Houdou Ali, secrétaire général et porte-parole de la Fondation Mathieu Kérékou Paix et Développement ne cache pas ses inquiétudes face à l’actualité socio-politique du Bénin davantage marquée pas des crises à n’en plus finir. Il se dit surtout préoccupé par les incertitudes exprimées çà et là sur l’organisation des élections prochaines, appelant les uns et les autres à ne pas détruire ce que le Général Mathieu Kérékou a construit.
L’Evènement Précis : Comment se porte le général Mathieu Kérékou. On ne le sent plus du tout sur la scène politique nationale ?
HOUDOU Ali : A 81 ans d’âge, l’homme a déjà atteint physiquement un état qui ne lui permet plus de faire ce qu’il faisait, il y a quarante ans. Mais à travers quand même son testament politique que nous avons au niveau de la Fondation Mathieu Kérékou, il se préoccupe bien de la paix au Bénin.
Est-ce qu’il suit toujours l’actualité nationale ?
Ah, je crois que c’est son sport favori. Comme il ne sort plus, il est aujourd’hui beaucoup plus attaché à la télé et autres supports de médias pour s’informer des nouvelles de son pays.
Est-ce qu’il vous fait des confidences sur l’évolution de cette actualité ? A-t-il des regrets et des inquiétudes ?
Ses inquiétudes se résument dans son testament politique. Et le point 9 de ce testament parle justement d’un séminaire national sur une transition politique afin de régler les fondamentaux du contrat social qui doit permettre d’instaurer définitivement un gouvernement apaisé dans le pays.
Comment avez-vous apprécié la récente déclaration du président de l’Assemblée nationale, Mathurin Nago qui n’a pas manqué de critiquer la gouvernance sous Boni Yayi ?
Comme on le dit, mieux vaut tard que jamais. Il est juste qu’à un moment donné, on puisse se démarquer d’une situation de plus en plus inquiétante. Et je ne pense pas qu’il ait trahi quelqu’un. On doit oser poser les problèmes comme il l’a fait et chercher à les résoudre de manière constructive. J’appelle en tout cas tout le peuple béninois et plus particulièrement sa classe politique à préserver les idéaux pour lesquels le Général a consacré près de trente ans de sa carrière politique, à savoir, la paix, l’unité et le développement. Nous ne devons pas faire mal au général Kérékou en détruisant ce qu’il a construit.
Vous avez récemment pris part à un forum sur le régionalisme organisé par d’anciens ministres et députés ainsi que d’autres personnalités. Quelle est, selon vous, l’importance d’une telle rencontre dans le contexte politico-social actuel ?
Il faut avouer que depuis la fin de la conférence nationale des forces vives de la nation et le début du renouveau démocratique, malheureusement, le repli à la région et à la tribu devient de plus en plus la seule forme d’accession au pouvoir. Et comme tout le monde ne peut pas être au pouvoir en même temps, cela crée des frustrations. Un tel forum est donc le bienvenu et est d’actualité en ces moments de crise politique aigue. Il est très important aux animateurs de la vie publique nationale de s’interroger sur le développement de ce phénomène.
Le monde politique béninois n’est pas très étranger à l’exacerbation du régionalisme. Ne peut-on pas dire aujourd’hui que les politiciens sont les vrais responsables de l’ampleur que prend ce phénomène ?
Quand on voit, en dehors des joutes électorales, les populations vivent en parfaite harmonie entre elles, la conclusion première qu’on tire est que ce sont donc les animateurs de la vie politique qui sont à la base de l’exacerbation de ce fléau qui est le régionalisme, ou encore le tribalisme. Il s’agit maintenant au niveau des intellectuels que nous sommes de comprendre que le régionalisme ne nous amène nulle part de bon. Vous voyez, vous-mêmes, ce qui se passe aujourd’hui dans certains pays de la sous-région.
La préparation des prochaines élections connait davantage des difficultés, surtout pour le cas de la correction de la Lépi. Comment appréciez-vous cette situation ?
Je pense qu’il est juste de reconnaitre qu’il y a péril en la demeure. Et si nous ne prenons garde, on risque d’hypothéquer les grands acquis de la conférence nationale de 1990. Nous devons apprendre davantage à parler d’une même voix pour éviter le pire à notre pays.
Vous êtes le secrétaire général de la Fondation Mathieu Kérékou, portant ainsi l’illustre nom d’un homme de paix. Quelle démarche avez-vous déjà faite dans le cadre des préparatifs des prochaines élections, notamment, en ce qui concerne la Lépi ?
Je crois que les problèmes à l’étape actuelle se posent surtout entre le législatif et l’exécutif. Ils assument donc de façon collégiale, toute la responsabilité de la situation qui prévaut. Mais, je pense qu’avec les cris d’alarme qui s’expriment çà et là, ils vont prendre leur responsabilité pour que le pire soit évité. Sinon, au niveau de la Fondation, nous avons estimé qu’il faut un séminaire national sur la transition politique. Ce qui nous permettra de régler des problèmes liés, entre autres, à une administration républicaine, une éducation au service du développement, etc. Il y a des grands problèmes que la conférence nationale n’a pas pu résoudre. Il nous faut donc ces nouvelles assises pour arriver à un consensus afin que ceux qui pourront avoir le pouvoir en 2016 sachent vraiment que ce sont des priorités de la nation.
Vous parlez de présidentielle de 2016. Mais beaucoup de gens craignent qu’elle ne soit pas organisée à la date fixée, face à l’imbroglio qu’on observe à moins d’un an et demi dans le processus devant y conduire ?
Je pense qu’on trouvera peut-être comme c’est le cas souvent au Bénin, une solution au dernier moment. Imaginer qu’en 2016, les engagements constitutionnels ne soient pas honorés. Et ce serait vraiment une catastrophe pour notre pays. Comme le disent souvent les uns et les autres, notre or blanc, c’est la démocratie, la paix et l’Etat de droit.