Nous n’allons pas publier des chiffres de peur d’effrayer les investisseurs étrangers qui veulent poser leurs valises au Bénin. Mais il faut le reconnaître, le taux de criminalité affole les compteurs comme si on était dans les grandes mégalopoles que sont New-York, Shanghaï, Paris…De décembre 2006 à ce jour, Cotonou, capitale économique du Bénin a été le théâtre de plusieurs braquages sanglants. Les autres villes à savoir Parakou, Porto-Novo, Djougou, Natitingou, Malanville, Tchaourou n’ont pas été épargnées. Les hors-la-loi ont frappé partout. Et ceci, de façon sanglante.
La première étincelle a été donnée le 06 décembre 2006. Le plus retentissant braquage sous l’ère Yayi a eu lieu. Une voiture de la société Sagam a été attaquée non loin de la Présidence du Benin. Bilan, plusieurs millions de F Cfa (174.000.000 FCFA, selon des sources crédibles) ont été emportés. Au gouvernail de la sécurité publique, il y avait un certain Edgar Alia. Deux ans après, rien n’a changé. C’est la récidive. Le 1er avril 2008 en effet, les braqueurs ont attaqué les agences de Diamond Bank et Ecobank installées en plein cœur du marché international de Dantokpa. Le bilan est assez lourd : deux militaires (Fiacre Hossou et Eric Yao) ont été abattus. Ce fut l’époque où Armand Zinzindohoué assurait les fonctions de ministre de l’intérieur et de la sécurité. Face à la cruauté de l’acte, il n’avait rien à trouver à dire : « les braqueurs étaient venus testés notre dispositif sécuritaire ». Quelques mois après ce supposé test, c’est-à-dire le vendredi 21 Novembre 2008, les mêmes banques de Dantokpa ont été attaquées. Bilan : 07 morts et des dizaines de millions de F Cfa emportés devant l’impuissance du Général Félix Hèssou, ministre de l’intérieur et de la sécurité. Un peu comme pour changer d’air, les braqueurs font parler la poudre le 19 octobre 2011 à la Recette Perception d’Abomey. Plus de 750.000.000 FCFA ont été emportés dans un scénario qui ressemble de fort belle manière à celui des films que nous projette Canal +. Le 21 août 2013, retour du grand banditisme à Cotonou. Une dame a été braquée à Cadjèhoun non loin du domicile du Chef de l’Etat. Quelques jours avant ce 21 août 2013, plus précisément vers la fin du mois de juillet 2013, les braqueurs ont attaqué le Quartier général des cambistes. Ils ont réussi à disparaître avec beaucoup de millions de F Cfa, laissant derrière eux un corps sans vie. Les policiers présents à ce carrefour du Naïra au moment des faits ont eu la vie sauve en se barricadant derrière des tables de fortunes. Malheureusement, M. Sergio Dènon, jeune policier qui est au début de sa carrière n’aura pas la même chance que ses collègues de Porto-Novo. Le 12 mai 2014, il sera abattu par les malfrats armés jusqu’aux dents venus dévaliser l’Agence Clcam de Mènontin. Un mois plus tard, soit le 10 juin: Kpadonou Roland, un autre policier sera abattu par des malfrats qui ont fini d’opérer dans les environs de Ganhi alors qu’il ne faisait que réguler la circulation. Le carnage du 14 octobre dernier à Jéricho s’ajoute à cette liste macabre de crimes crapuleux commis par les malfrats dans notre pays. Trois policiers ont péri même si la hiérarchie policière avait dans un premier temps affirmé le contraire. Ce n’est pas que dans les rangs des subalternes qu’on dénombre des morts. Vous vous souvenez de cette attaque de Kpédékpo où un cortège de gradés de la police nationale et de l’armée ont été touchés. Le Commissaire Hounnonkpè, fraichement promu à l’époque Directeur général adjoint de la police nationale en garde le souvenir. Cette liste de crimes n’est pas exhaustive. Les coupures de route et autres actes crapuleux non portés à la connaissance de l’opinion publique endeuillent et continuent d’endeuiller les paisibles populations béninoises.
Inflation décisionnelle et autres
Le ver est dans le fruit. Pour certains observateurs, plusieurs raisons expliquent cette situation lugubre dans laquelle le Bénin s’est installé depuis 2006. A part celles qui sont liées à la formation des agents et à leur sous-équipement évoquées la semaine dernière par mon confrère Charles Toko du Matinal, il y a l’inflation de ministres à la tête du stratégique département de l’intérieur et de la sécurité. De 2006 à ce jour en effet, on en a dénombré sept et presque autant à la tête de la Direction générale de la police nationale. A part le Général Félix Hèssou qui est du corps « Kaki » mais qui n’a pas comblé les attentes, tous les autres ministres qui ont dirigé le ministère de l’intérieur sont : soit évangélistes, soit bureaucrates, soit administrateurs civils…bref des gens qui n’ont jamais entendu le bruit d’un Akm. Autant qu’ils étaient et qu’ils sont, ils ne connaissent rien de la stratégie militaire indispensable pour contrer les assauts des malfrats. Cette inflation de ministres a d’ailleurs eu pour conséquence une inflation décisionnelle aux précédents très graves. Libre cours est laissé à la corruption, à la concussion, au népotisme, à l’insubordination, à l’affairisme, à des mutations punitives. C’est en effet avec le régime du changement qu’on a assisté au désossement des éléments des unités spécialisées de la police nationale formés à grands frais par des Israéliens et autres. Le comble sous le régime du changement est que certains ministres n’avaient pas d’autorité sur leurs collaborateurs. Les rapports tumultueux qui ont existé entre l’actuel Directeur général de la police nationale et l’ex-ministre de l’intérieur François Houéssou en sont d’ailleurs une preuve. Le pire n’est pas encore derrière nous, surtout dans le contexte actuel où la hiérarchie policière peine à retrouver la cohésion qu’il faut pour affronter les malfrats.