Le président de la République a pris part, samedi 17 avril dernier à Paris, au sommet pour la sécurité au Nigeria. La rencontre a accouché d’un plan d’actions visant à mettre hors d’état de nuire la secte islamiste nigériane, Boko Haram.
Le sommet de l’Elysée était sobre dans l’organisation mais d’un enjeu capital pour la paix et la sécurité dans la sous-région ouest-africaine et le bassin du Lac Tchad. Les chefs d’Etat Goodlock Jonathan, du Nigeria, Boni Yayi du Bénin, Mahamadou Issoufou du Niger, Idriss Deby Itno du Tchad et Paul Biya du Cameroun ont répondu présents à l’invitation du président français, François Hollande, pour réfléchir sur les mesures stratégiques et logistiques à prendre pour mettre fin aux exactions du groupe terroriste Boko Haram, au nord du Nigeria.
Aux côtés de François Hollande, il y avait également le président du Conseil européen Herman Van Rompuy, la sous-secrétaire d’Etat pour les affaires politiques des Etats-Unis d’Amérique, Wendy Sherman, le ministre des Affaires étrangères britannique, William Hague.
Ces deux pays ayant engagé leur assistance au Nigeria, depuis l'enlèvement en avril dernier, de plus de 200 lycéennes à Chibok, dans le nord-est du Nigeria. Cette rencontre qui s’est tenue, pratiquement six mois après le sommet de l’Elysée pour la paix et la sécurité en Afrique, entend donner une nouvelle dimension à la coopération entre les pays de la région dans la lutte contre la secte islamiste, notamment dans le domaine des échanges de renseignement, pour une meilleure sécurisation des frontières.
L’Elysée entend surtout y tirer des conclusions opérationnelles, en l’occurrence des mesures d’actions communes auxquelles les partenaires occidentaux apporteront leur soutien et leur expertise.
Un plan régional !
«Le sens de notre initiative, c’est de faire en sorte que la menace de Boko Haram soit connue et identifiée. Boko Haram est une organisation liée au terrorisme en Afrique, dont la volonté est de déstabiliser le nord du Nigeria, mais aussi tous ses pays voisins», affirme sans ambages, François Hollande, lors de la conférence de presse de clôture du sommet.
Le président français estime que ces assises ont aidé à mieux comprendre les ramifications de cette organisation terroriste et ses capacités de nuisance, elle qui n’hésite pas à prendre en otage des ressortissants de toute nationalité, à enlever plus de 200 jeunes filles pour les réduire à l’esclavage. «Nous avons décidé d’agir. Nous n’avons pas attendu la réunion de Paris avant d’engager des actions de renseignements, d’informations et de surveillance pour retrouver ces jeunes filles.
Mais aujourd’hui on a décidé d’un plan d’action régional de moyen et long terme», confie-t-il. Ce plan, poursuit François Hollande, prévoit la coordination du renseignement, les échanges d’informations, le pilotage central de moyens, la surveillance des frontières, la capacité d’intervention ainsi que la présence militaire notamment autour du Lac Tchad.
«Nous voulons faire en sorte que nous puissions mieux surveiller et surtout intervenir lorsque c’est nécessaire. Nous sommes déployés pour retrouver les jeunes filles», insiste-t-il. Goodlock Jonathan, président de la République fédérale du Nigeria, rassure que tout est mis en œuvre pour retrouver les filles enlevées, adhérant totalement à la stratégie régionale décidée par Paris.
«Le problème Boko Haram a cessé d’être un problème nigérian pour devenir un problème régional et continental. Nous sommes ici pour déclarer la guerre à Boko Haram, on va les poursuivre et les détruire.
Nous allons prendre des mesures plus fortes pour éradiquer le phénomène», tonne Paul Biya, président du Cameroun, pays servant parfois de base-arrière pour l’organisation terroriste. Idriss Déby Itno, président du Tchad renchérit : «Ces terroristes ont déjà fait du mal dans la sous-région. Il y a des priorités qui sont arrêtées.
Il y a une forte détermination à faire face à cette situation, un engagement à faire une guerre totale à Boko Haram. Ils ont piétiné la religion musulmane, c’est u
n acte condamnable».
Le Bénin aussi concerné !
Le président de la République salue à juste titre la décision des pays participants de mutualiser leurs moyens pour venir à bout de Boko Haram. Pour Boni Yayi, le sommet constitue une approche diplomatique qui permet de sensibiliser toute la communauté internationale sur la menace de la secte islamiste.
«Nous sommes décidés à y mettre fin, l’intolérance religieuse n’a plus sa place dans notre sous-région. Nous sommes décidés à combattre Boko Haram et à prendre les mesures pour que les filles kidnappées soient libérées», soutient-il, annonçant des actions intégrant le dialogue interreligieux.
Pour le chef de l’Etat, le Bénin jouera résolument sa partition dans la mise en œuvre du plan concocté. «Les gens donnent parfois l’impression que nous ne sommes pas concernés par la question de Boko Haram, ce n’est pas exact.
Nous avons récemment intercepté des tenues militaires qui devraient transiter par le port de Cotonou et convoyer vers le nord du Nigeria. Tous les pays sont concernés par le phénomène Boko Haram. Nous avons rassuré le président François Hollande que le Bénin ne sera pas le maillon faible.
Nous ferons tout pour que la solution sous-régionale connaisse du succès », confie-t-il. Mahamadou Issoufou, président du Niger se réjouit quant à lui que le sommet ait décidé des mesures à long terme en rapport avec la situation socio-économique des régions où opèrent les terroristes. «Nous avons décidé de mettre en place un plan de développement social qui peut aider à endiguer ce fléau car le principal allié du terrorisme, c’est la pauvreté», avance-t-il.
N’Djamena, la capitale du Tchad a été choisie comme plate-forme d’opérationnalisation du plan d’actions. Le président François Hollande réitère l’engagement de son pays, des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne à appuyer le Nigeria dans la recherche des filles disparues et à accompagner les efforts pour mettre complètement Boko Haram hors d’état de nuire.
Le plan d’actions de Paris
Le sommet de Paris sur la sécurité au Nigeria s’est soldé par un plan d’actions visant à mettre fin aux dérives de la secte islamiste Boko Haram à l’intérieur et hors du Nigeria.
Au plan bilatéral, les pays participants ont décidé de procéder à des patrouilles coordonnées dans la lutte contre le groupe terroriste et la recherche des filles disparues, de mettre en place un système de partage de renseignement, de créer un mécanisme d’échanges d’informations sur les trafics d’armes, de renforcer les mesures de sécurisation des stocks des armées et de mettre sur pied un dispositif de surveillance des frontières.
Au niveau multilatéral, il a été retenu de construire une stratégie régionale de lutte contre le terrorisme dans le cadre de la commission du bassin du Lac Tchad. Les participants se sont également engagés à accélérer la mise en place de sanctions internationales, en priorité dans le cadre des Nations Unies, à l’encontre de Boko Haram, d’Ansaru et de leurs principaux responsables.
Le sommet s’est aussi engagé à mobiliser les bailleurs de fonds en faveur des programmes favorisant le développement socio-économique des régions concernées. Il est annoncé que le Royaume Uni accueillera, en juin prochain, une réunion ministérielle de suivi pour faire le point des progrès du plan d’actions de Paris.