Le débat sur la révision de la Constitution suscite déjà des manifestations de rue. Elles proviennent étonnement des forces politiques favorables à la révision, donc du Pouvoir en place qui a initié le projet. Cela est provocateur et on craint que les mêmes mouvements inspirent les antirévisionnistes qui, pour le moment s’en remettent à l’esprit de la Conférence nationale de février 1990 pour défendre leur juste et légitime combat par les moyens moins belliqueux. Mais jusqu’à quand continueront-ils de garder leur sang froid ?
Comme si on était en pleine période électorale, le pays a rompu avec sa tranquillité légendaire par des affiches, des meetings, des marches, des banderoles. Le débat sur la révision de la Constitution est plus que jamais d’actualité et fait émerger plusieurs positions qu’on peut résumer en trois. Les révisionnistes, les antis, et les « ni oui ni non ». Oublions les derniers et attardons nous sur les deux premiers camps. Chacun y va de sa manière pour défendre sa position. En dehors des agitations qui se multiplient dans le camp des révisionnistes, il n’y a pas encore eu d’évènements fâcheux. Mais tout peut arriver et on a des raisons de s’inquiéter au regard des manifestations favorables à la révision qui sont de plus en plus organisées. Le 29 juin 2013 à Saketé, les militants du Mouvement espoir du Bénin (Mesb) du ministre de l’Enseignement supérieur François Abiola ont préféré la rue pour dire oui à la révision. Une certaine opinion élitiste en était stupéfaite. Comme on pouvait s’en douter, une telle initiative dont le régime en place en est le dépositaire ne va pas s’arrêter au Plateau. Elle a inspiré le Nord. Le samedi 06 juillet 2013, on a appris avec horreur la sinistre marche des « populations » de Kandi qui réunies au sein de l’Association nouvel espoir de Kandi (Anek) sont descendues dans la rue pour soutenir la révision de la Constitution. Sous l’égide de la ministre de la Famille Fatouma Amadou Djibril, et soutenues par le ministre des affaires étrangères Nassirou Arifari Bako, de même que quatre députés à savoir Sabi Soulé, Tokou Dari, Orou Sé Guéné Aziz Issa, elles ont battu le macadam pour exprimer leur adhésion au projet de révision. Le même week-end, c’est la ville d’Allada qui a abrité un meeting pour la même cause. Le ministre des sports Didier Akplogan était maître de cérémonie. Les populations ont donné de la voix pour encourager cette entreprise du gouvernement. Ces genres de manifestations qui commencent par inonder le pays font naître un sentiment de peur dans certains milieux. Peur de ce que ces agitations contiennent des risques d’explosion. Puisque, elles sont devenues des éléments de pression sur d’autres ministres qui ne l’ont pas encore fait. Ce qui est certain, ils le feront. Chaque week-end, sera l’occasion de se mettre en relief pour montrer au chef que ses populations sont acquises à la cause révisionniste. Ainsi, ne soyons pas surpris que les autres ministres et Directeur de sociétés d’Etat s’inspirent des exemples de François Abiola, Fatouma Amadou Djibril pour forcer l’adhésion de leurs frères et sœurs au funeste projet de Yayi Boni. Sans doute à coup d’argent. Mais malheureusement ceux qui agissent ainsi, le font par naïveté et stupidité s’agissant des populations et par crainte de perdre son poste en ce qui concerne les ministres et autres autorités étatiques. D’autres suivront le même mouvement par crainte d’être broyés par la machine Yayi lors des élections communales et locales.
Attention à l’escalade
Pendant que les révisionnistes agissent de cette manière, on se demande ce que feront les antirévisionnistes. Continueront-ils de garder leur sang froid ? Pour le moment, ils se signalent par des affiches véhiculant le message « Touche pas à ma Constitution », des débats d’idée, des publications avec des arguments pertinents. On sait qu’ils sont sur le droit chemin et que le combat qu’ils mènent est celui du peuple, alors que celui des révisionnistes est la lutte d’une seule personne. On sait que les antirévisionnistes agissent par conviction, par souci de garder haut le flambeau de la démocratie béninoise. Or, le camp d’en face ne vise que des intérêts personnels et égoïstes. Les opposants à la modification de la loi fondamentale du Bénin n’ont pas encore organisé une seule manifestation de rue. Et pourtant on les y pousse. Si les révisionnistes les provoquent en choisissant de descendre dans la rue, ils ne garderont plus pendant longtemps encore leur sang froid. Tout le monde sait que l’attitude du régime en place frise la provocation. On peut affirmer d’emblée qu’il incite les antirévisionnistes à la mobilisation de rue. Le Pouvoir en place sait qu’ils en ont fait d’autres pour moins que la révision. S’ils réagissent de la même manière que les révisionnistes, tout le peuple sera dans la rue. Dans le contexte actuel, il ne manque dans la rue que les gens qui sont contre la révision. Dès qu’ils y seront, qu’adviendrait-il ? Sans doute, la tension sera dans la rue. L’affrontement, l’escalade de violence et les dégâts seront au rendez-vous. Certes, patience et sagesse restent les qualités des antirévisionnistes. Seulement personne ne sait jusqu’où nous conduira ce projet de révision de la Constitution fortement décrié et initié par le chef de l’Etat. Malheureusement, tout peut arriver.