A l’invitation de mon ami-frère, Mr Nicolas ADAGBE, Président du Conseil Economique et Social (CES), j’ai eu le plaisir d’assister, hier Mardi 13 Mai dans la matinée, à la cérémonie d’ouverture du séminaire marquant la célébration des vingt (20) ans d’existence du CES.
J’ai été choqué par le traitement réservé à Mme GANGBO Flore, Première Vice-Présidente du Conseil National de l’Education (CNE) : Le protocole de la cérémonie l’a pratiquement ignorée, malgré sa qualité d’ancien Ministre de la Santé ![1] Et j’ai compris rétrospectivement pourquoi le Professeur Paulin HOUNTONDJI, qui, avec raison, ne se prend pas pour n’importe qui, s’est abstenu de venir lui-même à la cérémonie. Il savait d’avance que le Protocole allait le « mal traiter »
Pourquoi ? Parce que le CNE est la dernière née de nos Institutions et n’est pas mentionnée dans la Constitution ! Il a été créé en effet, par le décret N°2009 – 139 du 39 Avril 2009 et installé par le Chef de l’Etat le Mardi 18 Août 2009. Malheureusement, il n’est pas inscrit dans le marbre de notre Constitution !!! Le Professeur P. HOUNTONDJI n’a ni l’envergure politique, ni l’entregent de son grand frère Albert TEVOEDJRE qui a réussi à transformer la Médiation de la Présidence en Médiation de la République par le biais d’une Loi d’Etat !
J’ai donc décidé de consacrer cet article au CNE pour le sortir de l’anonymat, souligner son importance aux autorités de notre pays, et plaider pour sa constitutionnalisation.
I) L’IMPORTANCE DU CNE
L’importance du CNE découle de la place que la Constitution du 11 Décembre 1990 accorde à l’éducation de notre pays. Elle dispose en effet ce qui suit :
- dans son article 12 : l’Etat et les collectivités publiques garantissent l’éducation des enfants et créent les conditions favorables à cette fin.
- dans l’article 13 elle poursuit et précise : l’Etat pourvoit à l’éducation de la Jeunesse dans les écoles publiques. L’enseignement primaire est obligatoire. L’Etat assure progressivement la gratuité de l’enseignement.
Ainsi donc notre Constitution place l’éducation parmi les premiers problèmes qu’elle aborde et traite. Et pour mieux souligner son importance, elle décrète son caractère obligatoire et envisage de la rendre gratuite progressivement !
Prenant le relais du texte constitutionnel, la Loi n°2003-17 du 11 Novembre 2003, portant Orientation de l’Education Nationale en République du Bénin, enfonce le clou en disposant, dans son article 1er :
« L’éducation en République du Bénin, constitue et demeure la première priorité nationale. »
Par ailleurs, les membres des Institutions de la République que sont :
- L’Assemblée Nationale
- La Cour Constitutionnelle
- La Cour Suprême
- La Haute Cour de Justice
- La Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication
- La Médiation de la République
- Le Conseil Economique et Social
- Le Haut Conseil à la Gouvernance Concertée
- Le Haut Conseil à la Solidarité Nationale, ne sont – ils pas les produits finis de notre Système d’Education ?
Enfin ne voyons-nous pas que c’est l’Education qui en train d’ ‘’enfanter’’ notre Nation en dotant progressivement et patiemment nos différentes ethnies d’une langue et d’une culture communes ?
Il me plaît d’ajouter ce qui suit, que j’ai tiré du discours en date du 16 Janvier 2014 de Mr Lamido SANUSI, alors Gouverneur de la Banque Centrale du Nigeria.[2] Il a dit en gros ceci, je résume : En 1960 le revenu par tête d’habitant du Nigeria était supérieur à celui de la Corée du Sud ; mais aujourd’hui ce dernier pays occupe un rang honorable parmi les pays développés alors que le Nigeria stagne, fait du surplace sur une masse considérable de richesses du sol et du sous – sol. Pourquoi ? Parce que la corruption l’empêche de réaliser son potentiel. Et le Gouverneur SANUSI, admirable de vérité, nous explique que ‘’le caractère fondamental de l’Etat nigérian, c’est que depuis des décennies, depuis que nous avons découvert le pétrole, l’Etat n’existe pas pour servir le peuple, mais comme un lieu et un moyen d’enrichissement personnel d’une très petite minorité qui contrôle le pouvoir politique. Peu importe d’où vient cette minorité d’exploiteurs. Que ce soit au Nord ou au Sud ou que ce soit des musulmans ou des chrétiens, des militaires ou des civils,…’’. Pendant que la corruption a fait fuir les investissements au Nigeria, les Américains, dans le cadre de leur politique de ‘’containment’’ de la République Populaire de Chine, ont décidé d’investir massivement dans la Corée du Sud, dévastée par la guerre de Corée[3] qui les a opposés pendant 4 ans à la République Populaire de Chine. C’est ainsi qu’est né le premier Dragon de l’économie asiatique, sur la base d’une scolarisation à 100% ; ce qui ne figure pas dans le texte de SANUSI. Les autres Dragons qui ont suivi (Singapour, Malaisie, …etc) n’ont pas échappé à cette règle : Une scolarisation totale, à 100% a servi de base à leur émergence économique. Autrement dit et pour résumer, l’éducation est la base du développement.
Je crois en avoir suffisamment dit pour souligner l’importance de l’Education en général, et dans notre Nation en particulier.
Il en découle que l’Institution qui la représente doit occuper une place éminente parmi les Institutions de la République. En conclusion, le CNE est mal classé. Il faut donc le rétablir dans le rang éminent qui doit être le sien. Pour cela il doit remplir deux conditions.
II) REMETTRE LE CNE A SA JUSTE PLACE
La première condition, c’est d’en faire une Institution constitutionnelle. Il faut l’inscrire dans le marbre de la Constitution. Et en attendant la révision non opportuniste de notre Loi Fondamentale, une Loi organique doit l’ériger au rang des autres Institutions de la République.
Mais il faudra aussi et surtout faire du CNE une Instance vraiment représentative du monde de l’Education. Nous sommes en train de construire une démocratie et toutes nos Institutions doivent être mise en place selon des procédures démocratiques.
Le CNE actuel est une assemblée de 38 membres dirigée par un Bureau Permanent de 7 Membres issus des 38 de l’Assemblée Générale.
Il a été constitué, pour sa première mandature de 4 ans qui a pris fin en 2013, par cooptation, pour ne pas dire par copinage.
Je propose que le prochain CNE soit élu en gros selon la procédure de désignation des membres de la HAAC. Autrement dit, chacun des acteurs de notre Ecole doit y déléguer démocratiquement ses représentants, à savoir :
- Les Elèves et Etudiants
- Les Enseignants du Primaire : Instituteurs et Directeurs d’Ecole
- Les Enseignants du Secondaire
- Les Enseignants du Supérieur
- Les différents Corps de Contrôle : Conseillers Pédagogiques et Inspecteurs
- Les Administrations Educatives (Censeurs, Directeurs, Proviseurs, Recteurs, Personnel de soutien)
- Les Parents d’Elèves à chaque niveau ou degré.
Compte tenu de l’importance de la question, je propose, la mise sur pied d’un Comité ad hoc par la Présidence de la République (le CNE dépend en effet du Chef de l’Etat) pour :
1- Proposer un nouveau projet de Règlement Intérieur
2- Les modalités pratiques d’élection des membres des grandes composantes du nouveau CNE
CONCLUSION
Le nouveau CNE, démocratiquement élu et véritablement représentatif de l’Ecole Béninoise doit prendre le rang qui lui sied parmi les Institutions de la République ; et son Président doit bénéficier de tous les avantages et prérogatives accordés à ses collègues des autres Institutions. Comme eux, il doit avoir rang de Ministre et bénéficier des émoluments conséquents.