Aux Forces cauris pour un Bénin émergent, personne ne sait réellement où se trouve l’autre sur les listes confectionnées pour les élections législatives. Seul Yayi Boni le sait. Mais le président de la République a peur de révéler sa liste.Le parti au pouvoir, les Fcbe, n’était pas réellement prêt le 24 février 2015, date butoir du dépôt des dossiers de candidatures pour le compte des élections législatives du 26 avril 2015. Mais, pour tromper la vigilance de l’opinion publique, une fausse liste a été déposée à quelques heures de la clôture de l’enregistrement des dossiers de candidatures. Au titre de l’article 44 du code électoral, un récépissé provisoire a été délivré au déclarant. Ce n’est qu’après cela que la grande bataille de positionnement a commencé et personne ne sait ceux qui y laisseront leur peau. Déjà au lendemain de l’enregistrement, c’est-à-dire le 25 février, les lieutenants du président de la République ont tenu une rencontre secrète dans les villas présidentielles, sur la route de l’aéroport pour arrêter une liste. Mais très tôt, cette réunion a mal tourné entre les partisans de Yayi Boni. C’est le scénario identique qui s’est produit la veille au siège de la Céna où les Fcbe ont étalé l’étendue de leurs divergences. Dans un premier temps, ce sont les députés Rachidi Gbadamassi, Nouhoum Bida et consorts qui se pointent, l’air peu serein. Leur arrivée, à quelques minutes de la fermeture du portail de la Céna, laisse transparaître que le chef de l’Etat n’a pas encore dit son dernier mot et qu’eux-mêmes porteurs des dossiers ne savaient pas encore sur quel pied danser. Au sein de la délégation, tout le monde n’était pas sur la même longueur d’onde. Tête-à-tête par ici, coups de file par là-bas, le spectacle était digne d’une cacophonie. Dans ce contexte, un groupe se retire dans une salle de la Céna pour se mettre à l’abri des chasseurs d’images et d’informations.
Les premiers signes qui ne trompent pas
A minuit, le portail de l’Institution est fermé. Plus personne ne devrait entrer. Mais, on en était là quand, coup de théâtre, le ministre de l’Agriculture Issa Azizou fit son apparition. Les militaires, sans aucune résistance, lèvent la barrière et ouvre le portail au membre du gouvernement. Les membres de la Céna n’ont pipé mot et pourtant, ils étaient tous présents. Le ministre Issa Azizou descend en catastrophe, visage interrogateur et rejoint ses camarades de lutte. C’étaient des discussions à n’en point finir. De conciliabule en conciliabule, aucun compromis n’a été trouvé. Rien n’est joué et, la liste conduite à la Cena n’est que mystification. Les Fcbe, au bord de l’implosion, ont déposé une liste loin d’être la vraie. Aux environs de 4 heures, Rachidi Gbadamassi et son groupe se retirent en déclarant qu’ils ont déposé les dossiers et, le récépissé provisoire leur a été délivré. Le mercredi dernier, pendant que la Cena rencontrait la presse pour lui faire le point des partis et alliances de partis qui ont pourvu des candidats à tous les postes et dans toutes les circonscriptions électorales en attendant de modifier, les Fcbe étaient rassemblés dans les villas présidentielles sur la route de l’aéroport. Sous la conduite des députés André Okounlola, Rachidi Gbadamassi, Nouhoum Bida, téléguidés depuis le Palais de la République par Yayi Boni, ils ont cru devoir refaire la liste. Mais cette rencontre secrète organisée, sur instruction du chef de l’Etat n’était pas la bonne occasion attendue par les candidats en attente de savoir leur sort. Pire, à l’heure actuelle, aucune liste consensuelle n’est disponible. C’est une équation que Yayi Boni n’arrive pas à résoudre. Mais là où les choses se compliquent davantage, c’est qu’en dehors de la liste déposée à la Céna le 24 février et celle confectionnée dans les villas présidentielles le 25 février dernier, le président de la République a confectionné une autre liste. Selon nos informations pour ne pas se fâcher avec certains ténors qui n’ont pu être casés jusque-là, Yayi Boni a tenté de repêcher certains de ses proches comme têtes de listes dans les circonscriptions électorales où les batailles s’annoncent serrées. Ainsi, il vient de récupérer quelques ministres et députés qui étaient absents ou mal positionnés sur les listes. Cela se passe au détriment des premiers noms qui étaient en lice. En l’espace de 48 heures, la listes des Fcbe a été modifiée plus de trois fois et on ne saurait s’en arrêter là. De même, il reste l’épineux problème des mécontents à régler. L’ambiance déjà chaude risque d’être explosive dans les heures et jours à venir. Avec la situation qui prévaut chez les Fcbe, c’est devenu le sauve qui peut. Ceux qui se croyaient cooptés pour défendre les couleurs des Fcbe, tapent à toutes les portes pour ne pas rester sur la berge. Beaucoup de listes pourraient être modifiées pour intégrer les mécontents des Fcbe.
Le jeu suspect
de la Céna
Avec autant de mouvements après la clôture du dépôt des dossiers de candidatures, on se demande comment est-ce que la Céna va pouvoir régler les cas complexes. Tout d’abord, on lui demande des comptes sur les cas des listes Rdr de Epiphane Quenum et Ub de Ouré Sé Guéné, qui n’étaient pas retenues mais finalement réintégrées dans le lot. Selon une explication officielle, c’est un défaut de récépissé qui a conduit la Céna à ne pas les enregistrer. Or, selon Epiphane Quenum, sa liste a été bel et bien enregistrée, mais c’est la Céna qui a décrété une pause au moment de lui délivrer son récépissé d’enregistrement. C’est trop facile comme ligne de défense. On se demande tout simplement par quelle alchimie les deux listes ont été restaurées.
Fidèle Nanga
La liste Fcbe menacée de sanction populaire
Au sein de la population, la seule liste contestée est celle des Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe). Si hier, ce sont les opposants seuls qui affichaient leur position par rapport à cette liste, aujourd’hui, ce sont les partisans de Yayi Boni, eux-mêmes qui grognent. Dans presque tout le pays, les populations sont en colère. Le mythe qui entoure la confection de cette liste fâche les militants à la base. Kandi n’est plus prête à accompagner Yayi, à l’étape actuelle des choses. Sakété, pareil. A Cotonou, plus précisément dans la 16è circonscription électorale, c’est la désolation totale. Les militants Fcbe qui ont mouillé le maillot tout le temps, sont déçus. Devant le domicile du chef de l’Etat hier, les femmes se sont attroupées pour manifester leur colère. Des banderoles sont dans la ville de Cotonou pour menacer la liste Fcbe. Visiblement première hier, cette alliance a fait trop de mécontents et est menacée de sanctions. En tout cas, au sein des populations, tant que les positionnements fantaisistes ne sont pas corrigés, il ne sera plus question de soutenir le chef de l’Etat.
Voilà qui confirme la déclaration de Modeste Kérékou lors d’une émission télévisée de Canal3-Bénin le jeudi 19 Février 2015. Il avait prédit que dès le 25 Février, l’alliance Fcbe se verra vidée de son contenu.
Félicien Fangnon