Sous la houlette de M. Joseph Aïmassè, les populations de la commune d’Adjohoun auraient destitué le maire retenu depuis le 27 novembre 2014 dans les liens de la détention. Un tel agissement viole les dispositions de la loi 97-029 du 15 janvier 1999 portantorganisation des communes en République du Bénin. La destitution d’un maire de commune suit une procédure bien définie.
La destitution d’un maire au Bénin, depuis l’ère de la décentralisation, ne se fait pas dans la rue. La destitution obéit à une prescription déterminée par l’article 53 de la loi 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en République du Bénin. Cet article dispose : « en cas de désaccord grave ou de crise de confiance entre le conseil communal et le maire, le conseil peut, par un vote de défiance à la majorité des 2/3 des conseillers, lui retirer sa confiance. Le vote a lieu à la demande écrite de la majorité absolue des conseillers. Le préfet, par arrêté, constate cette destitution. » De même, le décret 2005-376 du 23 juin 2005 fixant les modalités de destitution du maire ajoute en son article 2 : « le préfet est ampliataire de la demande sus évoquée ». Il est donc superfétatoire d’apprendre que la destitution du maire d’Adjouhoun s’est faite sur la place publique. Au regard de l’article 53 de la loi 97-029, c’est le conseil qui destitue le maire. Il faut d’abord avoir qualité de conseiller pour prétendre le faire. Ensuite, il faut réunir la majorité des conseillers, soit les 2/3 pour enclencher le processus de destitution. C’est vrai que le maire Gérard Adounsiba est retenu dans les liens de détention préventive depuis le 27 novembre 2014. Il reste que la justice établisse sa culpabilité sur l’une des fautes lourdes énumérées à l’article 55 de la loi 97-029, en s’appuyant sur les griefs « vente ou aliénation abusive des biens domaniaux », mis à la charge du maire Adounsiba. N’étant pas encore condamné, le maire d’Adjohoun est dans une situation « d’empêchement temporaire ». Son adjoint Célestin Azonhoumon « expédie les affaires courantes », conformément à l’article 61 de la loi 97-029.
Organisation de
la destitution
La destitution du maire est organisée par le décret 2005-376 du 23 juin 2005 fixant les modalités de destitution du maire. L’article 3 stipule : « Dans un délai de 15 jours, à compter de la date d’enregistrement à la préfecture de la requête visée à l’article 2, le préfet met en place un comité de conciliation de trois membres. » C’est dire qu’il ne suffit pas de brandir l’article 53 de la loi 97-029 pour obtenir la destitution. Ce serait de l’anarchie dans la République. Car le maire représente l’autorité de l’Etat au niveau de la collectivité territoriale. L’article 3 du décret vise d’abord à freiner les élans de destitution. Exactement à l’image des couples en crise que l’autorité de l’état civil ou le juge ne peut séparer à la première écoute. Il faut tenter une conciliation et une réconciliation si nécessaire. L’article 4 du décret 2005-376 du 23 juin 2005, dispose à son tour : « Au terme d’un délai de 15 jours courant à partir de la date de sa constitution, le comité de conciliation se réunit, procède à toutes les auditions et constate par procès-verbal le succès ou l’échec de la tentative de conciliation. Ce procès-verbal est dûment signé par tous les membres du comité de conciliation. La liste des participants à la séance de conciliation est annexée audit procès-verbal » C’est la démarche que doit suivre le comité de conciliation. Au terme de la mission du comité de conciliation, l’article 5 décret 2005-376 du 23 juin 2005 constate que : « Il y a désaccord et crise de confiance lorsque les tentatives de conciliation ou médiation ont échoué. » En conséquence, les dispositions de l’article 7 libellé ainsi qu’il suit : « En cas de non conciliation, le maire a l’obligation, de réunir sans délai, le conseil communal ou municipal pour enclencher le processus de destitution prévu à l’article 53 » est mis en application. Le processus est désormais bien long pour parvenir à la destitution du maire. Au demeurant, l’article 6 du décret 2005-376 du 23 juin 2005 fait observer que : « en cas de succès la demande de destitution devient caduque ». La destitution visée au départ ne peut avoir lieu.
Jean-Claude Kouagou