Des coups de feu à l’Akm, du sang, deux morts, un miraculé. C’était l’effroyable scène hier lundi 16 février 2015 à l’aéroport Cardinal Bernandin Gantin de Cotonou, plus précisément à la base de l’Armée aérienne. Aux environs de 14 heures, des coups de feu ont retenti créant la panique. Un lieutenant a été tué à l’Akm. Le tueur, un sergent atteint par balle à l’abdomen dans des conditions qui restent à clarifier, a succombé à ses blessures quelques heures plus tard. La Gendarmerie nationale a ouvert une enquête.
Drame inhabituel au sein des Forces Armées béninoises. Michel Houessou, lieutenant de l’aviation militaire a été tué à la base aérienne à l’aéroport Cardinal Bernandin Gantin de Cadjèhoun à Cotonou par un subordonné. Ce dernier a tiré sur lui plusieurs coups de feu. Le tueur, un sergent s’est servi de son Akm de service pour tirer à bout portant sur son patron dans son bureau. La victime bien que touchée mortellement aurait réussi à s’agripper à son bourreau, et c’est à ce moment qu’un autre coup de feu est parti pour atteindre, cette fois-ci le sergent à l’abdomen. Il serait mort sur le chemin de l’hôpital, ou sur place selon des témoins. L’Armée pleure en ce moment deux des éléments. La thèse selon laquelle le tueur a retourné l’arme contre lui-même pour se donner la mort est peu convaincante aux yeux de plusieurs observateurs qui estiment qu’un autre militaire, outré par son acte a décidé de l’abattre. Une enquête a été ouverte par la Gendarmerie nationale pour déterminer les circonstances de ce drame.
Un miraculé
Un autre lieutenant était dans le même bureau que Michel Houessou au moment des faits, indiquent nos sources. Il constitue un indice précieux dans la manifestation de la vérité. Le bilan de cet effroyable acte aurait pu s’alourdir si ce dernier, témoin des faits, n’avait pas eu le reflexe de se protéger en renversant un mobilier de bureau et trouver une issue pour s’échapper et alerter les autres éléments.
Des impacts de balles retrouvés dans le bureau et les témoignages du miraculé attestent qu’on n’était pas loin de compter au moins trois morts sur le carreau.
A l’origine
La question que beaucoup se posent, c’est de savoir ce qui a poussé le sergent à faire face à son supérieur au point de tirer sur lui à bout portant. Selon nos informations, tout est parti d’un compte rendu que le lieutenant aurait exigé de son sergent. Ce dernier désigné chef de poste au sein d’une équipe de cinq éléments aurait manqué à ses obligations lors d’une faction. On le soupçonne de n’avoir été présent lors de la montée de la garde, alors que sa signature figure dans le registre de présence. Quelqu’un d’autre l’aurait-il protégé en imitant sa signature ? Le lieutenant Michel Houessou qui l’a interpellé avec son groupe, l’a écouté d’abord avant de lui demander de se retirer pour revenir avec un rapport écrit. Le Sergent aurait tergiversé pendant longtemps avant de quitter le bureau du lieutenant. Mais à son retour, il ne détenait pas le rapport écrit, mais une Akm. Il ouvre le feu et tire à bout portant. Le lieutenant Michel Houessou ne pouvant pressentir un tel acte n’a pu rien faire pour le déjouer. A l’analyse des faits, deux raisons pourraient expliquer l’attitude du sergent. Premièrement, c’est qu’il est fort probable que les deux militaires aient des antécédents. Sur le plan professionnel ou extraprofessionnel, peut-être. L’autre élément, ce qui est d’ailleurs courant au sein de l’Armée, ce sont les punitions infligées aux hommes de rang pour un rien. L’hypothèse que le sergent soit puni après avoir déposé son rapport écrit parait plus probable que la première. S’il est vrai qu’il faut faire régner l’ordre, la rigueur et la discipline dans l’Armée, il est aussi vrai que les punitions souvent infligées par la hiérarchie aux exécutants sont à l’origine de nombreuses frustrations.
Une enquête a priori biaisée ?
En de pareille circonstance, l’enquête doit être conduite par une structure neutre ou qui tout au moins n’est pas sous la même tutelle que le corps qui a été touché. Or, qu’avons-nous constaté ? C’est la Gendarmerie sous tutelle du ministère de la Défense nationale au même titre que l’Armée aérienne qui a été instruite pour déterminer les circonstances d’un drame dont les contours sont de plus en plus difficiles à cerner. Au regard des différentes versions servies, parfois contradictoires bien que provenant des sources autorisées, on se demande s’il n’y aura pas un rapport d’enquête tronqué. Ce qui renforce nos craintes, c’est la manière dont la Police a été subtilement écartée des investigations. Car était présent hier sur les lieux du drame, le Directeur général de la Police nationale Louis-Philippe Houndégnon avec tout son staff. On a pensé que c’est pour les raisons d’enquête que la Police s’est déplacée. Mais très tôt, on a revu nos jugements. Ce n’est pas qu’on ne fait pas confiance à la Gendarmerie, mais pour jouer la carte de la neutralité et de la transparence, ce n’était pas bienséant que les disciples de Ste Geneviève prennent le dossier en main. Auront-ils les mains libres pour établir les responsabilités quelque soit l’image que cela renverra ? Nos craintes, espérons le, seront dissipées. A l’annonce de l’incident, le ministre de l’Intérieur, Simplice Codjo, le chef d’Etat-major général des Armées, le Gal Awal Nagnimi, le chef d’Etat-major de l’Armée aérienne et bien d’autres autorités du pays se sont portés à la base aérienne.
Fidèle Nanga