Niamey - Niamey accueille mardi un sommet régional consacré à la lutte contre le groupe islamiste armé Boko Haram, dont la nette montée en puissance constitue une grave facteur d’instabilité pour les voisins du Nigeria, dont le Niger.
Fin septembre lors de l’Assemblée générale de l’ONU, le président nigérien Mahamadou Issoufou avait appelé à "plus d’efforts et de coopération", "tant au niveau régional qu’international" afin de faire face à cette menace.
"C’est dans cette perspective que les chefs d’Etat et de gouvernement du Cameroun, du Niger, du Nigeria, du Tchad et du Bénin se réuniront à Niamey le 7 octobre", avait-il annoncé.
La présence des présidents Goodluck Jonathan (Nigeria), Idriss Déby (Tchad) et Thomas Boni Yayi (Bénin) a été confirmée par leurs services de communication respectifs, contrairement à celle de Paul Biya (Cameroun), dont le pays, frontalier du Nigeria et des zones d’action de Boko Haram, est pourtant le premier concerné par la montée en puissance du groupe islamiste.
Le programme des discussions et des éventuelles décisions n’a pas été communiqué.
Cette réunion se déroule alors que rien ne semble pouvoir endiguer la montée en puissance de Boko Haram dans le nord-est du Nigeria, où le groupe menace désormais de s’emparer de la capitale de l’Etat de Borno, Maiduguri, un carrefour régional de près d’un million d’habitants.
Les combattants islamistes ont également pris le contrôle ces derniers mois de plusieurs localités frontalières de l’extrême-nord du Cameroun voisin, où ils multiplient les incursions malgré le déploiement de troupes d’élite de l’armée camerounaise.
Lundi, au moins huit personnes ont été tuées dans une localité de cette région camerounaise de l’Extrême-Nord au cours d’une attaque à la roquette attribuée au groupe islamiste, selon des sources de sécurité locales.
-’Invasion des forces du mal’-
Niger, Nigeria, Cameroun et Tchad se réunissent régulièrement depuis le sommet de Paris en mai, pour tenter de coordonner la lutte contre Boko Haram, qui contrôle des pans entiers de territoires du nord-est du Nigeria. La dernière réunion de ce genre, au niveau ministériel, s’était tenue au Nigeria début septembre.
Ces échanges se tiennent dans le cadre de la Commission du bassin du lac Tchad, une organisation régionale dont la réactivation avait été décidée à Paris.
Le Bénin -- voisin du Niger et du Nigeria -- a été invité à participer.
"Notre espace est envahi par les forces du mal", a lancé Karidjo Mahamadou, ministre nigérien de la Défense lundi après-midi devant ses homologues nigérian, camerounais, tchadien et béninois.
"Dans la cohésion et la solidarité, nous devons regarder dans la même direction le danger qui menace notre environnement et y faire face (...)", a-t-il poursuivi, regrettant l’avancée "alarmante" de "l’ennemi commun" du fait d’"insuffisances organisationnelles".
Le Nigeria demande régulièrement à ses voisins de mieux sécuriser leurs frontières communes, afin d’éviter que les combattants de Boko Haram puissent s’y réfugier ou importer des armes.
Selon des observateurs cependant, c’est plutôt la très lente mobilisation des autorités nigérianes qui a favorisé l’expansion du groupe jihadiste.
Une partie des armes et munitions dont dispose Boko Haram a été pillée lors d’attaques contre l’armée nigériane, quand des militaires ne les ont pas eux-mêmes revendues aux islamistes.
Plus de 10.000 personnes, majoritairement des civils, ont été tuées dans les attaques de Boko Haram et leur répression féroces par les forces de sécurité nigérianes. Le conflit a également fait fuir plus de 700.000 personnes, dont 100.000 dans l’est du Niger, une zone aride en crise
alimentaire récurrente.
"Les souffrances des populations riveraines du lac Tchad nous interpellent et nous commandent d’agir", a souligné Karidjo Mahamadou.
Des milliers de Nigérians craignant les exactions de Boko Haram se sont également réfugiés dans l’extrême-nord du Cameroun, alors que plusieurs milliers de Camerounais des villages frontaliers ont fui vers l’intérieur du pays.
Boko Haram "fait montre d’une agressivité et d’une barbarie jamais observées auparavant", s’était alarmé le président Issoufou devant les Nations unies.
La dernière vidéo du groupe islamiste, diffusée jeudi dernier, témoigne une nouvelle fois de cette folie meurtrière. Donné pour mort par l’armée nigériane, le chef de Boko Haram, Abubakar Shekau, y est réapparu, vantant, décapitation, lapidation et amputation à l’appui, l’application de la charia dans son "califat islamique" du nord-est du Nigeria.
Lundi, selon des témoins, des combattants du groupe islamiste ont égorgé sept villageois "comme des moutons" dans cette même région.
Mi-septembre, l’évêque catholique Oliver Dashe, basé dans le nord-est du Nigeria, avait déploré la prise de contrôle d’au moins 25 villes de cette région par les islamistes armés.