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La Presse du Jour N° 2133 du 14/5/2014

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Recours contre l’arrêté querellé de Placide Azandé : La Cour Constitutionnelle se déclare incompétente
Publié le vendredi 16 mai 2014   |  La Presse du Jour


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© Autre presse par DRR
Professeur Theodore Holo, Président de la Cour Constitutionnelle du Bénin


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La Cour constitutionnelle a tranché dans l’affaire de «décision unilatérale prise par le Préfet Placide Azandé par Arrêté 2012 N°2/388/Dep-Atl-Litt/Sg/Sp-Cp-C du 07 août 2012 en violation des articles 23 de la Constitution du 11 décembre 1990 et 11 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples». Elle s’est déclarée incompétente. Lire la décision.

DECISION DCC 14-081 du 08 mai 2014

La Cour Constitutionnelle,

Saisie d’une requête du 13 janvier 2014 enregistrée à son Secrétariat le 15 janvier 2014 sous le numéro 0070/009/REC, par laquelle Monsieur Serge Roberto Prince Agbodjan forme un recours pour contrôler la constitutionnalité de la décision unilatérale prise par le Préfet Placide Azandé par Arrêté 2012 N°2/388/Dep-Atl-Litt/Sg/Sp-Cp-C du 07 aout 2012 en violation des articles 23 de la Constitution du 11 décembre 1990 et 11 de la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples;
Vu la Constitution du 11 décembre 1990 ;
Vu la loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour Constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 ;
Vu le Règlement Intérieur de la Cour Constitutionnelle ;
Ensemble les pièces du dossier ;
Ouï Monsieur Zimé Yérima Kora-Yarou en son rapport ;
Après en avoir délibéré,

CONTENU DU RECOURS
Considérant que le requérant expose : «… Après la Décision DCC 12-125 du 7 juin 2012 de votre Haute Juridiction où vous avez déjà sanctionné une violation manifeste de la Constitution par le Préfet des Départements de l’Atlantique et du Littoral pour avoir pris un acte exigeant son avis préalable avant l’exécution de toute décision de justice, le Préfet Placide Azandé a pris le 07 août 2012, soit plus d’une année déjà, un acte déchargeant les maires de son département de leur mission de chargé du maintien de l’ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblement tels que : les foires, marchés, réjouissances et cérémonies publiques… Comme le prescrit la Loi N°97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin dans son article 76.4, c’est au maire qu’il incombe le soin de faire réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d’ameutement dans les rues, le tumulte dans les lieux d’assemblée publique, les attroupements, les bruits et rassemblement nocturnes qui troubler le repos des habitants et tous les actes de nature à compromettre la tranquillité publique… »

Considérant qu’il développe : «Même si dans sa mission d’autorité de tutelle, le Préfet peut exercer par voie d’approbation, d’annulation et de substitution, ce pouvoir de tutelle est rigoureusement organisé parle Décret N°2002-376 du 22 août 2002 portant organisation et fonctionnement de l’administration départementale. Dans l’exercice de sa mission, le Préfet ne peut et ne saurait poser des actes attentatoires aux Droits de l’Homme et aux libertés publiques dont la Haute Juridiction est la gardienne. Il n’est donc pas acceptable d’admettre une décision du préfet qui est attentatoire aux libertés publiques dès lors que la raison évoquée est celle d’un soit disant «crise sociale » qui dure plus d’un an et qui n’indique aucunement les faits montrant cette crise sociale. Le caractère général d’une telle décision du Préfet Placide Azandé s’analyse comme une obstruction permanente des compétences des maires dans le cadre de l’exercice de la «liberté de manifestation » prévue par l’article 23 de la Constitution. La Constitution en vigueur au Bénin dans son préambule a affirmé solennellement : « notre détermination par la présente Constitution de créer un Etat de droit et de démocratie pluraliste, dans lequel les droits fondamentaux de l’homme, les libertés publiques, la dignité de la personne humaine et la justice sont garanties, protégés et promus comme la condition nécessaire au développement véritable et harmonieux de chaque béninois tant dans sa dimension temporelle, culturelle que spirituelle… » Quant à la l’article 23 de cette même Constitution, il dispose : «Toute personne a droit à la liberté de pensé, de conscience, de religion, de culte et d’expression dans le respect de l’ordre public établi par les lois et les règlements. L’exercice du culte et l’expression des croyances s’effectuent dans le respect de la laïcité de l’Etat»; qu’il conclut : «la lecture combinée des articles précédents confirme la règle doctrinale selon laquelle la liberté devient la règle, la limitation l’exception». En conséquence, le Préfet Placide Azandé ne saurait prendre une décision à caractère général de décharge qui empêche l’exercice de la liberté de manifestation pourtant consacrée par l’article 23 de la Constitution du 11 décembre 1990»; qu’il demande à la Haute Institution… «de contrôler la constitutionnalité de cette décision prise par le Préfet Placide Azandé afin de la rendre contraire à la Constitution béninoise».

INSTRUCTION DU DOSSIER
Considérant que suite à la mesure d’instruction de la Cour, le Préfet des Départements de l’Atlantique et du Littoral écrit : «…La collaboration Préfet-Maire est basée sur un rapport de supérieur au subordonné c’est-à-dire, un pouvoir hiérarchique toutes les fois où la commune exerce une attribution qui relève des compétences de l’Etat. Il en est ainsi pour les compétences déléguées dont la police administrative à laquelle appartient le maintien de l’ordre public et de son rétablissement en cas de trouble. Ce rapport comporte un pouvoir d’instruction, un pouvoir d’annulation et un pouvoir de substitution.

Outre l’appréciation de la légalité, le pouvoir hiérarchique comporte celle de l’opportunité qui fait partie en effet de l’initiative de l’acte : l’initiative de l’acte appartient alors concomitamment au Préfet et au Maire. Mieux, l’article 13 de la loi 97-028 du 15 janvier 1999 portant organisation de l’Administration territoriale de la République du Bénin dispose: « Les préfets prennent par voie réglementaire, les mesures propres à assurer la police, le maintien de l’ordre public et la protection civile.»

Les modalités de la prise de ces mesures propres à assurer l’ordre public par voie règlementaire par les Préfets sont précisées par le Décret numéro 2005-377 du 23 juin 2005 portant règlementation du maintien de l’ordre public. »

Considérant qu’il ajoute : «Les renseignements constants qui me parvenaient de sources officielles nationales et internationales concordantes, suite à l’entretien télévisé que le Président de la République, Chef de l’Etat, Chef du Gouvernement a bien voulu accorder aux hommes des médias entre la fin du mois de juillet et le début du mois d’août 2012, faisaient état de ce que certains citoyens s’organisaient en collaboration avec certains maires pour troubler considérablement l’ordre public avec pour seul dessein d’inciter et de pousser les paisibles populations des villes et campagnes des Départements de l’Atlantique et du Littoral à l’insurrection.

Cette insurrection, selon le plan de ses organisateurs, partirait des Départements de l’Atlantique et du Littoral et gagnera toute l’étendue du territoire national pour faire partir un Président démocratiquement élu dans un Etat de Droit avant le terme de son mandat. Face à ces informations concordantes très préoccupantes et en vertu des articles 35 de la Constitution et 5 alinéa 1 du décret portant règlementation du maintien de l’ordre publique, j’ai par l’arrêté querellé, dessaisi de leur compétence de traitement des lettres d’information des manifestations publiques, les maires des communes relevant de la circonscription administrative dont j’assure l’administration».

Considérant qu’il poursuit : «Les lettres d’information d’une manifestation publique, déposées par les organisateurs auprès d’un Maire de Commune, me sont transmises et étudiées par mes services compétents qui se mettent en rapport avec la police pour s’assurer de la garantie sécuritaire idoine à la manifestation. Les copies de trois (03) bordereaux de la mairie… de Cotonou transmettant treize (13) demandes d’autorisation de manifestation que vous trouverez ci-jointes, sont la preuve de l’application de la mesure exceptionnelle de dessaisissement par ladite commune.

La première fois qu’un maire notamment celui de la Commune de Cotonou m’a saisi au sujet de l’Arrêté numéro 2/388/DEP-ATL-LITT/SG/SP-CP-C du 07 août 2012 portant mesures sécuritaires exceptionnelles dans les Départements de l’Atlantique et du Littoral, c’était pour se rendre compte du « recouvrement des produits de la taxe sur les manifestations relatives aux caravanes publicitaires et autres manifestations bruyantes à travers la ville de Cotonou ». Vous trouverez ci-joint, copies de sa lettre et de ma réponse à ladite lettre.

La seconde fois, c’est le même Maire qui par l’entremise de Maitre Faustin Z.A. ATCHADE Avocat à la Cour m’a saisi par lettre numéro 07/FAZA/MVH/14 du 27 janvier 2014 enregistrée au Secrétariat Administratif de la Préfecture de Cotonou sous le numéro 274/SA du 29 janvier 2014 d’un recours gracieux contre trois (03) actes préfectoraux dont l’Arrêté querellé. Ces mesures exceptionnelles de dessaisissement ont été plusieurs fois rappelées aux Maires de communes de ma circonscription administrative en raison des informations sans cesse croissantes qui me parvenaient.

Elles se sont avérées lorsque j’ai été assailli par des responsables syndicaux dont Messieurs Paul E. IKO et Dieudonné LOKOSSOU le jeudi 26 décembre 2013 en la présence constante du Maire de la ville de Cotonou, juste à ma sortie de son bureau après un tête-à-tête que j’ai eu avec lui dans le cadre de ma visite annuelle de la commune de Cotonou sans qu’il ne réagisse pour désapprouver les agissements des syndicalistes » ;

Considérant qu’il développe : «Le Maire de la Commune de Cotonou qui, jusque-là, a suivi les mesures exceptionnelles de dessaisissement en me transmettant les lettres d’information de manifestations publiques déposées au niveau de la Mairie de Cotonou, a curieusement traité une lettre d’information de marche introduite par des responsables syndicaux le jeudi 26 décembre 2013 sans même m’en informer. Ce faisant, il a violé, entre autres dispositions, celles de l’article 82 de la loi 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes d’après lesquelles, il devrait exercer sous le contrôle de l’autorité de tutelle cette attribution qui relève des compétences de l’État comme il le faisait au moment où il n’était même pas dessaisi en m’informant au préalable du déroulement de toutes manifestations publiques afin de me permettre de m’assurer de la garantie sécuritaire idoine.

De même, le maire de la municipalité de Cotonou a violé les dispositions de l’article 34 de la Constitution du 11 décembre 1990 selon lesquelles, tout citoyen béninois, civil ou militaire, a le devoir sacré de respecter en toutes circonstances, la Constitution et l’ordre constitutionnel établi ainsi que les lois et règlements de la République.

Ayant appris par la suite que cette marche était projetée pour être organisée le vendredi 27 décembre 2013 à huit (8 h) heures à partir de la Bourse du travail de Cotonou, alors même que j’étais en visite annuelle à la Mairie de Cotonou le jeudi 26 décembre 2013 jusqu’à vingt (20) heures sans être informé à son sujet par le Maire de ladite commune pour m’assurer de la garantie sécuritaire idoine, j’ai instruit les forces de l’ordre à l’effet d’empêcher son déroulement… » ;

Considérant qu’il déclare: « L’Arrêté attaqué porte sur des mesures sécuritaires exceptionnelles dans les Départements de l’Atlantique et du Littoral et a pour objet, le dessaisissement des maires des communes desdits départements de leur compétence de traitement des lettres d’information de manifestations publiques. Il est précisé par l’Arrêté querellé et ceci conformément aux dispositions de l’article 5 du décret numéro 2005-377 du 23 juin 2005 portant règlementation du maintien de l’ordre public que : « Dans le but du maintien de l’ordre public et de son rétablissement en ces temps de crise sociale, la mesure ci-après est prise dans les Départements de l’Atlantique et du Littoral : Toute demande d’information d’une manifestation publique, déposée par les manifestants auprès d’un Maire de Commune, est immédiatement transmise au Préfet sans aucun autre traitement de ladite demande. Cette mesure reste en vigueur sur tout le territoire des Départements de l’Atlantique et du Littoral jusqu’à l’accalmie totale de l’actuelle tension sociale. … Le présent arrêté vaut décharge des Maires des communes des Départements de l’Atlantique et du Littoral ».

Il convient de noter alors que le recours de Monsieur Serge Roberto PRINCE AGBODJAN tend à vérifier la légalité de l’Arrêté querellé du moment où le dessaisissement qu’il condamne dans son recours est prévu par le décret numéro 2005-377 du 23 juin 2005 portant règlementation du maintien de l’ordre public qui est pris en application de l’article 13 de la loi numéro 97-028 du 15 janvier 1999.

Le requérant a opéré dans son recours une comparaison entre la lettre numéro 2/2009/DEP-ATL-LIT/SG/SPAT du 1er juin 2009 et l’Arrêté n° 2/388/DEP-ATL-LITT/SG/SP-CP-C du 07 août 2012. Cette comparaison n’est pas fondée du moment où cette lettre, bien qu’émanant d’une autorité administrative, a créé une nouvelle modalité dans le cadre de l’exécution des décisions de justice qui ne se trouve dans aucun des textes organisant le pouvoir judiciaire au Bénin. Ce qui est bien différent du cas présent. En l’espèce, il s’agit d’un Arrêté pris par une autorité administrative conformément à un décret qui organise les modalités de son intervention. Il s’agit dans ce cas, de s’assurer que l’autorité administrative qui a pris l’acte a respecté les dispositions du décret qui, ici, est un texte d’application de l’article 13 de la loi numéro 97-028 du 15 janvier 1999. Ceci relève du contrôle de la légalité interne et de la légalité externe de l’Arrêté querellé.
De jurisprudence constante, la Cour Constitutionnelle est juge de la constitutionnalité et non de la légalité (Décision DCC 07-101 du 22 août 2007 et Décision DCC 13-105 du 03 septembre 2013).
Elle ne saurait donc connaître du recours en inconstitutionnalité de Monsieur Serge Roberto PRINCE AGBODJAN… » ;

ANALYSE DU RECOURS
Considérant qu’il ressort des éléments du dossier que la requête de Serge Roberto PRINCE AGBODJAN tend, en réalité, à faire apprécier par la Cour, les conditions d’application des dispositions du Décret N°2005-377 du 23 juin 2005 portant règlementation du maintien de l’ordre public ; que l’appréciation d’une telle demande relève du contrôle de la légalité et non de la constitutionnalité ; que la Cour, juge de la constitutionnalité et non de la légalité, ne saurait en connaître ; qu’en conséquence, il échet pour elle de se déclarer incompétente ;

DECIDE
Article 1er : La Cour est incompétente
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Monsieur Serge Roberto Prince Agbodjan, à Monsieur le Préfet des Départements de l’Atlantique et du Littoral et publiée au Journal Officiel.

Ont siégé à Cotonou, le huit mai deux mille quatorze,

Messieurs Théodore HOLO Président
Zimé Yérima KORA-YAROU Vice-président
Simplice C. DATO Membre
Madame Marcelline C. GBEHA AFOUDA Membre
Monsieur Akibou IBRAHIM G. Membre
Madame Lamatou NASSIROU Membre

Le Rapporteur, Le Président,
Zimé Yérima KORA-YAROU Professeur Théodore HOLO

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