Le dimanche 31 août 2014, le professeur Mathurin Nago est allé parler aux siens à Bopa, en sa terre natale, et ce fut l’occasion pour lui, Président de l’Assemblée Nationale, de se livrer à des confidences publiques, dont voici un court extrait : ‘‘Nous avons l’obligation de réclamer la bonne gouvernance. Nous devons travailler dans la sincérité, dans le bien, dans la légalité et dans la vérité.’’
Les propos du Président Nago disent, en relief, que le Bénin est gouverné aujourd’hui sans repères et sans lois, dans le mal et dans le mensonge. Pour en avoir dit autant, le deuxième personnage de l’Etat doit en savoir beaucoup plus et peut donc nous en dire davantage si nous l’interrogeons notamment sur deux sujets qui nous tiennent à cœur au point de nous empêcher de dormir : il s’agit du traitement réservé aux délinquants économiques dans la haute administration de l’Etat et, plus grave, de l’espèce de je-m’en-foutisme de l’Etat dans certains dossiers de crimes de sang.
Au chapitre de la délinquance économique, nous aimerions qu’il nous dise pourquoi, sous le régime dit du Changement-Refondation, ceux qui volent l’Etat, c’est-à-dire l’argent du contribuable, subissent deux traitements différents.
S’ils appartiennent à la région Y, ils sont jetés en prison, d’où il ils sortent au bout de trois ans environ sans jugement et sans avoir nécessairement remboursé notre argent volé. S’ils appartiennent à la région X, ils obtiennent une nouvelle affectation, qui coïncide parfois avec une promotion, comme si leur forfait était une bonne action que l’Etat se doit d’encourager et d’imposer comme modèle de gestion de la chose publique. De toute façon, voleur emprisonné ou voleur promu, on s’en va, dans une impunité totale, avec notre argent volé. Au bas mot, nous sommes vexés. Si le Président Nago veut des noms, il les aura au chapitre suivant, chapitre crimes de sang.
Et à la place des noms qui vont suivre, nous le prions de mettre le nom de n’importe quel Béninois, y compris le sien, car ce qui est arrivé à nos compatriotes concernés peut arriver à chacun de nous à tout moment si l’Etat continue de faire le lit de l’impunité et de s’y vautrer pour des amours odieuses avec l’imposture et la forfaiture. Le Président Nago devrait pouvoir nous dire pourquoi le procès des assassins du juge Coovi bloque encore et toujours. Ce juge a été ligoté, empalé et brûlé dans sa voiture avec une cruauté inouïe. Ce crime va-t-il rester sans procès parce que pourrait y être impliqué un membre éminent du parti au pouvoir, député de surcroît ? Que peut nous dire le Président Nago de ceux qui ont enlevé et tué le fonctionnaire des Finances, Pierre-Urbain Dangnivo, de ceux qui ont assassiné froidement l’ancienne Ministre Bernadette Agbossou Sohoudji une nuit dans la région de Pahou, de ceux qui ont tenté d’assassiner Martin Assogba, président de l’ONG ALCRER, etc. ? Car ce ne sont là que les cas les plus tristement emblématiques. Pour le compte de quels commanditaires les différents exécutants de ses assassinats ont-ils agi ? Que sait le Président Nago de celui ou de ceux qui ont fait tuer des cultivateurs dans la région d’Adja-Ouêrê en leur faisant tirer dans le dos par les forces de l’ordre qu’ils fuyaient ? On fera observer, au passage, que toutes les ci-devant victimes de fusillade alignées sans apprêt appartiennent à la région Y. Mais ce doit être le hasard. En tout cas pas la Providence.
Un adage de chez nous dit que l’homme ressasse à l’infini et à la folie le souci qui le ronge et l’empêche de dormir. Et c’est donc la énième fois que nous rappelons les malheurs ci-dessus dans l’espoir que justice soit faite et que l’Etat en finisse avec le chapelet de crimes impunis. Le Bénin sombre en injustices et frustrations, et nous ne saurions le laisser sombrer. Le deuxième personnage de l’Etat a montré du courage le dimanche 31 août. Nous lui demandons d’aller, patriotiquement, plus loin. Président Nago, un effort encore !