Amos Elègbè a lâché le morceau. Dans la ferveur de la célébration de la fête nationale, il a désigné le bouc émissaire parfait à qui pourrait être imputée la responsabilité du défaut de l’alternance au pouvoir. La jeunesse serait donc la solution miracle à l’avènement d’un nouveau régime au soir du 06 avril 2016. Une déclaration plutôt curieuse provenant d’une telle figure politique qui a fait feu de tout bois pour s’illustrer aux côtés des gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays depuis la révolution marxiste-léniniste. Qu’a-t-il fait lors de ce parcours plutôt atypique à l’endroit des jeunes appelés à prendre la relève ?
Fer de lance de la nation, la jeunesse est une richesse qui, paradoxalement, est considérée comme un problème. En proie à l’épineuse question du chômage massif, les jeunes qui dominent, de tout leur poids, la pyramide des âges, ne sont franchement pas pris en compte dans les politiques nationales de développement.
Des promesses purement politiciennes voire utopiques leur sont constamment jetées à la figure comme on jette des piécettes aux mendiants. Dans ces conditions, les jeunes qui espèrent tant de leurs aînés, se réfugient dans le silence et le désarroi. Si même reclus dans leur position, on en vient à leur demander de mener un combat qui n’est pas spécifiquement le leur, pourra-t-on contenir leur réaction ?
Aujourd’hui, le défi du jeune est de s’assumer socialement au lieu de prétendre mobiliser ses pairs dans le sens de la lutte pour l’alternance. Et contrairement à ce qu’a affirmé le conseiller spécial aux affaires politiques du chef de l’Etat, le renouvellement d’un régime n’est pas prioritairement l’affaire de la jeunesse. Les règles du jeu en la matière sont suffisamment claires. Il suffit juste de les respecter et tout le reste suivra.
En 2016, le Bénin doit négocier un virage important de son histoire comme ce fut le cas en 2006. A priori, il n’y a aucune raison qui justifie le fait qu’on demande aux jeunes de faire la révolution ou de se mobiliser pour l’alternance alors qu’il y a plus urgent. Arrêtons de nous faire peur. C’est vrai que des indices ne sont pas de nature à rassurer par rapport à certaines ardeurs anti-démocratiques. Mais, ce n’est pas pour autant qu’il faut distraire le peuple et l’éloigner de ses vraies préoccupations. Si Amos Elègbè est préoccupé par le sort des jeunes, au lieu de les inciter à la rébellion, de sa position, il peut faire bouger les choses en leur faveur. C’est le moins qu’il puisse faire en compensation de tout le bien que le pays lui a procuré et que ces jeunes dont il dit se soucier du sort seraient plus heureux s’ils avaient eu autant.