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Le Matinal N° 4394 du 22/7/2014

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Discours d’installation de la 5ème mandature de la Haac:Yayi affiche sa haine contre la liberté de la presse
Publié le mardi 22 juillet 2014   |  Le Matinal


Le
© Autre presse par DR
Le président de la République S.E.M Bony Yayi


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Dans son discours hier lundi 21 juillet 2014, le Président Boni Yayi a, une nouvelle fois, démontré son indifférence face aux maux qui minent la liberté de la presse en République du Bénin. Il a tenu des propos qui justifient que tant que cela dépendra de lui, la dépénalisation des peines privatives de la presse ne sera pas une réalité. C’était à l’occasion de la cérémonie d’installation des membres de la 5ème mandature de la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac).

Il ne le cache plus. Yayi Boni est hostile à la liberté de la presse en République du Bénin. Le Président de la République se comporte désormais comme s’il avait des comptes à régler avec la presse de son pays.

« …En liaison avec les recommandations de ces Etats Généraux, vous aurez donc à engager des réformes courageuses qui peuvent être douloureuses mais nécessaires pour asseoir définitivement dans notre pays une presse libre et suffisamment responsable et des médias respectueux de la déontologie, des Institutions et contribuant à la paix sociale et au développement de notre pays, le Bénin.

Au titre de ces réformes s’inscrit par exemple la dépénalisation qui préoccupe mes compatriotes de la presse. La réponse à cette réforme dépend des acteurs eux-mêmes lorsqu’ils auront décidé d’exercer leur profession dans le strict professionnalisme… ».

Ce passage est tiré du discours prononcé hier par le Président Yayi Boni. Il envoyait ainsi la nouvelle équipe de la Haac en mission. Deux bouts de phrases attirent notre attention : « …vous aurez à engager des réformes courageuses qui peuvent paraître douloureuses mais nécessaires pour asseoir dans notre pays une presse libre,… ».

Pour celui qui connaît les prérogatives de la Haac, il faut comprendre simplement que Yayi Boni encourage les auditions publiques qui n’ont souvent que pour effet, la suspension des organes de presse, voire leur fermeture définitive ; ce qui est contraire aux principes démocratiques et donc, à la liberté de presse. Dans la sous région, cette manière de livrer la presse à la vindicte populaire est proscrite. Les auditions publiques, avec large couverture médiatique ont fait perdre à la presse béninoise, son caractère sacré.

Les acteurs des médias qui sont obligés de s’expliquer devant les caméras et micros se voient livrer au peuple comme des assassins. La presse, dans son ensemble, a toujours été contre cette pratique et a souvent reçu le soutien des organisations internationales. Si, dans une déclaration publique, Yayi Boni vient à dire qu’il faut prendre des mesures courageuses et douloureuses pour assainir la presse, c’est qu’il confirme les rumeurs selon lesquels il a eu sa main derrière la suspension et d’autres menaces de suspension de certains organes de presse au Bénin.

L’autre phrase inquiétante est celle-ci : « Au titre de ces réformes s’inscrit par exemple la dépénalisation qui préoccupe mes compatriotes de la presse. La réponse à cette réforme dépend des acteurs eux-mêmes lorsqu’ils auront décidé d’exercer leur profession dans le strict professionnalisme ».

Yayi Boni trouve aujourd’hui que la presse béninoise n’est pas professionnelle et se base sur cela pour supporter le maintien de l’emprisonnement des journalistes dans le projet de code l’information et de la communication au Bénin.

Il a peut-être une mémoire courte ; mais il faut qu’il se rappelle du rôle joué par cette presse pour son avènement au pouvoir en 2006. Il aura tort d’oublier le combat mené par les acteurs des médias pour que la Constitution béninoise ne soit pas révisée en sa défaveur en 2005 sous le Général Mathieu Kérékou.

Yayi aura péché de ne pas reconnaître que cette presse a été d’un grand soutien pour son affaire de ‘’K.O en 2011’’. C’est un Chef d’Etat et on ne saurait le traiter d’ingrat, vu le respect dû à l’Institution qu’il incarne. Mais cette manière de traiter la presse béninoise est assez grave.

Qu’a-t-il fait pour rendre professionnelle la presse ?

Le Président de la République a certainement oublié que le régime qu’il incarne se doit de travailler pour rendre plus professionnelle la presse béninoise. La presse est un couteau à double tranchant. Elle l’a servi des préparatifs jusqu’à l’avènement de son régime en 2006. Cette presse l’a aussi accompagné pour l’obtention d’un second mandat. Elle était professionnelle.

Le Bénin est à la veille des élections de grandes portées et il ne sert à rien de continuer à chanter l’éloge d’un Chef d’Etat partant. Si la presse a donné à Yayi Boni deux mandats, qu’est-ce qu’elle a reçu en retour de Yayi ? Le milliard de la presse est-il une réalité ? La création et l’animation effective des Ecoles de formation en matière de presse et de la communication sont-elles des réalités ? La sécurité des journalistes et l’amélioration des conditions de vie et de travail des acteurs des médias ont-elles été réelles sous Yayi ? La réponse est non.

L’aide de l’Etat à la presse privée n’a augmenté sur les 8 ans que de 50 millions FCfa. L’Ecole de formation ouverte à Savalou pour les journalistes est en berne. Elle manque d’équipement et les étudiants sont découragés. Plus rien n’y marche comme souhaité. La filière ouverte à l’Enam n’a pu aller à son terme, malgré les engagements publics du Chef de l’Etat.

Le gouvernement traîne une ardoise de plusieurs dizaines de millions depuis des années, mettant en sursis l’avenir de ceux qui ont été formés dans cette Ecole prestigieuse. Au moins sous le Général Kérékou, des journalistes ont été formés à l’extérieur aux frais de l’Etat. Ils sont nombreux à animer la presse de nos jours.
La presse a déjà fait plusieurs pas pour montrer qu’elle est utile à son pays. Il reste le tour de Yayi Boni qui devra démontrer son amour et sa reconnaissance pour cette presse.

Félicien Fangnon



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