Ils savent lorsqu’il s’agit d’enjeu national, de surmonter leurs différences et d’avancer en rang serré. Ce mercredi, la fibre patriotique s’est exprimée au cours d’une marche qu’on peut finalement qualifier de la marche du siècle. Acteurs politiques de l’opposition et la mouvance critique, syndicats, société civile, zémidjan ont arpenté les artères de Cotonou ce mercredi 29 octobre 2014 pour une seule obsession. Réclamer les élections communales et locales.
Il sonne 8 heures. L’esplanade de l’étoile rouge commence par se colorer peu à peu en rouge. Des gens affluent de toute part. Certains en voiture, d’autres à moto, rallient ce grand lieu de regroupement. La foule se constitue et le badaud commence par s’intéresser. En un tour de bras, l’information est vite répandue au sein des amis en jaune (Zémidjan) et ils affluent sans invitation. Jusque-là, on a encore une idée vague de ce qui se passera les minutes et secondes à venir.
Peu de temps après, certaines personnalités commencent par faire leur apparition. Joseph Djogbénou et les membres de son parti Alternative citoyenne en premier, les responsables syndicaux ensuite, les forces de l’opposition, de la mouvance critique et de la société civile aussi. Les femmes Amazones étaient aussi de la partie. La foule est impressionnante. Mais jusque-là, rien ne rassure encore de la tenue réussie de cette marche. Les informations répandues comme une traînée de poudre la veille, renseignent sur la perturbation de l’événement. La peur d’une escalade taraude les esprits.
Mais hier matin, l’atmosphère était moins tendue. Le fort bataclan policier et les engins lourds souvent déployés à la Bourse du travail n’étaient pas au rendez-vous. Les nouvelles sont donc bonnes. Autour de 9heures, la marche démarre. Le point de chute, la place Lénine à Akpakpa. Contrairement à ce qu’on pouvait s’attendre, elle a été bien encadrée par les hommes en uniformes. Le trajet est harassant, la canicule vive. Un soleil de plomb rend chaud le macadam qui brûle les souliers ; la sueur dégouline, mais les marcheurs ne reculent pas. Sur le trajet, des hommes et femmes rejoignent la troupe. A moto, à pied, nul ne voulait vraiment se faire prier. Pour beaucoup, l’enjeu est plus fort que tout.
Sur les pancartes, les messages tout aussi variés sonnent comme une invite pressante à rompre avec l’atermoiement et les jeux politiques actuels, pour parvenir enfin à l’organisation des élections municipales, communales et locales. « Non à la Lépi d’exclusion et d’injustice sociale, 8 ans de douleur, où est la Liste électorale permanente informatisée (Lépi) ?, trop de mensonges, trop de fraudes, trop de scandales », lit-on sur les pancartes
La leçon de sagesse
A voir l’allergie du Chef et de son gouvernement aux actions de rue, on était loin de penser à une hypothèse aussi pacifique que celle d’hier. Quelques jours avant, le Chef de l’Etat Yayi Boni, au cours d’une sortie politique avait condamné vertement l’initiative. En face, les acteurs politiques aussi étaient dans une logique de raidissement ; ce qui laissait entrevoir un scénario catastrophe.
Mais rien n’y fit. Apparemment, le Chef a été pour une fois, bien conseillé. La marche n’a pas été réprimée et s’en est un gros point pour la démocratie béninoise. Mais les forces de l’ordre aussi l’étaient. A voir le professionnalisme qu’ils ont imprimé à l’organisation pratique de cette marche, on semble déduire que la hiérarchie policière aussi en avait marre et voulait les élections. Tout était donc réuni pour que l’événement soit une réussite et il l’a été. Dans les coulisses, on susurre que l’exploit sera réédité en l’absence de réaction.