La famille est le «premier système social» par lequel le jeune enfant acquiert et développe des compétences cognitives et sociales. Cette assertion émane de Annie Feyfant, chargée d’études Veille et Analyses de l’Agence Qualité Education. Dans une étude intitulée «Les effets de l’éducation familiale sur la réussite scolaire», celle-ci a fait, entre autres, état des différents styles éducatifs familiaux et de leur niveau d’influence sur la réussite scolaire et souligne la nécessité pour les parents de tenir compte des réalités scolaires pour espérer plus de réussite scolaire d’un apprenant.
Par Alain ALLABI
Le milieu familial influe sur la réussite scolaire de l’apprenant mais les parents doivent aussi se référer au style éducatif des enseignants pour plus de performance au niveau de l’enfant. C’est ce qu’a démontré Annie Feyfant, chargée d’études Veille et Analyses de l’Agence Qualité Education de l’Institut français de l’Education. D’abord, elle fait remarquer l’existence de plusieurs styles éducatifs familiaux. Ces types de systèmes éducatifs familiaux sont «des éléments permettant d’appréhender les conditions favorables ou défavorables à une scolarisation réussie». Elle base son étude sur des travaux de spécialistes de l’éducation. Dans le lot, elle retient trois principaux types : le style permissif, le style autoritariste et le style autoritaire ou structurant.En ce qui concerne le style permissif, elle indique qu’il est caractérisé par un faible contrôle des parents mais avec un soutien élevé. Il est présenté par Diana Buamrind. Dans un tel environnement familial, l’enfant jouit d’une certaine autonomie et les parents ont recours à la motivation et à la séduction comme mode de contrôle. Elle souligne l’existence d’une ouverture aux influences extérieures. Les rôles sont peu différenciés entre le père et la mère. Le deuxième style dit autoritariste se caractérise par un contrôle élevé et un soutien faible. Il rejoint le style statutaire de Jean Kellerhals et Cléopâtre Montaudon qui mettent l’accent sur l’importance donnée aux valeurs d’accommodation. Ainsi, dans l’environnement familial où prévaut ce type éducatif, on note un contrôle coercitif des parents, la différenciation des rôles homme/femme, une grande distance parents et enfants et une grande réserve vis-à-vis des agents externes de socialisation.Le troisième type éducatif familial est de «style autoritaire ou structurant». C’est toujours Diana Baumrind qui l’a présenté. Dans ses caractéristiques principales, il partage le contrôle avec le style autoritariste. La différence est au niveau du soutien qui est plutôt élevé dans ce cas. Selon Annie Feyfant, ce style s’apparente au «style maternaliste » de Jean Kellerharls et Cléopâtre Montaudon. Dans un tel environnement, la priorité est donnée à la conformité, au contrôle direct, à la distinction entre père et mère. Quant à l’ouverture vers l’extérieur, elle est faible avec une proximité parents/enfants.
L’influence de l’éducation familiale
Au vu des typologies des styles éducatifs, Annie Feyfant soutient que l’encouragement à l’autonomie et à la prise d’initiatives est plus favorable à la réussite scolaire. Quant aux rôles stéréotypés, ils sont moins favorables. Car, ils ne permettent pas à l’enfant d’avoir l’ouverture d’esprit pour acquérir de nouvelles compétences. Et les valeurs telles que l’autonomie, l’estime de soi, l’engagement social ont de l’importance selon la place de la famille au sein de la hiérarchie sociale. Ainsi, les enfants issus d’un milieu relevant de la haute hiérarchie sociale seront fortement marqués par « la définition autonome d’objectifs ». Ces types d’enfant se montrent, en situation d’apprentissage, très coopératifs et collaborent avec l’enseignant au processus de construction du savoir. Dans la basse classe, c’est l’adaptation aux contraintes extérieures et l’obéissance aux règles qui prévaudront. Par ailleurs, Annie Feyfant indique aussi que les familles nourrissent envers le système éducatif formel deux préoccupations : les attentes cognitives et les attentes de socialisation. Dans le premier cas, les parents considèrent l’école comme un lieu devant apporter des connaissances de base à l’enfant et de développer en lui une certaine curiosité intellectuelle. Dans le deuxième cas, l’école a la posture d’un lieu où l’enfant apprend à vivre en communauté ou avec les autres. En fonction de ces attentes, les parents essaient de moduler leur style éducatif.
Des inégalités sociales
La réussite scolaire s’explique également par certaines inégalités. Entre autres, il y a les inégalités sociales auxquelles il faut ajouter les inégalités liées aux compétences des parents et à leur stratégie scolaire. La mise en évidence de cette différence est empruntée à Fabrice Murat qui, dans son ouvrage intitulé «Le retard scolaire en fonction du milieu parental : L’influence des compétences des parents», souligne que «Les compétences parentales jouent aussi un rôle direct sur la réussite scolaire des enfants, sans doute grâce à l’aide que les parents les plus compétents peuvent apporter à leurs enfants ». Mais dans son analyse, Annie Feyfant relativise l’importance des compétences parentales dans la réussite scolaire des enfants. Ainsi, elle trouve que leur influence n’est pas systématique, la corrélation entre les compétences des parents et la réussite scolaire des enfants pas toujours évidente.
Nécessité de prendre en compte le style éducatif des enseignants
Les résultats scolaires sont moins bons si les styles éducatifs sont trop différents, observe Annie Feyfant. Pour cela, elle indique que le style éducatif du milieu parental doit « prendre en compte le style éducatif des enseignants ». Autrement dit, si la forme éducative des parents s’éloigne trop de ce qui se passe en milieu scolaire, la réussite n’est pas ce qu’elle devrait être. A ce niveau, elle souligne que l’effort de prise en compte des normes scolaires est beaucoup plus prononcé chez les parents des milieux favorisés que chez les parents des milieux populaires dits défavorisés. Elle fonde son argumentaire sur les travaux de Marie Duru-Bellat et van Agnès Zanten pour qui « la permissivité » engendre des « problèmes d’attention et d’apprentissage et des attitudes hostiles à l’égard des professeurs et des pairs ». De même, ces deux chercheurs constatent qu’un «contrôle rigide induit de l’anxiété, de la passivité et un comportement obsessionnel chez l’enfant». Dans ces conditions, le rôle des parents s’apparente à un accompagnement à la scolarité. A ce niveau, citant une enquête, Annie Feyfant souligne que « 40% des parents ouvriers, donc non qualifiés, sont incompétents. C’est une fonction où les parents titulaires au moins du baccalauréat sont mieux lotis. Cet accompagnement est non seulement lié à l’usage des outils pédagogiques mais aussi au choix de l’école.