Plusieurs pays africains vont organiser des élections en 2015. A quelques mois de ces échéances, le ton monte dangereusement dans la plupart de ces pays. Contrairement aux années passées, la communauté internationale ne veut plus laisser la situation exploser, avant de réagir.
Les années 2015 et 2016 seront celles des présidentielles dans une dizaine de pays africains. Il s'agit du Togo, du Bénin, de la Guinée, du Nigeria, du Gabon, du Burkina Faso, de la Côte d'Ivoire, de la RDC, du Rwanda, pour ne citer que ceux-là. Des tensions sont déjà perceptibles dans la plupart de ces pays. Les points de désaccord entre pouvoir et opposition sont pratiquement les mêmes. Ils ont pour noms, listes électorales contestées, commissions électorales noyautées par le pouvoir, retard dans l'établissement des cartes d'identité, mais surtout, tentatives des présidents sortant de réviser la Constitution pour briguer un autre mandat auquel ils n'ont pas droit.
Au Bénin, outre la question du report répété des élections locales, il y a surtout la suspicion qui pèse sur le chef de l’État, M. Thomas Boni Yayi, de vouloir briguer un troisième mandat. Au Togo voisin, c'est plutôt l'opposition qui lutte pour une révision de la Constitution, afin que le mandat présidentiel jusque-là illimité, soit limité à deux. En RDC, au Rwanda, au Gabon, les tenants actuels du pouvoir en sont tous à leur dernier mandat. Mais, leur volonté de briguer un troisième est un secret de Polichinelle. En Côte d'Ivoire, l'appel de l'ancien président, Henri Konan Bédié et leader du Pdci à soutenir le président Alassane Ouattara, provoque de vives tensions au sein du vieux parti. Au Fpi, le parti de l'ex-président Laurent Gbagbo, c'est également une guerre interne qui fait rage. Mais, cette formation politique a aussi des comptes à régler avec le pouvoir actuel qu'il accuse d'avoir envoyé son leader à la Cpi et de garder son épouse en prison. En Guinée, Alpha Condé est très critiqué par l'opposition, qui l'accuse de dérives autoritaires. Dans ce pays où sévit l'épidémie d'Ebola, le chef de l’État a promis des élections en 2015, malgré tout. Mais, ses adversaires sont convaincus qu'il tentera un passage en force. Tous ces mauvais signaux inquiètent les organisations africaines et internationales, qui dépêchent leurs différents émissaires dans ces pays où tout peut arriver. C'est surtout l'Onu qui est très présente sur le terrain.
L'Organisation des Nations unies a déjà dépêché des émissaires au Togo, au Gabon, ces dernières semaines. Mohammed Ibn Chambas était au Togo en novembre dernier pour y rencontrer opposition et pouvoir sur la question explosive de la limitation de mandats. Mais, son séjour n'a pas fait bouger d'un iota les positions. L'émissaire spécial du secrétaire général de l'Onu en Afrique de l'ouest a été précédé dans cette diplomatie préventive par le représentant de l'Ue au Togo. L’ambassadeur, chef de Délégation de l’Union européenne, M. Nicolás Berlanga-Martinez, a appelé à des réformes institutionnelles et constitutionnelles nécessaires dans le pays, avant les prochaines élections.
Au Gabon, c'est Abdoulaye Bathili, son représentant spécial en Afrique centrale, que Ban Ki-Moon a envoyé d'urgence pour calmer la récente tension entre Ali Bongo et ses opposants. Ces derniers ont appelé leurs partisans à ne plus reconnaître l'actuel chef de l'Etat comme tel.
Au Bénin, c'est l'Union européenne qui est venue s'enquérir de l'état du pays auprès de Boni Yayi. Devant les ambassadeurs de l'Ue, le président béninois, la main sur le cœur, a promis que le ''Bénin aura un nouveau président le 16 avril 2016 à minuit''.
En Côte d'Ivoire, le secrétaire général de l'Onu a sur place, sa représentante spéciale, Mme Aïchatou Mindaoudou. Elle suit attentivement la situation qui se limite, pour l'instant, aux querelles intestines des partis politiques et aux réticences du Fpi, le principal parti de l'opposition, à dialoguer avec le pouvoir. Mais récemment, un mouvement d'humeur généralisé des militaires, dans quasiment toutes les garnisons du pays, a donné des sueurs froides au pouvoir.
Enfin, au niveau de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao), le président ghanéen, John Mahama Dramani qui venait d'être reconduit à la présidence en exercice de l'organisation sous-régionale, le 15 décembre 2014 à Abuja au Nigeria, a saisi l'occasion pour adresser cette supplique à ses pairs de la Côte d'Ivoire, du Togo, du Bénin et du Nigeria. Pour préserver la stabilité dans notre sous-région, organisez des « élections pacifiques, crédibles, libres et honnêtes ».