Le rappeur du septentrion, Aristide Kperou qu’on connait sous le pseudonyme de BMG Yari a été rencontré dans la matinée d’hier, à son domicile où, à visage découvert, il a accepté faire un tour d’horizon sur sa vie et sa carrière. Fidèle à ces idéaux, l’artiste entend faire de la défense du peuple opprimé, son cheval de bataille.
A le voir, BMG Yari est un mince jeune homme au visage raffiné, au regard pénétrant et rigoureux. De teint noir, légèrement bronzé et au sourire accueillant, il était modestement vêtu d’un tee-shirt noir, manche longue à trois bandes sur les bras sur un pantalon jeans. Sur sa tête, du dreadlocks (coiffure rasta) finement tissé et soigneusement dressé vers l’arrière et aux pieds, des sandalettes. On lit en lui un homme discret, prudent et responsable. Ce qu’il a, lui-même, confirmé plus tard lors de l’entretien avec lui. « L’artiste doit être responsable. Il ne doit pas trainer avec toutes les petites filles du quartier en faisant la star. L’artiste c’est une pierre rare, c’est spirituel. Ce n’est pas que je suis un exemple parfait. J’étais aussi un artiste qui trainait dans les bars. Mais, aujourd’hui, j’ai compris beaucoup de choses», a-t-il déclaré. Lorsqu’il avait été donné au digne fils Bariba de dire, en tant que rappeur et connu comme tel, les raisons de l’option des dreadlocks, le fils de l’ingénieur agronome a fait comprendre que cette chevelure n’est pas que l’apanage des reggae mans. Ensuite, il s’est employé à attirer l’attention sur ce qu’il ne l’a pas fait dans l’optique de la petite délinquance. « Moi j’aime juste porter les cheveux touffus et ça n’a rien à voir avec la spiritualité ni avec les comportements hors normes. En plus, je ne l’ai pas fait pour fumer. D’ailleurs, je ne fume pas et je ne prends pas l’alcool non plus. C’est vrai que les gens ont déjà un regard accusateur vis-à-vis de ceux qui portent les dreadlocks. Je ne les condamne pas. Je trouve que c’est légitime parce qu’il y en a aussi qui font des choses peu recommandables. Mais, ce n’est pas le cas de tout le monde. En tout cas, ma famille l’accepte parce qu’elle ne m’a jamais vu dans des ghettos ni avec des menottes aux poings. Mes amis aussi l’acceptent et parfois moi-même j’oublie que j’ai des dreadlocks sur la tête», a-t-il expliqué avant d’avouer qu’il a été bien influencé par les rappeurs de la trempe d’Outencleen, BIG, Africabonbastik, pour ne citer que ces gloires du RAP et du mouvement hip-hop en général. Interrogé sur sa congrégation religieuse, Yari répond « je suis tout simplement un croyant. Le plus important, c’est qui tu es toi-même » avant d’affirmer quelques minutes plus tard qu’il a été baptisé selon l’église catholique. Mais, il a fini par lâcher : « je vais aujourd’hui dans une église qu’on appelle ‘’les messagers de Dieu’’ ». Au sujet de ce qui énerve vraiment de manière générale, il a fait remarquer que c’est le manque d’humilité et d’amour. Il faut comprendre que le rappeur a en horreur l’orgueil, l’égoïsme et la haine gratuite sous toutes ses formes. Quant à ce qu’il aime le plus dans sa vie, Aristide Kperou donne une réponse à laquelle on peut aisément s’attendre : « chanter, chanter et chanter », a-t-il insisté avant d’ajouter qu’il aime aussi l’ouverture d’esprit et les relations humaines.
Yari et sa carrière
Comme le début de carrière pour bon nombre d’artistes, celui de BMG Yari a été également secoué de quelques coups de tempête liés à la position et à la vision que ses parents ont de la chose artistique. « Le début n’a pas été du tout facile. « Vous comprenez qu’être le fils d’un homme qui a passé tout son temps à étudier, un ingénieur agronome, et vouloir entreprendre une telle carrière ne sera pas du tout aisé. C’est surtout mon père qui s’y est opposé, parce qu’il me voulait un grand intellectuel comme lui », a confié BMG avant d’ajouter : « Pourtant, je me cachais pour le faire. Je veux dire pour chanter, puisque cela me plaisait tant ». C’est alors, dans un terreau de discrétion totale, que la carrière d’Aristide a commencé avec la complicité de ses frères et sœurs. Ce début remontait, selon les propos de l’artiste, aux années 1993. C’est ainsi que, du chœur St Michel à l’orchestre Cool stars de Natitingou, où il s’est forgé au micro et au piano, en passant par Black city Boys, CDFet Taka Crew à Cotonou, Aristide Kperou a fait montre de son talent pour s’imposer aujourd’hui dans l’arène du hip-hop béninois. A son palmarès, le trophée du R§R Awards 2008, avec à son compteur six (06) albums dont Oya, sorti en 2002, Bienvenue au Bénin (2005), Dans ta zone (2006), Projet class (2007), Guerrier Bariba (2007) et Adiza qu’il dit avoir sorti de façon transitoire pour annoncer ‘’Africain qui t’a gbassé ?’’ qui est en cours de préparation. A la question, pourquoi pour un rappeur de la trempe de Yari, les trophées ne pullulent pas ? Il répond, sourire aux lèvres : « Mon prix, c’est le public. C’est ceux qui me voient et me décochent des salutations, c’est mon public qui remplit le Hall des arts, les stades et j’en oublie. Ça veut dire que ceux-ci ont le sens du mérite. Ils donnent de la valeur à ce que je fais. J’en suis plus fier qu’avec un trophée. Ce n’est pas que je n’aime pas les trophées, mais j’aime plus mon public». Lorsqu’il a été donné à Yari de dire pourquoi il a choisi de faire son rap dans les dialectes du Nord, l’artiste a répondu qu’à un moment de sa carrière, il a senti le besoin d’apporter quelque chose d’original histoire de se donner une identité, d’être plus proche des siens pour correspondre aussi aux réalités quotidiennes que vivent ses proches parents.
Yari, études et vie privée
Né de Pierre Kpérou et de Léocadie en 1977 à Tanguiéta (Nord Bénin), Yari a fait son cursus primaire à l’école-centre de Natitingou. Aujourd’hui, ancien élève du CEG Gbégamey, il a fréquenté jusqu’en terminale, sérieA2. La passion musicale ayant été plus forte, l’artiste a momentanément rompu avec l’école avant de se rattraper, plus tard, par un diplôme professionnel en administration de tourisme à l’école internationale de l’aviation. Il entend entreprendre un voyage pour poursuivre ses études. Marié à une femme blanche dont il a montré le portrait et a préféré dissimuler l’identité, BMG Yari dit avoir le projet d’avoir une descendance. « Mon Dieu n’est pas un Dieu stérile », a-t-il dit en guise d’une profession de foi. « Il faut que nous nous aimons », a martelé l’artiste pour clore l’entretien.