Ce n’est plus un secret pour personne que dans les rangs des professionnels de santé, qui ont pourtant prêté serment pour sauver des vies humaines, il en existe qui, au lieu d’accomplir la mission à eux confiée par la nation, compliquent la vie aux patients qu’ils n’hésitent pas à rançonner.
« …Cela fait environ deux ans que j’avais accompagné ma fille aînée, malade au grand hôpital de Goho. On s’y est rendu aux environs de 16 heures. Le docteur qui nous avait reçues nous a dit que son cas est critique et qu’il fallait la soumettre à des soins intensifs. Il nous a, sans cesse, prescrit des ordonnances que nous avons achetées », a confié dame Agnès M., revendeuse de poisson au marché Houndjro d’Abomey. « Par la suite, a-t-elle complété, il nous a fixé des rendez- vous ; mais quand on y va, on ne le trouve jamais. Les aides-soignants nous disaient chaque fois qu’il était sorti. Le jour où nous avons eu la chance de le voir, il nous a proposé de venir dans sa clinique pour que le traitement de l’enfant soit bien suivi. Là, aussi, les ordonnances tombaient à foison. Mais nous avons eu gain de cause heureusement », s’est réjouie dame Agnès. L’autre ruse dont on accuse les agents de santé, est qu’ils prescrivent plus de médicaments qu’il n’en faut à leurs patients aux fins de revendre les ‘’non utilisés’’ plus tard à d’autres. Bertrand AGBO a vu son fils mourir après six années de maladie, six ans à acheter toutes sortes de médicaments dont il dit être convaincu qu’on en administrait très peu réellement à son feu môme. Selon lui, cette pratique serait monnaie courante dans la plupart des hôpitaux, du CHD d’Abomey au CNHU Hubert Maga de Cotonou en passant par le CHD de Porto- Novo, qu’il connait bien pour les avoir écumés avec son fils, Eudes A, malade sous les bras. De 2004 à début 2011, s’est-il souvenu non sans amertume, les médecins lui ont fait voir toutes les formes d’analyses médicales et d’ordonnances. Les résultats, a-t-il indiqué, variaient d’un médecin à un autre et chacun y allait de son inspiration et, dans certains cas, de ses besoins. « Nous avons tout un tas de produits pharmaceutiques non utilisés qu’on avait achetés encore à la maison ; d’autres sont restés chez les médecins. J’ai dépensé tout ce que j’avais et mon fils est décédé. L’un des médecins m’avait confessé que mon enfant souffrait de l’épilepsie et il m’a même demandé de faire suivre le traitement chez lui à la maison. Ce que j’ai fait. Mais hélas mon enfant est parti », a regretté le quinquagénaire, les yeux imbibés de larmes. D’un cas à un autre, le constat demeure le même et les témoignages se recoupent. Bernice S., étudiante en troisième année d’histoire-géographie à l’Ecole Normale Supérieure de Porto-Novo, porte aussi les blessures de ce rançonnement qui ne dit pas son nom. C’était dans la nuit du vendredi 19 avril 2013 aux environs de deux heures. Bernice était au chevet de sa camarade Irène M., 3ème année d’Allemand, qui était sur le point d’accoucher, dans un état critique nécessitant illico presto une intervention chirurgicale. « Durant toute la nuit, raconte Bernice, on nous a fait dépenser. On nous donnait des ordonnances que nous achetions sans cesse », s’est-elle souvenue même si elle reconnait que les médecins de garde ne les avaient pas abandonnées. Mais elle était obligée d’avouer leur insatisfaction jusqu’à leur descente à 09 heures. « Je me suis alors, se souvient-elle, rapprochée de l’un des agents qui était sur le point de rentrer pour savoir ce qui n’allait pas ». « Il y avait défaut de kit », avait répondu l’agent du fait des six opérations effectuées quelques heures plus tôt avant notre admission. « C’est cela qui a fait que nous avons manqué de ‘’nécessaires’’ pour faire l’opération », a complété l’agent. « Prise de panique, a poursuivi Bernice, j’ai informé mes autres camarades qui étaient avec nous et c’est dans les environs de 12 heures de ce vendredi-là que ma camarade a été admise au bloc opératoire ».Trop tard car et la fille et le bébé sont passés de vie à trépas.
Les cas du genre son légion. Et nombre de professionnels du secteur de la santé servant dans des formations sanitaires de service public, promoteurs de cabinets de soins privés, au lieu de s’occuper de leurs patients, mettent en place toutes sortes de machinations visant à les orienter vers leurs cabinets. Le plus souvent, ils le font de concert avec leurs collaborateurs ou leurs ‘’aides- soignants’’, qui donnent, sans répit, des rendez- vous non honorés aux patients.