Le dialogue politique au Bénin est en panne. Le processus démocratique est progressivement menacé d’une paralysie totale. Le 11 décembre 2014, un regroupement de forces politiques issues de différents partis politiques, (notamment la Plate-forme des forces sociales et politiques, la Rb et le Prd) qui ne partagent pas la gestion politique du pouvoir en place, ont effectué une marche pour dénoncer le mépris des règles démocratiques par le gouvernement. Lors de cette marche, la Plate-forme et les forces politiques alliées, ont réaffirmé leur détermination à œuvrer en faveur d’un dialogue politique inclusif, de l’organisation rapide des élections municipales, communales et locales, en un mot, leur engagement pour la restauration des libertés individuelles et des acquis démocratiques.
Pour montrer sa « bonne foi », le chef de l’Etat et les thuriféraires de son régime ont organisé parallèlement, et le même jour, une marche pour louer les mérites du gouvernement et de son chef pour sa gestion socio-économique et politique exemplaire du pays. Mieux, le vendredi 02 janvier 2015, eut lieu une rencontre entre les forces politiques pour poser les bases du dialogue politique tant souhaité. Cette rencontre n’a porté aucun fruit et n’a pu se tenir jusqu’à son terme, parce que la mouvance présidentielle n’a pas voulu s’accorder avec les autres forces sur les bases élémentaires d’un dialogue politique franc : accepter l’accès équitable des partis politiques aux médias du service public, notamment l’Office de radiodiffusion et télévision du Bénin, le retrait du projet de loi du gouvernement portant révision de la constitution et enfin, le caractère exécutoire des résolutions qui seront issues de cette concertation entre forces politiques. Les partisans du régime au pouvoir n’ont pas marqué leur accord sur ces propositions et les discussions ont achoppé.
Peut-on parler de crise politique majeure ? La réponse est oui, car les élections municipales, communales et locales qui auraient dû se tenir en mars 2013, soit près de deux ans, n’ont toujours pas été organisées. Et il n’est toujours pas question de les organiser.
Les élections législatives doivent se tenir en mars 2015. Le corps électoral sera-t-il convoqué dans les délais ? Nous pouvons en douter.
Un Etat qui n’organise pas les élections est un Etat, par définition, dictatorial.
La démocratie au Bénin est-elle morte ?
Dans de précédentes réflexions, nous avons insisté sur la nécessité de :
- L’abrogation de la Lépi dite complète,
- L’urgence du vote d’une liste ad’ hoc,
- La suppression du Cos-Lépi,
- L’organisation pratique des élections par la Céna et enfin,
- La convocation, dès à présent, du corps électoral par le président de la République (Lire sur ce dernier point, la conférence de presse animée au Parlement le 06 janvier 2015 par les députés Hélène Aholou-Kèkè et Basile Ahossi, dans le quotidien Le matinal du 07 janvier 2015).
Ces propositions sont donc partagées par la majorité des forces politiques, mais n’ont connu aucune concrétisation à ce jour. Le gouvernement et les députés de l’Assemblée nationale qui partagent concurremment l’initiative des lois, se complaisent tous dans la passivité.
La seule passerelle de dégel de la crise appartient alors aux honorables députés opposés aux actions du chef de l’Etat et qui sont actuellement majoritaires à l’Assemblée nationale. C’est ce qu’on est tenté de comprendre au regard de la nouvelle configuration politique du Parlement béninois depuis le 12 décembre 2014, suite à la reconstitution du groupe parlementaire de l’honorable Candide Azannaï et du repositionnement de certains députés à l’Assemblée nationale (Voir à ce propos le Quotidien 24 heures au Bénin du 14 décembre 2014). Avec les honorables Bani Samari, Ali Camarou, Epiphane Quenum, Sacca Fikara et consorts, le député Azannaï a pu reconstituer son groupe parlementaire, composé de 09 membres.
Cette entité parlementaire a en son sein des députés de la mouvance et de l’opposition. Il y a également le groupe parlementaire-Prd (Parti du renouveau démocratique) porté désormais à dix membres avec l’entrée du député Venance Gnigla de la 5ème circonscription électorale. De son côté, l’Union fait la Nation, radicalement opposée à la gestion du président Boni Yayi, compte actuellement au moins 11 députés avec l’arrivée des honorables Issa Salifou et Antoine Dayori. C’est un groupe parlementaire qui dénonce avec véhémence la gouvernance du chef de l’Etat. A cela, s’ajoute la Renaissance du Bénin (Rb) avec 09 députés au Parlement. Au total, l’opposition a déjà au Parlement une quarantaine de députés, sans oublier le président de l’Assemblée nationale, Mathurin Nago, Djibril Débourou, Sacca Lafia, Nicaise Fagnon et Hélène Aholou-Kèkè, qui ne partagent plus vraiment la politique du chef de l’Etat.
Qu’attendent alors nos honorables députés pour agir ? Ont-ils peur ?
Faut-il envisager une situation comparable à celle qu’a connue le Burkina-Faso pour obliger les honorables députés à agir conformément à leurs idées d’opposant ?
Si les députés s’unissent pour proposer par une loi, l’abrogation de la Lépi, dite complète et l’adoption d’une liste ad’ hoc, cela mettra le gouvernement face à ses responsabilités qui doit convoquer dès maintenant le corps électoral.
Faut-il que les citoyens, notamment les jeunes descendent dans la rue et marchent sur l’Assemblée nationale avant que les honorables députés ne réagissent et passent à l’action ?
Nous sommes encore loin de cette situation extrême et nous espérons que le génie béninois prendra le dessus sur les errements politiques présents et qu’un dialogue politique franc et sincère s’instaurera pour le salut de notre démocratie dont nous sommes légitimement fiers.
Nous présentons pour finir, nos meilleurs vœux de santé de paix et de sérénité à tout le peuple béninois.