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Entretien avec le professeur Naïm Deen Salami : « Le ROCARE, c’est comme une plante qui grandit au fur et à mesure qui fournit les branches, les fleurs et attire des abeilles »
Publié le vendredi 14 novembre 2014   |  Educ'Action




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« Le ROCARE, c’est comme une plante qui grandit au fur et à mesure qui fournit les branches, les fleurs et attire des abeilles »
Professeur de psychologie, Naïm Deen Salami est le coordonnateur national élu et réélu du Réseau Ouest-Centre Africain de Recherche en Education (ROCARE) au Benin. Dans cette interview qu’il a accordée à votre journal Educ’Action, il présente le ROCARE, sa mission, ses acquis mais aussi ses perspectives.

Educ’Action : D’où est parti l’idée du ROCARE ?

Naïm Deen Salami : Le Réseau Ouest-Centre Africain de Recherche en Education qu’on appelle ROCARE est né le 02 Février 1989 à Freetown. Cela fait 25 ans maintenant. Il a été monté par un groupe de jeunes chercheurs fraichement arrivés des Etats-Unis, de l’Europe et qui ont pensé simplement qu’il fallait quand-même voir dans le domaine de l’éducation les ajustements à faire puisqu’on parlait dans le temps du Programme d’Ajustement Structurel. Il fallait donc un PAS pour l’Education. Donc ces jeunes intellectuels noirs se sont retrouvés, se sont mis ensemble pour pouvoir créer un réseau qui permettra à l’Afrique de se doter, non seulement d’un dispositif de réponses aux questions d’éducation mais aussi, de la formation d’un ensemble de ressources humaines pour être en mesure de suppléer aux conséquences à tout ce manque criard sur le terrain et qui fait que ce sont les autres qui viennent faire la recherche à notre place en nous utilisant comme peut-être des enquêteurs, peut-être parce qu’en ce moment-là, il faut encore savoir s’ils ont besoin de savoir ce que nous pensons. Ils viennent souvent comme ça et puis ils tirent des conclusions qui n’ont pas la portée qu’on leur connaît et cela n’a pas souvent les effets attendus. Vous imaginez un peu à la banque mondiale à l’époque, il n’y avait pas du tout de responsable d’éducation et même pratiquement pas de responsable des sciences humaines. Tous étaient des économistes. Alors on pensait tout bonnement qu’on n’avait pas besoin pour l’enseignement primaire de former un enseignant, il suffisait tout simplement que quelqu’un qui sait lire et écrire puisse se mettre là et faire le boulot. C’était une aberration ! Et pour des raisons économiques, il fallait tout simplement fermer les écoles normales. C’est ce qui c’était passé à l’époque. Alors là, les chercheurs africains se sont regroupés pour dire il faudrait que nous ayons des capacités de réponse par rapport à tout cela. Le ROCARE a ainsi vu le jour et poursuit aujourd’hui son petit bonhomme de chemin

Combien de pays regroupe aujourd’hui le ROCARE ?

Partis de huit (08) en 1989, nous avons actuellement dix-huit (18) pays dans le réseau. Nous avons des pays anglophones et les pays francophones. Récemment il y a eu l’entrée de la Guinée Bissau qui est lusophone. Nous attendons justement la Guinée Equatoriale pour faire un peu plus de poids avec cette langue. On aura donc couvert pratiquement toutes les langues étrangères qui sont parlées en Afrique notamment l’espagnol, le français et l’Anglais qui sont les plus parlées. En clair le ROCARE regroupe tous les pays de l’UEMOA, tous les pays de la CEDEAO et la moitié des pays de la CEMAC. C’est un réseau extrêmement tentaculaire.

Précisez-nous la mission du ROCARE

La mission de ROCARE est d’abord de donner un visage africain à la recherche en éducation ; une image de la recherche en Afrique, une image de l’éducation Africaine. Ensuite il s’agira aussi de créer de vrais chercheurs africains capables de répondre efficacement aux besoins actuels de l’Afrique dans le domaine de l’éducation.

Comment fonctionne le ROCARE ?

Nous avons une coordination régionale qui est fixée à Bamako. Donc elle assure le secrétariat exécutif de tout ce qui se fait au niveau de la coordination. Il y a une assemblée générale des coordonnateurs nationaux que nous appelons, rencontres stratégiques qui permettent de définir les grandes lignes, les plans, les stratégies pour pouvoir enfin développer le réseau et l’éducation en particulier. Il y a aussi le conseil d’administration dont le Benin est membre. Il y a le comité scientifique régional qui s’occupe du contrôle de la qualité de tout ce qui est produit et qui nous met en phase avec la communauté scientifique internationale. Aujourd’hui le ROCARE est un centre d’excellence de l’UEMOA. Le centre d’excellence de l’UEMOA est attribué à des institutions de recherches qui ont de très grandes capacités du point de vue de la qualité de leur production, de la quantité de leur production et mais aussi de la qualité de leur personnel.

Quelles sont les actions fortes qu’on peut retenir au niveau du réseau ?

Nous avons formé beaucoup de chercheurs, près d’un millier. Nous avons mis en place une politique qui consiste à financer 25 projets de rechercher à concurrence de trois (3) millions par projet chaque année. Et c’est sur la base d’un concours lancé au niveau sous régional. Cette sélection est faite à plusieurs étapes : au niveau national comme au niveau sous régional etc. Et donc on publie les résultats et les récipiendaires sont toujours en équipe interdisciplinaire. Les chercheurs, en général, sont encadrés, formés au niveau sous régional. Notre dernière formation a eu lieu ici à Cotonou en Août dernier. Il y a aussi un suivi continu. Les chercheurs sont suivis par un professeur de rang magistral au niveau national. Après leur production, tout un conseil de chercheurs valide leur production au niveau national et cette production est renvoyée au niveau du comité scientifique régional qui statue finalement sur la qualité définitive de ce produit. Il nous est aussi arrivé de développer un système qu’on appelle personnes ressources, les grands chercheurs internationaux sont cooptés pour pouvoir suivre certains thèmes définis parce que chaque année, il y a toujours un ou deux thèmes développés et lancés dans le processus de compétition.

Quelles sont les perspectives du Réseau ?

Alors le ROCARE, évidemment c’est comme une plante qui grandit au fur et à mesure qui fournit les branches, les fleurs et attire des abeilles. Et dans une certaine mesure ces abeilles vont bitumer et après avoir fini de bitumer, ils vont donner du miel ailleurs, c’est tant mieux mais pourvu que ça soit en Afrique et ça nous permet de croire que nous sommes vraiment en train d’avancer. Je crois que c’est dans cette perspective que nous nous trouvons. Alors nous développons tous les thèmes pratiquement. En décembre prochain, on va faire les 25 ans à Bamako. Et pour 25 ans, c’était pour savoir quel est l’apport réellement de l’éducation dans le système d’intégration au niveau de l’Afrique. Quel est l’apport de l’éducation dans la gestion des conflits ? Les grands défis actuels seront repassés en revue en thème d’éducation, encore que c’est un peu ça ce que nous allons faire pour les 25 ans.

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