Nombreux sont-ils à courir les places publiques, nombreux sont-ils à remplir les marchés et nombreux sont-ils encore à prendre d’assaut les rues. Ces enfants qui rejoignent les rues sont souvent victimes soit de maltraitance familiale, soit de blessures psychologiques ou de rejet familial. Fort heureusement, des structures ne cessent de voir le jour pour se soucier de leur avenir et les prendre en charge pour un devenir plus meilleur. Votre journal Educ’Action est allé à la rencontre de Julie Fallon, responsable du programme Bénin « Citoyen Des Rues Internationales». Dans cet entretien, elle nous explique les activités qui gouvernent leur ONG. De la réinsertion familiale à l’ouverture d’un centre de formation, « Citoyen Des Rues Internationales » milite pour l’épanouissement social, psychologique et professionnel de ces laissés pour compte.
Edu’Action : Quelles sont les priorités de Citoyen des Rues Internationales ?
Julie Fallon : Les priorités de Citoyen des Rues Internationales est la réinsertion des enfants de rues. Donc nous avons un programme pour leur venir en aide avec un foyer d’accueil de jour à Gbégamey. Nous faisons des activités socio-éducatives avec eux dans l’objectif de pouvoir les réinsérer à temps dans leur famille. Et puis nous les mettons dans une formation professionnelle dans le domaine de leur choix pour leur permettre de trouver un travail par la suite. Nous prenons des enfants entre 14 et 18 ans qui vont en formation.
Comment est-ce que la réinsertion familiale se fait ?
Pour la réinsertion familiale, nous faisons des enquêtes. Nous avons une psychologue, Nicole Sakponou, directrice du Foyer Sonagnon, qui s’occupe du suivi des enfants qui fait beaucoup d’entretiens individuels et collectifs avec les enfants pour essayer de comprendre leur histoire, d’où ils viennent, qu’est-ce qui s’est passé, comment ils se sont retrouvés dans la rue et comment ils peuvent nous orienter vers leur famille, c’est-à-dire nous donner des informations qui nous permettent au moins de prendre contact avec leur famille et pour ensuite aller rencontrer la famille et les proches pour voir la personne la plus à même de reprendre l’enfant et s’occuper de l’enfant. Nous allons bientôt ouvrir un centre de formation à Glo pour ces enfants
Combien de domaines comptera le centre de formation de Glo ?
Il y aura la couture, la coiffure et la menuiserie. Trois maîtres artisans qui formeront les enfants dans ces trois domaines pour qu’ils puissent aussi à leur tour devenir ouvriers et par la suite ouvrir leur propre atelier et pouvoir faire la chaine de solidarité et ensuite eux-mêmes formeront les autres enfants des rues plus jeunes.
Pour quelle raison avez-vous choisi uniquement ces trois domaines pour les enfants ?
L’année dernière nous avons mis en place un projet d’appui à la formation. Nous avons placé 25 enfants auprès des maîtres artisans et qui ont leur atelier aux alentours du foyer. Les trois domaines les plus choisis par les enfants c’est la couture, la coiffure et la menuiserie. Donc chaque domaine a été choisi pour l’intérêt des enfants.
Est-ce que votre centre peut accueillir des enfants allant à l’école ?
Les enfants ne peuvent pas rester dans ce foyer et aller à l’école parce que le foyer que nous avons à Gbégamey-Cotonou est un centre d’accueil de jour. C’est un centre d’écoute.
Ces enfants que vous récupérez, comment arrivent-ils à se nourrir quotidiennement puisque vous n’avez qu’un centre d’écoute ?
L’année dernière nous avons fait un projet d’appui à la formation où nous avons placé des enfants auprès des maîtres artisans. Pour que les enfants puissent vivre leur formation il faut qu’ils n’aient pas besoin de travailler pour pouvoir manger. Donc nous leur avons donné de quoi s’acheter un petit-déjeuner le matin et puis le déjeuner ici au foyer. Ou bien nous leur envoyons à l’atelier le petit-déjeuner. Et puis le soir c’est le patron qui nourrissait les enfants. Donc ils sont en formation toute la journée et ils ne peuvent pas travailler pour gagner de l’argent. Au niveau du soutien financier, nous avons des fondations françaises qui nous soutiennent et qui permettent d’aider les enfants.
Es-ce que c’est uniquement des financements français que vous avez ?
Oui, c’est uniquement des financements français. Nous aimerions beaucoup pouvoir développer des financements béninois puisque l’association est béninoise et l’idée est que l’association devienne indépendante à la longue et devienne une partie de l’aide locale.
Comment pensez-vous soutenir les enfants dans l’idée de leur offrir un espace d’apprentissage ?
Nous avons obtenu un financement et pour obtenir des financements pour une association, il faut fournir des dossiers que nous présentons à des bailleurs et ces derniers décident de nous soutenir ou pas. Là nous avons obtenu de financement pour le lancement de ce projet.
Comment est-ce que les enfants seront suivis dans leur processus de formation ?
Il y aura trois maîtres artisans qui formeront les enfants dans chaque domaine - Couture, Coiffure et Menuiserie. Il y aura une équipe sur place du Citoyen des Rues Internationales, avec des éducateurs, un gardien et tout le personnel nécessaire au centre d’accueil pour enfants des rues et suivront chaque étape de la formation pour qu’ils respectent les horaires des enfants et pour qu’ils apprennent réellement les bases du métier et ainsi c’est à nous de décider quand ils auront fini leur formation quand ils seront capables de pouvoir se lancer dans la vie professionnelle. Et en parallèle de la formation, il y aura toujours un suivi psychologique des enfants autour des ateliers en fin de journée et le week-end pour toujours continuer le travail que nous aurions commencé ici au foyer Sonagnon.
Combien d’enfants seront logés pour débuter la formation à Glo ?
Il aura 25 à 30 enfants. Ce sera un centre mixte avec des filles et des garçons.
Par rapport aux réactions des enfants, qu’est-ce que vous en dites ?
Les enfants des rues sont des enfants qui ont été souvent victimes dans leur famille, quelque chose qui a fait qu’ils sont dans la rue. Et donc ils ont adopté un comportement de survie. Ils sont dans la survie car ils doivent savoir qu’est-ce qu’ils vont manger dans la journée, où ils vont passer la nuit. Donc ce sont des enfants un peu plus nerveux. Mais toutes les activités qu’on fait avec eux feront qu’ils trouveront une certaine concentration, un certain calme après quelques temps. Ils demeurent des enfants qui se bagarrent entre eux, se taquinent et s’apaisent. Après tout ce sont des enfants et les enfants de rues aiment jouer, rigoler etc. Alors le suivi psychologique leur permet de se reconcentrer sur l’essentiel.