Depuis une quarantaine d’années, les structures spécialisées en santé de la reproduction au Bénin n’ont de cesse de faire la promotion de la planification familiale à travers diverses sensibilisations sur le terrain et via les médias. Des sensibilisations qui se sont intensifiées ces dernières années. Pourtant, selon la 4è enquête de démographie et de santé au Bénin (EDSB IV), la proportion de femmes protégées par une méthode de contraception moderne n’est que de 7,9%, et le taux de femmes en union qui désirent espacer les naissances ou ne plus tomber enceintes est seulement de 32%. Au regard de ces statistiques, l’on est en droit de se demander pourquoi plusieurs béninoises hésitent encore à adopter les méthodes de planning familial ? Le docteur Serge KITIHOUN, Expert en Santé Sexuelle et de la Reproduction, et Directeur des Programmes de l’Agence Béninoise de Planification Familiale (ABPF), nous éclaire en la matière.
Que peut-on comprendre par Planification familiale?
La planification familiale (PF) est l’ensemble des moyens et méthodes mis à la disposition des individus, des couples et de la communauté pour : avoir le nombre d’enfants voulu au moment voulu ; permettre aux couples infertiles et stériles d’avoir des enfants ; puis promouvoir la parenté responsable, y compris la lutte contre les infections sexuellement transmissibles dont le VIH. En tant que telle, la planification familiale vise à aider les populations à mener une vie sexuelle épanouie tout en contribuant à l’amélioration de leur niveau de vie.
Quelles sont alors les méthodes de PF qui existent ?
On peut distinguer trois grands groupes de méthodes de PF : les méthodes traditionnelles, les méthodes naturelles, et les méthodes modernes. Dans ce dernier groupe, on retrouve les méthodes hormonales comme les pilules, les injectables, les implants sous cutanés, les pach dermiques, et le DIU à la progestérone-le progestassert. Puis les méthodes mécaniques comme les préservatifs masculin et féminin ; les méthodes chimiques comme les comprimés vaginaux, crème, mousse, ovules vaginaux, et les méthodes chirurgicales volontaires.
A votre avis et sur la base de vos enquêtes, qu’est-ce qui pourrait expliquer le fait qu’il y ait encore une multitude de femmes béninoises réticentes vis-à-vis des méthodes de PF ?
Cette réticence vis-à-vis des méthodes de PF qui persiste au niveau de certaines femmes béninoises s’explique à plusieurs égards. Certaines d’entre elles craignent les effets secondaires de ces méthodes, tandis que d’autres hésitent en raison des rumeurs et idées préconçues en la matière. Pour d’autres encore, cette réticence s’explique par l’attitude pro nataliste qui implique que les femmes béninoises veulent avoir autant d’enfants que Dieu leur en donne, c’est-à-dire beaucoup. Par ailleurs, certaines femmes hésitent à recourir aux méthodes de PF à cause des pesanteurs socio culturelles, de l’opposition des hommes (généralement leurs maris), de la sous-information, et surtout à cause de la pauvreté. L’utilisation permanente de ces méthodes ayant un coût donné.
Au regard des motifs que vous venez ainsi d’énumérer, peut-on donc affirmer que les méthodes de PF ne sont pas sans impacts sur la santé de celles qui les utilisent, comme l’on entend souvent des gens le dire ?
Vous faites certainement allusion aux effets secondaires. Presque tous les produits pharmaceutiques ont des effets secondaires qui ne sont pas en fait nocifs à la santé de l’Homme. Puisqu’ils ont été testés par les structures compétentes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Ces effets secondaires sont passagers et ne devraient pas porter atteinte à la vie de l’utilisateur du produit. C’est en considération de cela que l’Organisation Mondiale de la Santé délivre un certificat pour autoriser la commercialisation et l’utilisation de tel ou tel produit pharmaceutique.
Quels sont les avantages qui découlent alors de l’utilisation des méthodes de PF, à l’échelle réduite, (pour les femmes et les ménages), et à l’échelle large (pour le pays) ?
Comme je l’ai indiqué plus haut en définissant la planification familiale, les méthodes de planning familial permettent aux femmes et aux ménages d’avoir le nombre d’enfants voulu au moment voulu et d’avoir une vie sexuelle plus épanouie. Avec la PF, les couples n’ont plus la hantise ni le stress d’être surpris par une grossesse. Ainsi, le planning familial permet aux ménages de pouvoir bien gérer leur quotidien et d’avoir un niveau de vie convenable. Quant à l’échelle large du pays, la planification familiale favorise la réduction du taux de natalité, donc de l’explosion démographique. Par conséquent, la PF garantit à long terme aux pays africains de forte natalité un développement humain durable s’exprimant par un mieux-être de la population.
Pour celles désireuses de bénéficier des services de PF sur le territoire, à quelles personnes habilitées peuvent-elles s’adresser et à quels lieux ?
Elles peuvent se rendre dans toutes les cliniques de l’ABPF se trouvant à Natitingou au quartier Yokossi ; à Parakou (Tranza) ; à Savalou dans la rue de l’hôpital de zone, à Abomey vers le CEG Jeanne d’Arc ; à Lokossa (Ayivèdji) ; à Cotonou à Sikècodji, Akpakpa (derrière le stade René Pleven) ; et à Porto-Novo (Ouando). Elles peuvent aussi s’adresser aux cliniques mobiles de l’ABPF, aux cliniques franchisées de l’ABPF (des cliniques en partenariat avec l’ABPF qui les approvisionne et les supervise), aux cliniques profam, et bien sûr aux structures de santé de l’Etat.
Des conseils pratiques à prodiguer aux femmes sur la PF ?
Je ne leur recommanderai qu’une seule chose : pour leur épanouissement, qu’elles aillent dans les structures ci-dessus citées pour mieux s’informer sur la PF et y adhérer.
Votre mot de la fin
PF = un pilier incontournable pour le bonheur des familles et le développement de la Nation.