Accueil    Shopping    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Benin    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article



 Titrologie



La Nation N° 6049 du 14/8/2014

Voir la Titrologie

  Sondage



 Nous suivre

Nos réseaux sociaux



 Autres articles



Comment

Société

Retrait du droit de grève aux magistrats : Noudjènoumè dénonce une entorse au principe de la séparation des pouvoirs
Publié le jeudi 14 aout 2014   |  La Nation


Le
© Autre presse par DR
Le Professeur Philippe Noudjènoumè, constitutionnaliste et 1er secrétaire du Parti Communiste du Bénin (Pcb)


 Vos outils




 Vidéos

 Dans le dossier

Le débat sur le retrait ou non du droit de grève aux magistrats du Bénin n’a pas fini d’agiter l’opinion publique nationale. Il connaît une nouvelle phase avec l’annonce de la saisine de la Cour constitutionnelle, l’examen de la proposition de loi introduite dans ce sens à l’Assemblée nationale, ayant été ajourné. Au cours d'un point de presse qu’il a fait hier mercredi 13 août à Cotonou, le président de la Convention patriotique des Forces de Gauche, premier secrétaire du Parti communiste du Bénin et professeur de droit public à la retraite, Philippe Noudjènoumè a tenu à remettre les pendules à l’heure.



Par Maurille GNASSOUNOU


Le président de l’Assemblée nationale, Mathurin Nago, après plusieurs rencontres infructueuses de recherches de consensus, a décidé au cours de la plénière du mardi 5 août dernier, de mettre le dossier relatif au retrait du droit de grève aux magistrats, entre parenthèses. Il a, par ailleurs, invité les signataires de la proposition de loi à solliciter l’arbitrage de la Cour constitutionnelle.Pour Philippe Noudjènoumè, il s’agit d’une grande victoire pour le peuple béninois. C'est pourquoi il a salué la mobilisation des magistrats organisés au sein de l’Union nationale des magistrats du Bénin en premier lieu, puis de l’ensemble des travailleurs, des jeunes, des défenseurs des Droits de l’Homme, puis des démocrates engagés à titre individuel dans ce combat. Selon lui, au cours du débat sur le retrait ou non du droit de grève aux magistrats, bien de choses ont été dites. Les qualifiant d’affirmations gratuites ou de contre-vérités, il a essayé de les relever. Il a balayé du revers de la main, les propos selon lesquels les magistrats du Bénin ne doivent pas avoir le droit de grève parce que, en France les magistrats n’en jouissent pas et que ledit droit s’oppose aux droits des justiciables et au droit au développement. Appréciant le contenu de la «proposition de loi portant modification de l’article 18 de la loi n°2001-35 du 21 février 2003 portant statut de la magistrature», il déduit que si elle passait, les magistrats seront non seulement privés du droit de grève mais aussi de toutes les autres libertés fondamentales. A l’en croire, ce qui semble occulté par tous ceux qui participent au débat, qu’ils soient des partisans ou des opposants à ce droit de grève des magistrats, c’est qu’aux termes de la Constitution du 11 décembre 1990, les députés ne sont pas compétents pour le leur retirer. « L’indépendance du pouvoir judiciaire à la fois à l’égard du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif, la séparation des pouvoirs, interdisent toute possibilité pour le Parlement de retirer le droit de grève aux magistrats », a expliqué Philippe Noudjènoumè se conformant à l’article 125 de la Constitution qui dispose: «Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Il est exercé par la Cour suprême, les cours et tribunaux créés conformément à la présente Constitution».
Recadrer le débat
«Si en dépit de cette disposition formelle, les députés- pouvoir législatif- peuvent, par une loi modifier substantiellement les attributions, droits et devoirs- du pouvoir judiciaire, où serait alors l’indépendance de celui-ci ? Que deviendrait alors la séparation des pouvoirs?», s’est-il interrogé. Il s’est ensuite référé à l’article 31 de la Constitution qui dispose en ces termes: «L’Etat reconnaît et garantit le droit de grève. Tout travailleur peut défendre dans les conditions prévues par la loi, ses droits et ses intérêts soit individuellement soit collectivement ou par l’action syndicale. Le droit de grève s’exerce dans les conditions définies par la loi». En disposant comme il l’a fait, estime-t-il, le constituant béninois n’a nulle part fait une exception pour ce qui concerne les magistrats. Il a fait constater que la Constitution a déjà prévu les cas d’incompatibilités, c’est- à-dire les fonctions qui sont incompatibles avec la politique ; c’est le cas des militaires.« Le Parlement est incompétent pour légiférer dans le sens de la suppression pure et simple de ce droit constitutionnel accordé à tout travailleur. Sa seule compétence se limite à réglementer ce droit », a insisté Philippe Noudjènoumè. Il en est de même de la Cour constitutionnelle qui est un organe de la Constitution et n’est pas au-dessus de celle-ci, précisera-t-il. Pour le président de la CPFG et premier secrétaire du PCB, la seule possibilité qui existe aujourd’hui, si l’on veut arracher le droit de grève aux magistrats, est de procéder à une révision de la Constitution. « A ce propos, les fausses références à l’exemple français ou d’ailleurs ne tiennent ni en droit ni en contexte politique de chacun de nos pays», a confié Philippe Noudjènoumè qui souhaite que l’on fasse la part des choses entre la Constitution française qui utilise l’expression «Autorité judiciaire» et non «Pouvoir judiciaire» comme c’est le cas avec la Constitution béninoise.C’est dans cette logique, qu’il a inscrit l’Ordonnance organique du 22 décembre 1958 portant statut de la magistrature et qui interdit le droit de grève aux magistrats qui a été prise en France. Il a fait remarquer qu’« aucun député n’a délibéré pour interdire le droit de grève aux magistrats. Il s’agit ici d’une Ordonnance-une ordonnance organique -c’est-à-dire un acte pris par le chef de l’Etat, le général de Gaulle pour réglementer une institution constitutionnelle pendant que n’existaient ni Parlement ni Conseil constitutionnel ». Autrement dit, l’exemple français n’est pas, selon lui, opposable en droit au Bénin ou transposable quant au contexte, les réalités n’étant pas les mêmes. Retirer aux magistrats ce droit, serait donc faire directement du pouvoir judiciaire le pendant immédiat de l’Exécutif.

 Commentaires