Même si la valorisation de la graine de coton par rapport à la fibre est extrêmement faible, sa vente sur le marché local et international peut ajouter un montant significatif au chiffre d’affaires de la filière. Sur la base d’une production de 300.000 tonnes de coton graine, c’est près de 10 à 12 milliards de FCfa qu’elle rajoute au chiffre d’affaires de la filière.
Pourtant, il faut être conscient que le prix auquel est vendu cette graine aux triturateurs locaux est largement inflaté ; il est en fait le résultat de rapport inégal et inéquitable entre égreneurs et triturateurs, et ce, depuis la campagne 2012-2013. En effet, c’est lors de cette campagne que Patrice Talon, à défaut d’un arbitrage du chef de l’Exécutif, a pu imposer un prix de 85.000 FCfa la tonne départ usine (bec égreneuse) sacs fournis par les triturateurs.
La campagne suivante 2013-2014 gérée par l’Etat, a empiré la situation en imposant le même prix que Patrice Talon l’année précédente pour une graine de qualité largement inférieure : les triturateurs estiment qu’à qualité égale, ils ont payé 100.000 FCfa la tonne. Pour la campagne qui vient de s’achever, 2013-2014, la Sonapra a vendu encore une fois à 85.000 FCfa la tonne mais en fournissant les sacs, ce qui a ramené le prix réel à 80.000 FCfa la tonne. Même à ce prix, les triturateurs locaux ont acheté avec parcimonie de sorte qu’à partir du 16 mai 2014, la Sonapra a dû rabattre ses prétentions et ramener son prix à 75.000 FCfa la tonne ensachée, soit 65.000 FCfa la tonne non ensachée. L’échec de la commercialisation de la graine de coton durant cette campagne 2013-2014 (où plus de la moitié de la production de graine n’a pu être cédée dans de bonnes conditions) tient également au fait que le marché international n’était pas aussi favorable que ce que pensaient les autorités. Les ventes à l’export, de sources bien informées, se sont faites à 95.000 FCfa la tonne Fob soit environ 75.000 FCfa la tonne ensachée départ usine. Encore fallait-il que les graines de coton soient d’une qualité acceptable en matière d’humidité, d’acidité et surtout de taux d’aflatoxine.
Rappelons que la graine de coton à l’export vers l’Europe essentiellement est un apporteur de protéine pour les bovins et se trouve donc en concurrence avec le tourteau de soja. Le prix Fob de la graine de coton variera donc en fonction du prix du tourteau de soja sur le marché international. Or, il est estimé qu’avec une production mondiale totale de 312 millions de tonnes en 2015, la production de tourteau de soja augmentera de 5,3% par rapport à 2014. Dans le même temps, la consommation de tourteau de soja n’augmentera que de 4,8%.
Les prix à terme du tourteau de soja ont déjà pris en compte cette situation puisque les contrats à terme se négocient à des prix de 15 à 20% inférieur à ceux de 2014.
Dans ces conditions, il est difficilement concevable que la Sonapra maintienne ses prix passés, y compris celui de 70.000 FCfa la tonne non ensachée qu’elle a pratiqué depuis le 16 mai dernier.
De leur côté, les triturateurs feront certainement de la résistance puisque les prix de la graine pratiqués ces dernières années les ont conduit à des pertes récurrentes, sur un marché local de l’huile déprimé et non protégé.
