Hier à la télévision nationale, Yayi Boni a fait une déclaration dangereuse pour la démocratie béninoise et pour son crédit personnel. Il a injurié publiquement l’intelligence des Béninois, tout entier. Sa déclaration d’hier, depuis Boko, est une insulte à la communauté internationale qui investit dans son pays et à la mémoire de ceux qui ont participé à la conférence nationale de 1990 et qui ne sont plus de ce monde. C’est plus que clair que Houngbédji a eu raison de faire les déclarations du dimanche passé.
« Je suis triste. Les élections coûtent chères au Bénin. 100 milliards pour les élections depuis 2006. La Cena demande 22 milliards ; Le Cos Lepi 8 milliards. Nous devons nous asseoir et parler. Chacun est libre de dire ce qu’il veut. Il ne sert à rien de menacer ou d’aller dire que Boni Yayi est ceci ou cela. Partout, on nous demande pourquoi on n’organise pas les élections et, j’ai honte. C’est pas la démocratie dont le peuple Béninois a rêvé ». Comment le Chef de l’Etat peut-il oser se plaindre de ce que les élections coûtent chères pour le pays et qu’il faudra s’asseoir pour réfléchir ? En dehors de ceux cités plus haut, le chef de l’Etat a aussi argué la qualité des membres de la Céna et du Cos-Lépi. D’abord, il a dit qu’il faut une vingtaine de milliards de Fcfa pour que corriger la lépi et organiser les élections et que l’état actuel de la trésorerie nationale ne le permettrait pas. Ensuite, il a proposé une assise pour voir si la Céna et le Cos-Lépi ne sont pas en train de faire des doublons dans leurs dépenses. Dire que les moyens pour organiser les élections seraient difficiles à mobiliser est une erreur grave. Ce n’est pas hier que le président de la République et son gouvernement ont su qu’il doit avoir élection en 2014, au plus tard. Et dans le budget de l’Etat, des prévisions devraient être faites. Pour ce qui est du Cos-lépi, les activités étaient bel et bien en cours avant l’élaboration du budget général de l’Etat, exercice 2014. Le Cos-Lépi avait déjà exprimé ses besoins et cela devrait avoir été intégré au budget. Dire aussi qu’il faut s’asseoir pour voir si n’y a pas de doublons au niveau de Cos-Lépi et la Céna est une méconnaissance de la qualité de ceux qui sont responsables de ces institutions. Les deux structures connaissent leur rôle et savent ce qu’elles ont à faire. La Céna a quel intérêt à proposer les mêmes tâches que le Cos-Lépi ? C’est qui le président de la Céna et, c’est qui le président du Cos-lépi ? Ils sont tous deux des partisans du régime actuel et n’ont aucun intérêt à gruger le gouvernement de leur leader. Mieux, ces institutions comportent des cadres. Au ministère des finances, il y a également des cadres qualifiés pour faire ce travail avant que les budgets de ces structures ne soient adoptés.
Et quand Yayi Boni estime qu’il faut s’asseoir, il confirme sa volonté de bloquer le processus électoral de cette année. Sinon, ce n’est pas à trois mois de la fin de l’année qu’il va évoquer une pareille assise. Il était où ? Depuis le début de l’année, aucune dépense imprévue ne lui a été imposée, ni par le peuple, ni par les travailleurs en particulier. Ce qui est remboursé aux syndicalistes est une dette, supposée budgétisée. Les travaux de correction de la Lépi et ceux de l’organisation des élections devraient être aussi programmés. Son étonnement d’hier soir confirme « l’indiscipline budgétaire » dont avait parlé Rachidi Gbadamassi, il ya quelques années à l’Assemblée nationale.
Ces propos ne sont pas les bienvenus et discréditent le Bénin auprès de la communauté internationale. Les partenaires techniques et financiers vont s’étonner des raisonnements aussi bancals d’un chef d’Etat. Yayi Boni a confirmé son fonctionnement à l’improviste.
Félicien Fangnon
Extrait de la déclaration de Yayi
« Nous avons encore des difficultés à bouger. Et ces difficultés, je termine, en disant, sans ennuyer personne, parce que cela me préoccupe énormément. D’abord, la question de la qualité des institutions de la république. Quand il n’y aura pas des hommes de qualité, mus par l’intérêt général. Et ces institutions doivent être complices. La complicité pour servir l’intérêt général. C’est de cela qu’il s’agit et c’est important>
La justice doit être au rendez-vous, si nous voulons mettre un terme à l’impunité. C’est la justice qui peut dans un État de droit, mettre fin à l’impunité. Ce n’est pas le Président de la république. C’est vrai, le Président de la République avec son administration peut mettre fin et prendre des sanctions disciplinaires. Nous en avons pris bon nombre déjà. Mettre fin à l’impunité est indispensable. Ce n’est pas négociable. Et nous avons besoin de la justice pour le faire. Et aussi, pour mettre fin à la corruption parce que si l’impunité s’installe, la corruption est généralisée et c’est le cas que nous vivons aujourd’hui. Mais, ce n’est pas l’affaire de Yayi Boni seul. Cela peut être l’affaire de quelqu’un d’autre. Et on traite Yayi Boni de corrompu. Alors que ce que l’on fait chez soi à la maison la nuit est plus grave. C’est une question qui interpelle toute la République et toute la nation. C’est une démission collective. Que la classe politique soit consciente de cela. Moi je suis conscient qu’il faut tout rebâtir parce que cette démocratie n’est pas belle. Ceci est très important. L’autre volet et je termine par cela. Une démocratie doit nous permettre d’organiser les élections à bonne date. Mes chers compatriotes ! Vous me direz, quel est le lien entre l’électricité et la démocratie. Cela se tient. Parce que s’il n’y a pas la stabilité, il ne peut pas avoir de prospérité. Nous sommes encore en difficulté pour organiser nos élections. Les élections coûtent chères dans notre pays. Elles coûtent excessivement chères. Tenez. Depuis 2006, moi je suis venu aux affaires. Nous avons dépensé plus de 100 milliards pour organiser les élections. 100 milliards, mes chers compatriotes. Je demande à la presse de relayer cela. J’aurai l’occasion de me prononcer là-dessus. Chacun est libre de raconter ce qu’il veut. C’est triste. Je suis triste pour mon pays. Triste. Lorsque l’Occident a fait avec le parlement cette histoire de Lépi. Ceci nous a permis, vous le savez bien, d’organiser les présidentielles. 45 milliards pour la Lépi. Et on m’a dit après la Lépi, vos élections ne couteront plus chères. Très bien. Nous assistons à quoi aujourd’hui ? La situation est dramatique. Aujourd’hui, il nous faut encore 22 milliards. Dans une situation où la trésorerie de la puissance publique ne se porte pas bien. Parce que, pour des raisons de conjoncture nationale, régionale et mondiale. Nous avons par exemple notre voisin, puisque j’avais écouté les douaniers qui ont dit que le voisin du Nigéria a presque tout libéralisé. Tout ce qui se faisait dans notre pays a été délocalisé. Aujourd’hui, celui qui veut faire son commerce de riz peut aller s’installer au Nigeria pour faire son commerce. On ne peut pas construire une économie comme cela. Nous sommes aujourd’hui exposés à ces aléas. C’est pourquoi nous devrons prendre tout en compte. Quand je dis 22 milliards, c’est-à-dire, le financement du Cos-Lépi et celui de la Cena. C’est un minimum de 20 milliards. On me dit que Cos-Lépi a déjà encaissé entre 6 et 5 milliards. La Cena demande aujourd’hui 8 milliards et quelques. Ceci demande d’autres ajustements au moment où nous sommes appelés à relever d’autres défis. Les Partenaires sociaux disent qu’il faut un relèvement de la valeur indiciaire avec une incidence financière de pas moins de 32 milliards. Si nous devrons intégrer les désirs exprimés dans nos communes en terme de sécurité humaine ect., Lorsqu’on est responsable, il faut s’asseoir et mener le dialogue. Je salue ce qui a été fait pour nous fournir un support pour qu’une élection paisible et transparente soit garantie. Cela est clair et net. Mais, il faut comprendre aussi l’Exécutif, qui dit aujourd’hui que les temps sont difficiles. Asseyons-nous. Qu’on soit Cena, qu’on soit Cos-lépi, asseyez-vous et discutez avec le ministère des Finances et voir s’il n’y a pas de doublons. Parce qu’aujourd’hui, c’est clair. Qu’est-ce que Cos Lépi fait, qu’est-ce que la Cena fait de manière à libérer le contribuable ? Mais on dit que si vous ne donnez pas les 20 ou 22 milliards, nous irons crier sur tous les toits que Yayi Boni ne veut pas les élections. C’est trop facile. Je gagnerai quoi alors ? Parce que partout où je passe, on dit pourquoi je n’organise pas les élections. Je lance un appel au dialogue aux acteurs. J’accepte qu’on s’asseye. Qu’est ce que nous pouvons faire, vu l’état actuel de notre trésorerie ? Qu’on nous envoie un audit international pour voir si ce qu’on nous demande là, on peut y faire face sans compromettre nos engagements internationaux, par rapport aux partenaires sociaux, à la société civile, aux handicapés, la décentralisation etc. Les sollicitations sont nombreuses. Il faut que chacun soit conscient que nos élections coûtent chères et qu’il faut qu’on s’asseye pour prendre conscience de la gravité de la situation. Les attaques personnelles ne servent à rien. Il s’agit de l’avenir de notre pays. Il s’agit de relever le défi. Il ne s’agit pas de plonger le pays dans la boue. Voilà en fait ce que je tenais à vous dire. Je suis convaincu que tous ces défis seront relevés et je lance un appel à la nation que ce dialogue sera établi. Il faut éviter de faire les attaques personnelles, des injures vis-à-vis de nos institutions de la République. Je pense qu’on va vider de son contenu cette démocratie que nous appelons de tous nos vœux. Que Dieu bénisse notre patrie. Amen !