Il a fini sa course en prison. Depuis hier 1er octobre 2014, le maire de la commune d’Adja-Ouèrè n’est plus libre de ses mouvements. Il séjourne à la prison civile de Porto-Novo après avoir écouté par le Procureur de la République près le Tribunal de première instance de Pobè. Selon les informations qui nous son parvenues le chef du service des affaires domaniales de la commune d’Adja-Ouèrè a été aussi mis sous mandat de dépôt en même temps que le maire Djiman Fachola. Le maire de la commune de Sakété, M. Raliou Akanda Arinloyé à qui rien n’est reproché a été par contre mis en liberté. C’est du moins ce que révèlent des sources judiciaires.
Le dossier pour lequel le maire Djiman Fachola et son Chef du service des affaires domaniales croupissent en prison depuis hier 1er octobre 2014 n’est nullement lié à un quelconque règlement de compte politique. Il s’agit plutôt d’une affaire domaniale qui les met aux prises avec l’homme d’affaires béninois Séfou Fagbohoun. Ceux qui ont pris connaissance du dossier et ont voulu le commenter parlent même d’un véritable gangstérisme d’Etat. Plusieurs années après avoir vendu des terres à Séfou Fagbohoun, Djiman Fachola ne semble plus reconnaitre ses signatures. Et pourtant, tout semble l’accabler.
La fourberie porte sur plusieurs dossiers. Le premier qu’il nous plait de vous livrer après nos investigations concerne la ferme de Gbahouété créée le 7 avril 1976 par quatre sociétés d’Etat, à savoir : L’AGB, la Sotracob, l’Asecna-Bénin et la Loterie nationale du Bénin.
Dans une correspondance adressée au Sous-préfet d’Adja-Ouèrè le 17 août 1990, les propriétaires terriens de cette ferme (Complexe agro-industriel Amilcar Cabral de Gbahouété) ont sollicité le concours de l’autorité sous-préfectorale pour réveiller cette ferme. Le 25 février 2002, M. Raliou Arinloyé, alors Sous-préfet d’Adja-Ouèrè, par lettre N°IA9/SG-BAE-C a saisi le Préfet des départements de l’Ouémé-Plateau pour lui faire part de cette situation préoccupante. Dans sa lettre, l’ex-Sous-préfet d’Adja-Ouèrè, Raliou Arinloyé a suggéré au Préfet de bien vouloir intercéder auprès des autorités gouvernementales compétentes dans le sens de faciliter la cession des deux ex-fermes d’Etat créées à Adja-Ouèrè au nombre desquelles se trouve la ferme Amilcar Cabral de Gbahouété. Le 15 mars 2002, l’ex Sous-préfet d’Adja-Ouèrè, M. Raliou Arinloyé a encore envoyée une correspondance au Préfet des départements de l’Ouémé et du Plateau par laquelle il l’informe des diligences qui ont été faites de concert avec ses collaborateurs, les sages et notables d’Adja-Ouèrè, l’Association de développement, le Conseil consultatif pour procéder à la vente des deux fermes d’Adja-Ouèrè pour régler les problèmes relatifs au manque d’infrastructures sociocommunautaires dans sa sous-préfecture.
Après plusieurs séances de travail tenues avec ses collaborateurs, séances de travail sanctionnées par des procès verbaux, l’ex Sous-préfet d’Adja-Ouèrè, M. Raliou Arinloyé a adressé le 16 mai 2002 au préfet des départements de l’Ouémé et du Plateau une correspondance dans laquelle il faisait à l’autorité départementale le point des démarches menées dans le cadre de la cession des fermes. « La première des deux fermes, celle de Gbahouété, d’une superficie totale de deux cent vingt sept hectares dix neuf ares quarante neuf centiares (227 ha 19 a 40 ca) a été livrée à l’acquéreur à cent cinquante mille francs Cfa l’hectare (150.000 F). Le montant total ainsi encaissé s’élève à trente quatre millions deux cent mille francs (34.200.000 F) CFA. Photocopie du chèque et une copie du contrat de vente se trouve ci-joint », a expliqué le Sous-préfet Raliou Arinloyé au Préfet. Il a par ailleurs ajouté que la gestion des fonds issus de cette transaction sera confiée à un comité comprenant quatre représentants de l’administration, trois notables, deux membres de l’Association de développement d’Adja-Ouèrè, une représentante des femmes et le Maire de la commune urbaine d’Adja-Ouèrè.
Par ailleurs, il poursuit dans sa correspondance qu’il sera déduit desdits fonds la somme de Onze millions quatre cent mille franc (11.400.000 F) Cfa pour le dédommagement des ex-présumés propriétaires terriens à raison de 50.000 F Cfa l’hectare. Remarquons tout simplement que sur 150.000 F Cfa, c’est 50.000 F Cfa qu’on a décidé de rétrocéder aux ex-présumés propriétaires terriens dont certains empêchent aujourd’hui le Président Séfou Fagbohoun de jouir de son bien foncier.
Djiman Fachola entre dans la danse et se noie
Entre temps, M. Raliou Arinloyé a passé la main à son successeur Djiman Fachola dans ce dossier. Devenu maire de la commune d’Adja-Ouèrè après les élections communales de 2003, M. Djiman Fachola a le 8 avril 2003 adressée une lettre confidentielle au Préfet du Département de l’Ouémé pour lui rendre compte des diligences qui ont été faites par l’acquéreur de la ferme de Gbahouété. Les documents qui ont accompagnés sa lettre ont expliqué dans les moindres détails le processus ayant abouti à la cession de ladite ferme sur laquelle l’acquéreur a déjà entamé des travaux de réhabilitation de plus de 70 hectares de jeunes plants de palmier sélectionnés et la réfection des anciens bâtiments du site ainsi que l’ouverture des voies.
Poursuivant son compte rendu, le maire Fachola a signifié à sa hiérarchie que les fonds issus de cette opération de cession de la ferme de Gbahouété ont servi en partie au dédommagement des ex-présumés propriétaires terriens du milieu. Une autre partie, a-t-il dit, a servi à débuter le lotissement d’Adja-Ouèrè jusqu’à concurrence de 17 millions de F Cfa. Il s’agit, a précisé, le maire Fachola d’un prêt dont le remboursement interviendra dès que les propriétaires et acquéreurs de parcelles de la zone en chantier libèreront les frais de lotissement…
Des documents qui confirment les droits de propriétés de Fagbohoun
Fidèles à ses habitudes et ne voulant pas avoir de problème, l’homme d’affaires béninois Séfou Fagbohoun qui a versé 34.200.000 de F Cfa pour acquérir cette ferme de Gbahouété, s’est entouré de toutes les garanties. Le 2 mai 2002, il a obtenu de l’ex Sous-préfet Raliou Arinloyé un certificat de non litige. Il porte le numéro 1A/010/SG-BAD (voir DOC 1-Page 9). Ce certificat de non-litige est appuyé par un contrat de cession d’immeuble sis à Gbahouété. Il est signé de Séfou Fagbohoun (l’acheteur) et de Raliou Arinloyé (le vendeur). Plusieurs autres signatures, notamment celles des représentants des propriétaires terriens, de l’Association de développement, des notables et sages de la localité (voir DOC 2-Page9). Toutes ces personnes qui ont agi en qualité de témoin semblent nier aujourd’hui leurs signatures et s’illustrent dans des actes de vandalisme sur le périmètre de l’ex-ferme Amilcar Cabral de Gbahouété régulièrement acquise et réhabilitée par Séfou Fagbohoun.
L’an 2002 et le vendredi 3 mai, sur sa demande, l’ex Sous-préfet Raliou Arinloyé délivre à Séfou Fagbohoun un certificat administratif de constatation des droits fonciers coutumiers (voir DOC 3- Page10).
Avec tous ces documents en poche, Séfou Fagbohoun engage alors la procédure d’immatriculation de sa propriété au livre foncier de la circonscription foncière d’Adja-Ouèrè. L’opération lui a coûté un peu moins de cinq millions de F Cfa (voir DOC 4-Page10). La copie du titre foncier qui lui a été délivré porte le N°5 (voir DOC 5-pages 10,11). Fagbohoun n’a donc pas fait du faux au regard de ces documents. Au contraire, il a été dupé.
Fachola risque gros
Après avoir accompli toutes ces formalités, l’homme d’affaires béninois Séfou Fagbohoun est aujourd’hui empêché de jouir de son bien. Des individus soutenus par on ne sait qui sont allés chasser ses employés de la ferme de Gbahouété et l’exploitent sans crier gare. Ils se disent propriétaires terriens. Cela amène à se demander si les fonds qui ont été prévus pour les dédommager leur ont été effectivement versés. La question mérite en tout cas d’être posée vu le comportement adopté par le maire Djiman Fachola devant le Procureur de la République près le Tribunal de première instance de Pobè. Le maire Fachola semble ne pas reconnaitre ses signatures. Plus grave, il ne se reconnait pas à travers les relevés bancaires qui lui ont été présentés. Plus grave encore, il peine à justifier les dépenses qu’il a effectuées sur les 34.200.000 de F Cfa que l’homme d’affaires béninois Séfou Fagbohoun a régulièrement versés.
Selon des indiscrétions, il risque gros puisque ce n’est pas sur ce cas seul qu’il a grugé Séfou Fagbohoun. Djiman Fachola a réussi à vendre à Fagbohoun une palmeraie appartenant à son feu-père sans qu’il ne s’en rende compte. Le comble aujourd’hui est que le même domaine est morcelé et revendu à des individus. Ce qui confirme le gangstérisme d’Etat dont parlent certains analystes.
Dans nos prochaines parutions, on parlera, documents à l’appui de la seconde ferme de Houély Gaba achetée régulièrement par Séfou Fagbohoun et qu’on tente aussi de lui arracher et de plusieurs autres affaires foncières dans lesquelles le maire Fachola a abusé de la bonté de Séfou Fagbohoun. Affaire à suivre donc !
Pourquoi Raliou a été libéré
M. Raliou Arinloyé, actuellement maire de la commune de Sakété et ex Sous-préfet d’Adja-Ouèrè à l’époque des faits peut rendre grâce au Tout-Puissant Allah et aux mannes de ses ancêtres. Il est en effet libre de ses mouvements. Après plusieurs jours de confrontations, le Procureur de la République près le Tribunal de première instance de Pobè n’a pas jugé bon de le mettre sous mandat de dépôt comme c’est le cas de son collègue Djiman Fachola. Mais pourquoi ? La question mérite d’être posée. Lorsqu’on regarde le dossier, Raliou Arinloyé a fait les choses comme il se doit avant de passer la main à son successeur qui aurait fait de l’argent des contribuables d’Adja-Ouèrè ce qu’il veut.
La preuve est que devant le Procureur, le maire Fachola n’a pas pu justifier les nombreux comptes qu’il a ouverts en son propre nom et les dépenses qu’il a effectuées avec l’argent issu de la vente de la ferme de Gbahouété, entre autres. Il est donc normal qu’il en réponde ! La mise en liberté du maire Raliou est du pouvoir discrétionnaire du Procureur. Mais bien qu’il soit libre de ses mouvements, le maire Raliou Arinloyé devra toutefois répondre à l’appel de la justice le 21 octobre prochain. C’est du moins ce qu’indiquent des sources judiciaires. Cette affaire est loin de connaitre son épilogue.
Affissou Anonrin