L’un des grands défenseurs de la révision de la Constitution du Bénin, Ousmane Batoko n’est cependant pas un «jusqu’auboutiste» dans ce processus. Dans une récente interview accordée à Bbc Afrique, le président de la Cour suprême du Bénin a évoqué un seuil à ne pas franchir par Boni Yayi. La révision quoi qu’il arrive de la Constitution du 11 décembre 1990, Ousmane Batoko n’en veut pas.
Le président de la Cour suprême l’a indiqué dans une récente interview à nos confrères de la Bbc Afrique lorsque ces derniers ont voulu savoir s’il s’opposerait à une révision de la constitution devant permettre au président Boni Yayi de briguer un troisième mandat si ce dernier le voulait. «Je ne suis pas opposé à toute modification de la constitution ; je dis que j’ai été de ceux qui ont fait les premières propositions de modification de la constitution. Mais de modifications de la constitution qui ne portent atteinte à aucun des éléments fondamentaux de ladite constitution. J’ajoute que si la modification de la constitution doit conduire à des perturbations à l’intérieur du pays, je suis de ceux qui estiment qu’il y a plus important en ce moment à faire pour le pays plutôt que de s’engager dans un processus de modification de la constitution ? Voilà mon point de vue M. le journaliste », a répondu le président Batoko. Il se refuse en effet à croire que cette révision voulue par le président de la République vise à lui donner une nouvelle possibilité de se représenter en 2016. «Je ne sais pas sur quoi vous vous fondez pour estimer que le président Boni Yayi voudrait modifier la constitution par rapport à des intérêts personnels qu’il pourrait viser ? La modification de la constitution s’impose après plus de vingt ans d’expérience de sa mise en œuvre au Bénin. Nous avons été un certain nombre de juristes de haut niveau à avoir été sollicités dès 2008 déjà par le président Boni Yayi pour une relecture de la constitution. Les premières propositions de modifications qui ont été faites au Bénin émanent de l’équipe à laquelle moi-même j’appartenais et qui avait obtenu du chef de l’Etat du Bénin que les fondamentaux de la constitution béninoise ne soient pas modifiés. Les fondamentaux de la constitution béninoise, c’est quoi ? C’est la laïcité de l’Etat, c’est la limitation du nombre de mandat, c’est également la limitation en plancher et au sommet de l’âge des candidats à la présidence de la République ; et d’après ce que l’on dit aujourd’hui au Bénin, les propositions qui sont parvenues sur la table de l’assemblée nationale n’ont en aucune manière touché à ces fondamentaux de la constitution béninoise », a-t-il souligné.
Le consensus, idée partagée par beaucoup
L’idée émise par le président Batoko selon laquelle il est nécessaire d’avoir le consensus autour de cette révision de la constitution afin de ne pas entraîner de perturbations sociales est celle défendue par ceux qualifiés aujourd’hui «d’anti-révisionnistes». Plusieurs ténors de l’opposition souhaitent ce consensus sans lequel « il ne faut toucher à une virgule de la constitution ». Lors de sa 3è convention nationale tenue le 1er juillet dernier, l’Union fait la Nation, plus grand regroupement au sein de l’opposition, a encore insisté sur ce volet. Elle « réaffirme son opposition à toute révision de la constitution sans concertation préalable entre les forces vives de la Nation en général et particulièrement sans un dialogue effectif entre la prétendue « majorité présidentielle » et l’opposition ainsi que les centrales syndicales, les représentants dûment mandatés des entités religieuses, des cercles philosophiques, les associations de la société civile actives dans le domaine de la gouvernance. Cette concertation devra déterminer de manière consensuelle les problèmes majeurs qu’une révision éventuelle de la constitution permettrait de résoudre. Sans l’observation stricte d’une telle méthodologie qui relève d’une approche consensuelle conforme à celle de la Conférence Nationale et des travaux du HCR, représentatif des principales sensibilités du pays en 1990, aucune révision de la Constitution ne saurait être acceptable… ». Maintenant, la question est de savoir à partir de quel moment cette perturbation serait perceptible et quelle sera en ce moment l’attitude du président de la Cour suprême, pourtant nommé à ce poste par le chef de l’Etat. Car quoi qu’en dise, les présidents des institutions de la République ont leur mot à dire dans cette bataille entre pro et anti révisionnistes.