Après deux ans d’agitation médiatique, la nébuleuse affaire qui oppose le Pdg de Cajaf comon, Sébastien Ajavon, au chef de l’Etat, va peut-être, définitivement, connaître son épilogue. Le gouvernement vient de proposer un protocole d’accord au président du Patronat béninois, pour lui payer les 13 milliards de francs de redressement fiscal.
« Nous avons assigné l’Etat et le droit sera dit. J’ai été appelé pour négocier. Alors, je leur ai demandé de me rembourser les 13 milliards de francs Cfa et je vais retirer ma plainte. Maintenant, s’ils sont sûrs du redressement fiscal de 35 milliards, on peut aller jusqu’au bout. Mais il m’a été dit que le redressement sera annulé. Vous avez jamais vu l’Etat annuler pareille dette ? Donc, Mr le président de la République, vous n’êtes pas un petit. Quand les gens vous disent d’annuler un redressement fiscal, c’est parce qu’ils savent que c’est du vent. Cela ne repose sur rien… ». C’est ainsi que Sébastien Ajavon exprimait son ras-le-bol et une colère légitime, après l’entretien du 1er août 2012, au cours duquel le chef de l’Etat, Yayi Boni, le traitait de « fraudeur ». Le président de Patronat béninois avait organisé une réplique mémorable à Azalaï hotel, pour laver l’infamie, et l’affront fait à sa personne. Sébastien Ajavon a, alors, indexé la directrice générale des Impôts, d’être le bras exécuteur de Yayi Boni. L’affaire a défrayé la chronique depuis lors. Malgré une rencontre en tête à tête au Palais de la République entre les deux hommes, et le dialogue secteur public-privé qui s’en est suivi, la situation n’a guère évolué. Cajaf Comon a, d’ailleurs, dû fermer plusieurs de ses démembrements sur le territoire national, et s’est vu contraint à mettre des milliers de Béninois au chômage. Ajavon, rappelons-le, est l’un des plus gros contributeurs au budget de l’Etat. Son entreprise a payé à l’Etat béninois au titre de la Tva , 5.2 milliards de francs en 2009 ; 3.7 milliards en 2010 ; 13.8 milliards en 2011 ; et près de 8.000.000.000 en 6 mois de travail comme Tva payé en 2012. Mais, le drame d’Ajavon, c’est qu’il n’est ni « Fcbe », ni un zélateur du Pouvoir. Le président du Patronat est plutôt une forte tête, un homme engagé, dont la propension à la philanthropie est connue. Il fait en quelque sorte peur, car, étant très populaire. Il est une sorte de « Navalny » à la béninoise, qui n’hésite pas à dénoncer les abus du Pouvoir. Harcelé depuis deux ans, il n’a pas cédé.
Le protocole qu’il vient d’accepter, pour enfin, renflouer les caisses de Cajaf, n’est pas un cadeau de Noël. Loin de là ! Les circonstances politiques obligeaient Yayi Boni a, enfin, reconnaître son « tort », à courber l’échine, et à faire amendes honorables. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce retournement. La gouvernance actuelle est très impopulaire et marquée par des échecs. Dans la délétère ambiance de fin de règne qui prévaut, où tous ses soutiens politiques Fcbe quittent la barque, et « changent de wagon », pour paraphraser Sacca Lafia, il n’en saurait être autrement. L’absence du Patronat béninois à la fameuse Table ronde de Paris, était un désaveu cinglant et un signal fort donné aux investisseurs étrangers, quant au peu de sérieux et de foi à accorder à ce régime. Sébastien Ajavon, toujours ferme dans sa ligne de défense, a enfin boycotté, d’une manière tonitruante, les travaux des états généraux du secteur privé organisés par la Ccib en décembre dernier. Entre-temps, pour avoir compris que le président du Patronat était incontournable, Yayi Boni a débarqué, un beau matin, sans ménagement, la dame des Impôts, ouvrant la voie à un rapprochement, et à un mea-culpa. Le reste était prévisible.