Les faits remontent au jeudi 23 octobre 2014. Des bandits, de grand chemin, ont ciblé, dans la nuit noire, l’une des agences de l’institution bancaire « Uba », établie à Cocotomey. Avant d’opérer, ces hommes, sans foi ni loi, ont ligoté les deux policiers, en fonction, devant l’agence bancaire sus-indiquée. Une précision de taille : les deux policiers qui ont la charge de veiller sur l’agence en question s’étaient retrouvés dans les bras de Morphée et étaient, de ce fait, devenus une proie facile pour les faussaires.
Conséquence : les armes dont ils étaient munis ont été emportées avec une facilité déconcertante. Pour la Police nationale, cet acte, d’une extrême gravité, vient s’ajouter à la série de revers, déjà infligés à la troupe. Il s’agit ni plus ni moins d’une humiliation. Et pour laver l’affront, l’idée de sévir les policiers, auteurs de ces manquements graves, s’est imposée à la haute hiérarchie. Quoi de plus normal ! Mais derrière le bâton se cache l’iniquité.
Des hommes et des Sanctions !
Mis aux arrêts de rigueur, dans un premier temps, les deux policiers, par qui le malheur est arrivé, ont été ensuite radiés de l’effectif de la Police nationale. Mais, la haute hiérarchie policière ne s’est pas arrêtée à cette sanction. Les Commissaires de Police de Gbodjè, Arouna Sabi Yo et son Commandant Adjoint, Bachirou Alé, de même que le Commissaire de Godomey, Léopold Amadjikpé et son Commandant Ernestine Tchiakpè, ont été aussi mis aux arrêts de rigueur. A travers cette sanction, dit-on, le Directeur général de la Police nationale entend mettre fin au laxisme qui s’observe, depuis peu, dans le rang de certains responsables de la Police.
Là où le bât blesse !
Il est clair que l’effet attendu de ces sanctions, infligées tous azimuts, est une prise de conscience au sein de la troupe. Et cela, au moment où la pègre a pignon sur rue dans certains recoins malfamés du Nord au Sud du pays. Mais, à y regarder de près, le sort réservé aux Commissaires Arouna Sabi Yo et Léopold Amadjikpé, de même que leurs commandants adjoints respectifs, suscite une vive consternation. Et pour cause, les rondes, dans les institutions financières ou bancaires, sont du ressort des Chefs de Brigade et des Commandants du Corps Urbain qui ont l’obligation de contrôler les comportements des agents désignés pour assurer la veille permanente sur le terrain. Il appartient ainsi, à ceux-ci, de recenser les irrégularités et de rendre compte au Chef d’Unité qu’est le Commissaire de Police. Sur quelle base a t-on alors pris une telle sanction ? Selon le Directeur général de la Police nationale, Louis-Philippe Houndégnon, elle se justifie par le fait que si les rondes se faisaient, de façon régulière, les deux policiers radiés, n’auraient pas eu l’outrecuidance de dormir sur un lit sur les lieux de gardiennage . Mais, au regard du mode de répartition des tâches sus-indiqué, il est difficile de soutenir la thèse de la haute hiérarchie policière. Les circonstances dans lesquelles ces sanctions ont été prises soulèvent tout aussi émoi et désolation. En effet, après le passage des malfrats, les deux Commissaires concernés se sont lancés dans des investigations avec la collaboration des responsables de la Banque Uba-Cocotomey aux fins de retracer le mode opératoire des faussaires et tous les indices pouvant aider à les dénicher. Peine perdue, hélas ! C’est à l’entame de ces investigations que la décision de mise aux arrêts de rigueur a été prise, et cela à la surprise générale. Pourquoi une telle précipitation ? La mise à l’écart de ces deux commissaires, suite à cette sanction, pourrait-elle aider à démêler l’écheveau ? La haute hiérarchie policière est vivement interpellée face à ces interrogations.
Quid de la responsabilité sans faute ?
La mise en cause, dans cette affaire, des deux jeunes Commissaires peut-elle s’appuyer sur l’idée d’une responsabilité sans faute ? Sans se fondre dans les arguties juridiques, il est important de relever que la mise en cause de la responsabilité d’une personne suppose, normalement, l’existence d’une faute. Il existe cependant quelques exceptions à ce principe et c’est ce que l’on appelle la responsabilité objective ou la responsabilité sans faute. Ainsi, un responsable hiérarchique peut être appelé à répondre de la faute commise par un agent, placé sous sa direction, même s’il n’a commis la moindre faute. Mais avant de faire prévaloir ce principe, il est important de s’entourer de certaines précautions pour ne pas tomber dans les excès.
Eviter à tout prix une sanction unilatérale !
La vague de criminalité, particulièrement violente, qui s’est abattue sur le pays est encore présente dans toutes les mémoires, les mois écoulés. Le Chef de l’Etat a dû taper du poing sur la table. Ceci, à plusieurs reprises. La suite, c’est bien la kyrielle de réunions initiées à la salle du Peuple du Palais de la Marina après la série noire soldée par des bilans macabres, au sein des paisibles populations mais, également, au sein des éléments de la sécurité publique. La chance aurait-elle tourné en faveur des hauts gradés de la Police nationale dont les zones d’intervention étaient le théâtre de ces braquages sanglants et meurtriers ? Ce n’est sans doute pas une première au sein de la Police nationale. Il est temps d’éviter ces mesures disproportionnées qui ne sont pas de nature à instaurer la confiance au sein de la troupe. Il ne faut pas jouer avec le feu car l’enjeu, c’est bien la carrière de toutes ces personnes qui se donnent corps et âme pour accomplir leur mission.