La femme était une fois encore à l’honneur ce dimanche 8 Mars dans le monde entier. Le Bénin n’est pas resté en marge de cette célébration à l’honneur des femmes. Mais après 20 ans de fête, de combats et de militantisme pour les causes féminines, les avancées sont à peine perceptibles.
Les femmes du monde entier étaient à l’honneur ce 8 Mars autour du thème « Autonomie de la femme, autonomie de l’humanité ; imaginez ! ». Bel habit, beaux maquillages, instants de réjouissances et de retrouvailles amicales, colloques, séminaires, réunions à la base, le tableau que nous ont présenté les femmes au Bénin ce dimanche a été aussi varié que divers. Mais pour un accoutumé, les scénarii sont restés les mêmes et rien de concret n’a véritablement changé. Qu’elle soit femme leader, politique, militante, cadre ou paysanne, malgré les efforts que mènent certaines afin de sortir leurs congénères de l’ornière aux fins de leur reconnaître leur vraie place, on constate leur faible représentativité dans les instances décisionnelles. Pour les acteurs politiques ou les ardeurs défenseurs de la féminité, la femme est la source même de toute essence et ne pas lui rendre les hommages qu’il faut conduirait toujours les pays dans des situations indésirables.
Le parlement béninois, depuis le renouveau démocratique, enregistre un faible taux de femmes dans ses différentes législatures y compris la formation des différents gouvernements et les institutions étatiques voire dans les administrations. La 6ème législature n’en fait pas exception et celle pour laquelle les béninois iront aux urnes le 26 avril prochain présente une ossature dominée par les hommes. Pour Rolande Affousatou Damien, troisième titulaire sur la liste « Union fait la Nation » dans la 15ème circonscription électorale, « ce n’est pas que le combat n’a pas été mené afin d’avoir les femmes sur les listes, mais les hommes sont toujours ce qu’ils sont et ne sont pas encore prêts à accepter la réalité ». « Je pourrai décerner un satisfécit à l’état-major de ma formation politique qui a fait la promotion des femmes, en sa manière, et également les femmes d’Akpakpa qui ont suscité non seulement ma candidature mais également mon positionnement en tant que titulaire. Je crois que c’est déjà un pas », a ajouté Rolande Affousatou Damien. A quand donc la fin d’une telle marginalisation et traitement ? A cette question, seules les femmes sont habiletés à apporter une bonne clarification. Le destin de la femme doit être pris véritablement en main par la femme elle-même. Le combat doit être permanent y compris la veille. Si les candidatures sont définitivement closes pour les législatives, Rolande Affousatou pense que la femme peut encore s’imposer, après cette célébration de la journée internationale de la femme, en se battant pour être positionnée sur les listes avec un meilleur positionnement pour les communales et locales du mois de mai. « Il est temps de changer la donne et, à défaut d’inverser la tendance, gagner le pari de la parité et d’égalité véritable », a lancé la candidate de l’ « Union fait la nation » de la 15ème circonscription.
Comme cette dame, beaucoup militent pour cette cause féminine mais les résultats de ces efforts peinent à être à la hauteur de l’énergie qu’elles fournissent. Les mêmes buffets annuels ont été servis juste que les femmes ne se sont pas encore rendues compte de la manipulation dont elles sont l’objet annuellement. L’enjeu, à l’heure actuelle, dépasse ces « plaisanteries » et pour une autonomie, il faut que la femme soit psychologiquement autonome ; une chose qui manque malheureusement aux femmes africaines surtout béninoises.
Rien n’est gratuit, vous devez batailler dur pour conquérir droits, pouvoir et liberté
Hier, les femmes du monde censé ont célébré la 40ème édition de la Journée internationale de la Femme (JIF) placée sous le thème : « Autonomisation des femmes – Autonomisation de l’humanité : Imaginez ! ». Une fois encore, le Bénin a répondu présent à ce grand rendez-vous. Genèse et sens de la JIF au Bénin.
La vie est faite d’une kyrielle de paysages dont le kaléidoscope rappelle aux hommes des réalités heureuses ou tristes qu’il convient d’immortaliser pour la postérité. Il en est ainsi de la Journée internationale de la Femme (JIF) célébrée aujourd’hui dans toutes les sociétés censées du monde.
Genèse de la JIF
Il faut remonter au début du 20ème (XXe) siècle pour comprendre les motivations qui sont à l’origine de la JIF. Elles s'inscrivent dans un contexte de lutte menée par les femmes pour acquérir des droits déjà accordés aux hommes et dont elles étaient privées. Il s’agissait pour elles, de réclamer l'égalité (comme le droit de vote par exemple) entre hommes et femmes et de meilleures conditions de travail. Comme si le 28 février est un jour de libération en comparaison avec le 28 février 1990, les Etats-Unis d’Amérique deviennent le pays pionnier dans cette lutte.
1909 : le 28 février, sur l’initiative du Parti socialiste étasunien ou américain, la première Journée nationale de la Femme est instaurée et sera célébrée jusqu’au 28 février 1913 : c’est le « National Woman’s Day ». Au plan international, c’est grâce à l’allemande Clara ZETKIN, enseignante, journaliste et femme politique marxiste que la célébration de la femme engagée dans la lutte contre la réclusion ou privation des droits à la gente féminine prend forme.
1910 : dans son engagement pour la cause du sexe faible, Clara ZETKIN, figure emblématique du mouvement féministe est la première femme à lancer l’idée d'une Journée internationale des femmes. L’idée fait son petit bonhomme de chemin et reçoit sa reconnaissance à l’international à l’occasion de 2e conférence internationale des femmes socialistes à Copenhague, en août 1910. Au cours de cette assise, l’idée d’une Journée internationale de la Femme dédiée aux droits de la femme dans le but d'acquérir, dans un premier temps, le droit de vote est adoptée à l’unanimité en présence de cent femmes en provenance de 17 pays.
1911 : le 19 mars c’est la consécration avec la célébration de la première Journée internationale des Femmes. En ce jour mémorable, les nombreuses manifestations en faveur du droit des femmes organisées en Europe et aux États-Unis ont connu de fortes mobilisations de femmes et d'hommes réclamant aux politiciens un certain nombre d'avantages dont jouissaient déjà les hommes. Entre autres droits revendiqués, figuraient en bonne et due place : le droit de vote, le droit de pouvoir occuper des postes dans la fonction publique, le droit de travailler, le droit à la formation professionnelle… et l'élimination de la discrimination au travail. Toujours en 1911, le regard politique sur la condition de la femme aux Etats-Unis évolue favorablement au niveau de la législation américaine du travail suite à la mort de plus de 140 femmes au cours d’un incendie survenu en mars 1911 à New York.
1913 : les femmes russes célèbrent dans la clandestinité leur journée de la femme. Un peu partout en Europe, leurs sœurs leur emboîtent le pas entre le 6 et le 8 mars de la même année.
1914 : le 8 mars, les femmes allemandes se mettent en scelle et revendiquent principalement le droit de vote qu’elles finissent par obtenir.
1915 : le 8 mars les femmes entrent en lice à Oslo pour la défense de leurs droits et réclament la paix.
1917 : le 8 mars, des centaines de milliers de femmes russes manifestent leur ras-le-bol contre la guerre mais aussi pour obtenir de plus de denrées alimentaires.
1921 : Lénine décrète en hommage au combat des femmes russes, le 8 mars comme jour officiel dédié aux femmes en Russie.
1945 : la Charte des Nations Unies signée à San Francisco en 1945 proclame l'égalité des sexes en tant que droit fondamental de la personne humaine. Aussi pour s’y conformer, des femmes et des hommes de plus en plus nombreux battent chaque année, le macadam pour des droits équitables entre les deux sexes.
1946 : La Journée internationale de la Femme est célébrée dans les pays de l'Est.
1975 : l’ONU qui est l’organisation internationale regroupant presque tous les pays du monde déclare 1975, Année internationale des Femmes et officialise la commémoration de la journée internationale de la femme le 8 mars de chaque année.
La JIF au Bénin
En République du Bénin qui en est à la 20ème édition de cette journée, la lutte des femmes béninoises n’en est pas une véritablement. Au Bénin, la célébration de la JIF se résume en des célébrations festives avec tout le faste vestimentaire, les ripailles, les bons discours, des décisions presque jamais mises en exécution et autres récupérations politiques de manifestations à l’occasion. A croire qu’on leur impose le menu des différentes célébrations.
Depuis les indépendances, il a fallu attendre 2012, à l’occasion de la 17ème édition de la JIF au Bénin pour enregistrer de timides avancées dans le positionnement des femmes béninoises. A ce niveau, suite aux revendications de Me Marie-Elise GBEDO réclamant plus tôt, au moins 30% de représentation des femmes dans les instances politiques et de décision dans ses courageux combats politiques, le chef de l’Etat apporte des réponses politiques. Un institut de la femme est créé, 30% de femmes sont dans les premiers gouvernements après 2011 et depuis plus rien. Le positionnement qui est encore timide prend du plomb dans les ailes et le nombre de femmes ministres est désormais réduit. Le « mari national des béninoises qu’il aime, qu’il adore n’aura pas tenu parole. Après les « Je vous aime, je vous adore » et autres propos flatteurs, c’est maintenant la comparaison avec le Saint Esprit qui est agité pour faire plaisir à la gente féminine béninoise. C’était là, une revendication qui n’a pas été soutenue correctement par les femmes béninoises.
Constat sur le terrain
Sur les 83 députés de la 6ème législature, on ne compte que 7 femmes. Sur les 77 maires à la tête des mairies, une seule femme sauve l’honneur. A tous les niveaux de représentations politiques ou décisionnelles, le pourcentage de représentativité des femmes est très faible. Pour les prochaines législatives, le très faible positionnement des femmes sur les listes et comme tête de liste a été une fois encore respecté. Et il en sera certainement ainsi pour les élections locales, municipales et communales.
La remarque pertinente qui se fait est que le leadership féminin n’accroche pas et ne fait pas recette au point d’arriver à inverser la tendance dans une société très misogyne. Une société dans laquelle les pesanteurs sociétales et le poids de la tradition à différents niveau ne favorisent guère l’émancipation à l’occidental qui, n’est pas pour demain. De même, on ne sent pas la détermination, l’engagement des grandes figures de la lutte féminine. Les revendications fortes auxquelles aspirent les femmes béninoises ne s’inscrivent pas dans des demandes de portions congrues. Autant elles veulent obtenir des acquis forts, autant elles sont encore les premières à se détruire car ne se soutenant pas. A titre illustratif, pour la présidentielle de 2011, si l’électorat féminin avait été solidaire, certainement qu’avec les voix des hommes lui ayant exprimé leur suffrage en plus de leurs voix, Me Marie Elise GBEDO aurait été la première femme présidente de la République au Bénin.
Il ne s’agit pas de critiquer pour critiquer. Il faut aller de l’avant, de s’engager dans une lutte sérieuse, une lutte de longue haleine pour conquérir droits, liberté et pouvoir telle qu’elles les réclament car sachant ce qu’elles veulent. Les femmes occidentales ne sont pas restées cloîtrées dans un cocon moelleux pour obtenir tous les droits qu’elles ont acquis et continuent d’acquérir : elles ont bataillé et continuent de le faire encore parce que, conscientes que les hommes ne le feront pas à leur place. Les exemples galvanisants ne manquent pas. Et pourquoi ne pas s’inspirer de la détermination affichée par les amazones au temps des rois dans le royaume du Danxomè ou encore de la lutte des femmes dans « Les bouts des bois de Dieu » de Sembène OUSMANE ?
La résignation n’est pas une forme de lutte, elle est synonyme de démission, de soumission. Les moyens de lutte ne se trouvent pas dans les beaux discours, dans les beaux vêtements et foulards encore moins dans les attitudes hypocrites de suivisme en rapport avec les époux au profit des idées desquels, elles finissent très souvent par se saborder car il faut sauver son mariage ou parfois son boulot. La lutte se fait par des marches, par des sit-in, par des grèves, par des marches, bref, par tous les moyens légaux de revendications autorisés. Seule une révolution des mentalités et un sursaut d’orgueil peut aider les béninoises à s’affranchir de la tutelle masochiste à laquelle elles sont soumises. Il faut qu’elles aient le courage d’exprimer clairement et ouvertement dans la dignité leurs idées au lieu de passer tout le temps à dire : « j’adhère à ce que mon mari a dit ». Alors, femmes béninoises, prêtes pour la bataille, que la lutte commence !
Josaphat FINOGBE & Kolawolé Maxime SANNY
