeurant, des mécanismes juridiques peuvent être mis en œuvre pour permettre de résoudre la question de la fin du mandat des actuels élus locaux, communaux et municipaux et d’éviter le vide juridique qui nourrit l’effervescence observée actuellement dans l’opinion publique.
C’est dans cet esprit que la loi n° 2013 -07 du 22 avril 2013 portant dispositions transitoires dérogatoires à l’article 86 de la loi n° 98-006 du 09 mars 2000 et aux articles 4 et 6 de la loi n° 2007-28 du 23 novembre 2007 fixant les règles particulières relatives aux élections communales, municipales et locales en République du Bénin, a été initiée par les députés, examinée et votée de façon quasi unanime lors de la séance plénière du lundi 22 avril 2013.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que notre pays se trouve confronté à une telle situation. D’autres législatures ont eu en leur temps, face aux exigences qui s’imposaient à elles, l’intelligence de mettre en œuvre ces mécanismes juridiques.
Par conséquent, la 6ème législature, au regard de tout ce qui précède, s’est refusée à adopter une politique de l’autruche qui consisterait à faire fi des problèmes majeurs qui existent ou se profilent à l’horizon et a pris résolument ses responsabilités, à travers le vote de la loi n°2013-07 précitée afin de permettre l’organisation d’élections sans contestations majeures et sans risques de troubles sociaux.
Je voudrais donc inviter le peuple béninois, l’opinion nationale et internationale à faire confiance à l’ensemble des députés de la 6ème législature qui abordent les différents dossiers de la Nation avec un esprit de responsabilité, de dialogue et de consensus.