Les partisans du président Yayi Boni clament depuis bientôt un an, un slogan qui irrite les adversaires politiques du régime en place. « Après nous, c’est nous », disent-ils, convaincus de préserver les arrières de Yayi Boni. Au fil des jours, un contenu peut être attribué à cette boutade qui semble prendre corps sur un chantier inattendu.
Au dernier congrès des Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe), il a été affirmé sans scrupule que l’Alliance politique qui conduit les destinées du Bénin ces dix dernières années, se bat pour la gestion après le départ de Yayi Boni. Mieux, il est affirmé avec force et détermination que les Fcbe entendent garder le pouvoir pendant au moins 99 ans. Diantre ! Le scénario auquel veulent soumettre les partisans de Yayi Boni au peuple béninois est digne du schéma « Waxala ». Lorsqu’un des fils du président Yayi Boni, en l’occurrence Chabi, se déclare sur les réseaux sociaux, candidat aux prochaines élections législatives, alors qu’il n’est militant d’aucun parti, il sait sur quoi il compte. Il doit être en train de trahir des secrets de famille. Qu’à cela ne tienne ! C’est son droit le plus absolu de citoyen de se porter candidat à une élection. Seulement, au regard des innovations contenues dans le code électoral, rien n’est plus comme avant. Pour être candidat aux élections locales, il faut appartenir à un parti politique et présenter des candidats pour l’ensemble de la commune. (Articles 436 et 443 du Code électoral). Mais comme le père est un docteur en sciences exactes et sait faire des projections sur des lustres, on peut dès à présent s’inscrire dans la logique d’une projection et dégager ce qui suit. Le président Yayi conduit inexorablement le régime politique béninois vers une monarchie qui ne dit pas son nom. En effet, attachées à la révision constitutionnelle, devenue irréalisable au terme de la décision Dcc14-199 du 20 novembre 2014 de la Cour constitutionnelle, les Fcbe se fraient un nouveau chemin. Coïncidence pour coïncidence, la première décision de la Cour constitutionnelle en date du 09 janvier 2015, par laquelle, des injonctions ont été données aux institutions aux fins d’organiser les législatives avant les communales en 2015, a rencontré la volonté de l’Exécutif et des groupes politiques au pouvoir. Cette coïncidence qui cadre avec une volonté est indubitablement l’acte premier d’un plan en construction.
Du Parlement à la Marina
Chabi Yayi sera donc candidat sur une liste de la mouvance présidentielle et de préférence, celle des Forces cauris pour un Bénin émergent. Une fois député avec la majorité que souhaite le père, Chabi Yayi, sera élu président de l’Assemblée nationale. Waooo ! Et ainsi, Yayi le père sera à la Marina et Yayi le fils au palais des gouverneurs. A l’image de Faure au Togo, mais dans un autre contexte différent, Chabi viendra à la Marina, pour remplacer le père. Et comment ? Tout se jouera sur la base de l’article 50 de la Constitution qui prévoit la vacance de pouvoir par démission du président de la République, l’organisation de l’intérim et d’une nouvelle élection du président de la République. Chabi étant déjà président de l’Assemblée nationale, il sera appelé à assurer l’intérim avant de se légitimer au moyen d’un simulacre d’élection. Il n’aura même pas 30 ans. C’est cela le sens de « après nous, c’est nous ». Ce cas de figure n’est pas prévu par la Constitution. Il provient d’une réflexion profonde qui prend corps chez les Fcbe avec une grande conviction. Mais, c’est sans compter avec l’intelligence des Béninois. Florentin Mito-Baba, sous le régime du président Nicéphore Soglo s’était déjà offusqué contre une telle vision qui consiste à transmettre le pouvoir de père en fils. Il l’avait si bien dit en utilisant une allégorie en langue nationale Fon. On ne saurait vénérer le cheval, sa fiente et son cul. Depuis lors, la leçon est très bien sue des Béninois. Aucune alchimie ne peut favoriser sous l’ère du renouveau démocratique, la transmission du pouvoir de père en fils. En tout cas, sous aucune forme de manigance.
Jean-Claude Kouagou