Le retard que connait la correction de la Liste électorale permanente informatisée (Lépi) devient criard. Pour situer les responsabilités, le bureau de l’Assemblée nationale a rencontré les membres du cos/Lépi pour s’imprégner de l’évolution des travaux. De cette rencontre, il ressort que les Béninois devront attendre novembre 2014 pour voir la Lépi corrigée. Dans le même temps la Cour constitutionnelle dans sa décision Dcc 14-103 rendue ce 27 mai 2014 reprécise que les élections ne sauraient être organisées sans la Liste électorale permanente informatisée (Lépi). A bien y voir, cette décision de la Cour constitutionnelle constitue un désaveu à la proposition de loi du Prd visant à confectionner une liste ad hoc pour les prochaines élections.
Le Bénin accuse aujourd’hui un grand retard pour l’organisation des élections communales et municipales. Le mandat des maires à expiration, les députés pour éviter le vide juridique, ont proposé et voté une loi prolongeant leur mandat, le temps d’actualiser la liste électorale permanente informatisée. Malheureusement, le cos/lépi mis en place pour la correction du fichier électoral peine à s’acquitter de sa mission depuis plus d’un an. Plusieurs fois les membres de cet organe sont montés au créneau pour fixer des échéances mais sans jamais pouvoir les respecter. D’où une impasse qui donne à réfléchir aux acteurs politiques du pays. C’est certainement ce qui a motivé les députés du groupe parlementaire Prd à introduire au parlement une proposition qui consiste à concevoir une liste ad’ hoc dans le cadre de l’organisation des élections communales et municipales. Sauf que la vision du Parti du renouveau démocratique semble ne pas être partagée par les sages de la Cour constitutionnelle.
Décision Dcc 14-103
Avec sa dernière décision, la Cour constitutionnelle met déjà en difficulté le groupe parlementaire Prd dirigé par Augustin Ahouanvoébla qui pensait trouver le bon raccourci pour l’organisation des communales dans les meilleurs délais. En effet, en réponse à une requête du juriste Prince Agbodjan, la Cour constitutionnelle a réaffirmé fermement que l’organisation des élections est subordonnée à l’utilisation de la la Lépi. D’ailleurs, cette décision de la Cour constitutionnelle ne surprend guère les spécialistes des questions de droit qui pensent que les sages de la Cour sont restés conséquents envers eux-mêmes, vu que la même Cour avait déjà déclaré conforme à la Constitution la loi instituant la Lépi.
Quitter l’impasse !
Nous sommes à moins d’un an de la fin du mandat des députés. Ce qui revient à dire que si le cos/Lépi, comme à ses habitudes, ne respectait pas le nouveau délai qu’il s’est lui-même fixé, les prochaines Législatives risquent de subir le même que sort que les communales. Mieux, il serait très peu envisageable que la Lépi promise pour fin novembre 2014 permette d’organiser une élection avec l’échéance des Législatives. La correction de la Lépi revêt donc deux enjeux majeurs : corriger le retard de 2013 lié aux communales et garantir l’organisation à bonne date des Législatives
. A bien y voir, le deuxième enjeu parait encore plus urgent quand on sait que les députés ne pourront prolonger leur propre mandat par une loi comme ce fut le cas pour les maires. Toutefois, Me Jacques Migan pense que « seule l’Assemblée nationale détient le pouvoir législatif et peut donc résoudre la grave crise politique qui se profile à l’horizon. Elle peut le faire en modifiant ou en abrogeant purement et simplement la loi instituant la Lépi qu’elle a elle-même préalablement adoptée ». Pour soutenir son argumentaire, l’ancien bâtonnier de l’ordre des avocats du Bénin explique que cette pratique législative connaît des précédents. Pour lui elle a déjà été appliquée le 20 décembre 2005 alors que le Bénin devrait organiser en mars 2006, l’élection présidentielle. « Cette organisation des élections se heurtait au respect d’un délai de 6 mois prescrit par la loi électorale en vue de l’organisation du Recensement Electoral National Approfondi (RENA). Pour éviter l’impasse (le mandat du Président étant un délai fixe, non susceptible d’interruption, ni de prescription), le délai prescrit par la loi électorale ne pouvant plus être respecté, les députés ont procédé le 20 décembre 2005 à la suspension du Recensement Electoral National Approfondi (RENA) pour permettre la tenue à bonne date des élections en 2006.
Saisie, pour apprécier la constitutionnalité de cette loi qui a suspendu le RENA, la Cour constitutionnelle par sa décision en date du 27 décembre 2005 a jugé conforme à la Constitution la loi 2005 – 41 portant suspension pour l’élection présidentielle de mars 2006 par la loi n° 2005 – 14 du 28 juillet 2005 portant règles générales pour les élections en République du Bénin », explique l’avocat.
Pour éviter donc tout blocage qui pourrait provoquer une situation politique très tendue et assurer des élections transparentes au Bénin, la Lépi ne pouvant plus être corrigée faute de moyens et de temps, une possibilité s’offre aux députés : voter une loi modifiant ou abrogeant la loi instituant la Lépi.