Les membres de l’Autorité nationale de lutte contre la corruption (ANLC) ont été officiellement installés dans leurs fonctions le mercredi 15 mai 2013. C’est à la faveur d’une audience solennelle de la Cour Suprême tenue dans la salle d’audience de la chambre administrative à Porto-Novo ; une audience au cours de laquelle, les nouveaux chasseurs des corrupteurs etcorrompus au Bénin ont prêté serment devant les juges de la haute juridiction avec la présence remarquable des corps constitués de la nation, présidents d’institutions, députés, membres du gouvernement, membres des représentations diplomatiques et consulaires, autorités politico-administratives de porto-Novo, sages et notables ainsi que parents et amis des récipiendaires.
« Je jure de bien remplir fidèlement et loyalement en toute impartialité et équité les fonctions dont je suis investi, de respecter en toute circonstance les obligations qu’elles m’imposent et de garder le secret des délibérations auxquelles j’ai pris part ». C’est par cette formule consacrée prononcée devant les juges de la Cour Suprême, conformément aux dispositions de l’article 8 de la loi n° 2011-20 du 12 octobre 2011 portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin que les membres de l’Autorité nationale de lutte contre la corruptions ont officiellement été installés dans leurs fonctions consistant à traquer et endiguer la corruption au Bénin. Il s’agit d’Edouard Alexandre Dagba (Inspecteur d’Etat), Agapit Napoléon Maforikan (communicateur), Elisabeth Gnansounou Fourn (sociologue universitaire), Georges Patinvoh (Inspecteur des banques), Guy Ogoubiyi (Magistrat), Pierre Lucien Brun (Expert comptable), Madjrè Victorin Togninou (Administrateur des impôts), Raoul Idohou Afouda (Inspecteur des Douanes), Koffi David Virgile Quenum (spécialiste en passation de marchés publics), Kossi Dansou (Lieutenant colonel de la gendarmerie ), Didier Atchou (commissaire de police) et Jean-Baptiste Elias (ONG) officiant dans le domaine de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption). Quant au 13ème membre, Victorien Attolou représentant du patronat béninois, il était absent à cette cérémonie de prestation de serment pour des raisons de santé. Il est important de signaler que, toujours, selon cet article 8 de la loi portant lutte contre la corruption, «en cas de parjure, le membre coupable est puni d’une amende d’un à cinq millions FCFA ».
Les mises en garde du procureur général
« …Votre mission est très redoutable, délicate et très difficile », a déclaré le procureur général de la république aux membres de l’ANLC dans son réquisitoire, après avoir rappelé la solennité et l’importance de cette cérémonie de prestation de serment. Il s’agit, selon lui, d’un moment historique, en ce sens que c’est pour la toute première fois que, par voie législative, le Bénin se dote d’une loi contre la corruption, avec les attributs d’une véritable autorité. Mieux, explique t-il, la considération accordée à cet organe de lutte contre la corruption s’apprécie non seulement au regard de ce qu’il est créé par une loi, mais aussi au regard de la hauteur de la juridiction qui reçoit le serment de ses membres. La Cour Suprême est, en effet, la plus haute juridiction de l’Etat en matière administrative, judiciaire et des comptes de l’Etat. Enfin, la mission de l’ANLC telle que dispose l’article 5 de la loi 2011-20 lui confère également une place de choix dans la vie publique béninoise. C’est pourquoi, Raoul Hector Ouendo se fondant sur ses propres expériences, pour avoir volontairement siégé au sein de la commission d’enquête sur l’affaire dite des 70 milliards, a exhorté les membres à prendre la mesure de leur mission afin de ne pas décevoir le peuple béninois qui porte tout son espoir en eux. « Vous êtes des icônes dont le peuple béninois à besoin, il ne tient qu’à vous de demeurer dans ce rôle d’icône pour le plus grand bien de tous, leur a-t-il dit, avant de les avertir de ce que, demeurer dans un tel rôle, n’est pas chose facile dans l’environnement béninois. Ainsi, il leur conseille de lutter contre tous, contre eux-mêmes, de se battre contre amis et parents qui n’acceptent la lutte contre la corruption que lorsqu’elle s’applique aux autres et enfin contre l’environnement social et politique béninois. Le magistrat Ouendo leur a également conseillé de faire preuve d’entêtement et d’être prêts à tout sacrifier afin de réussir leur mission. Car, la loi leur donne toutes les armes nécessaires pour réussir. Il n’a pas manqué de féliciter le gouvernement et l’assemblée nationale pour l’avènement de cette loi qui, surtout, rend l’ANLC financièrement autonome et indépendante des autres institutions de l’Etat.
Impressions de quelques membres de l’Anlc et de personnalités invitées
Martin Assogba, président de l’OngAlcrer
« …Nous attendons de voir comment cette Autorité nationale de lutte contre la corruption va travailler. Nous, en tant qu’organisations de la société civile, œuvrant depuis 19 ans dans la promotion de la lutte contre la corruption et la promotion des droits de l’homme, nous n’allons pas les lâcher d’un pouce. Nous allons leur déferrer des dossiers que nous allons leur demander d’étudier. Au cas où ils ne les étudieront pas, nous serons obligés de les dénoncer. Ils doivent faire en sorte que la corruption quitte notre pays et que les gens craignent désormais cet organe… »
Boniface Yèhouétomè, 2ème Vice-président de l’Assemblée nationale
« …La dernière étape de l’application de la loi contre la corruption vient d’être accomplie pour permettre à cet organe de commencer par travailler. J’ai vu la qualité des membres qui ont été choisis pour composer cet organe et nous souhaitons que la loi contre la corruption soit véritablement appliquée (…) Il est important que chacun puisse jouer sa partition, pas seulement les membres de l’Autorité nationale de lutte contre la corruption, pour que ce fléau disparaissent complètement de notre pays… »
Eric Kouagou N’Dah, Ministre des enseignements maternel et primaire
« …Mes impressions sont bonnes. Après plus de 20 ans de démocratie, nous sommes arrivés à installer une Autorité nationale de lutte contre la corruption à travers une loi votée par les représentants du peuple. C’est une institution qui a maintenant les mains libres pour travailler (…) Ceux qui composent l’organe sont des personnalités bien connues et respectables. J’espère qu’avec ces gens responsables, nous allons atteindre un bon résultat… »
Elisabeth Afiavi Gnansounou Fourn, Membre de l’Anlc
«…Nous allons continuer à nous battre comme nous en avons l’habitude. Ce que nous avons toujours fait à l’université jusqu’à aujourd’hui, nous allons le continuer avec la même rigueur, la même détermination… »
Agapit Napoléon Maforikan, Membre de l’Anlc
« C’est un moment de fierté et de solennité parce que nous venons de prendre le pari d’éradiquer le fléau de la corruption. Individuellement, on ne va pas prendre un pari. J’ai l’espoir très engagé que les 13 membres essaieront d’honorer cette confiance qu’on a placée en eux. Nous essaieront de respecter les dispositions de la loi et de les appliquer à fond pour faire progresser cette bataille contre la corruption pour qu’à terme, on ne parle plus de lutte contre la corruption, mais d’éradication de la corruption au Bénin. Accompagnez-nous par les informations, par le soutien et surtout dénoncez quand vous pensez que nous sortons de la ligne droite… »
Professeur Théodore Holo, président de la Haute Cour de Justice
«…Un pas vient d’être fait dans la lutte contre la corruption parce qu’une loi a été votée et il fallait un organe pour garantir le respect de cette loi. Il n’y a pas longtemps, nous avons reçu à la Haute Cour de justice une délégation des Nations Unies pour évaluer les efforts faits par notre pays pour respecter la Convention des Nations sur la lutte contre la corruption (…) Je souhaite bonne chance à ceux qui ont été installés pour faire un travail de qualité. Certes, on ne peut pas éradiquer la corruption parce que c’est un fléau mondial ; mais on peut quand même diminuer ses effets parce que ça handicape le développement. Les moyens prévus pour satisfaire tout un peuple ne peuvent pas être accaparés par quelques uns… »
Jean-Baptiste Elias, Membre de l’Anlc
« Je pense remercier tout le peuple béninois pour la confiance qu’il a placée en ma modeste personne pour la lutte contre la corruption que nous avons menée dans ce pays depuis près de 20 ans. Je voudrais ensuite remercier le président de la République, Chef de l’Etat, Chef du gouvernement que nous avons gentiment et fermement boosté pour que ce projet de loi puisse devenir une réalité. Je voudrais également remercier le président de l’Assemblée nationale, la présidente de la Commission des lois de l’Assemblée nationale et les députés qui ont fait de cette loi une réalité pour notre pays. C’est un pas important que nous avons eu à franchir en nous dotant de cette loi qui, je l’espère, fera que nous puissions assurer la bonne gouvernance dans notre pays, lutter contre la corruption et faire en sorte que le respect de la chose publique devienne une réalité (…) Les conseils donnés par le président de la Cour suprême doivent nous permettre de remplir à bien les fonctions qui sont les nôtres. Les membres de l’Autorité nationale de lutte contre la corruption vont se retrouver, vont essayer d’échanger, vont élire le bureau et vont se mettre au travail… »