Cotonou, 16 mars. (ABP) - La Cour d’appel de Cotonou a condamné ce lundi, dans la grande salle A de la structure, le sieur Codjo Médard Koudjagbagba à 05ans de travaux forcés et renvoyé l’examen des intérêts de la partie civile à une session ultérieure pour insuffisance de preuve justifiant le montant mis à la charge de l’accusé pouvant permettre à la Cour d’apprécier sa culpabilité et de trancher, une affaire relative au 6ème dossier inscrit au rôle de la 1ère session de la Cour d’assises de Cotonou de l’année 2015.
Il s’agit d’une affaire de détournement de deniers publics opposant M. Codjo Médard Koudjagbagba, un facteur, agent permanent de l’Etat, né à Grand-Popo en 1953, à la Poste du Bénin S.A.
En effet, selon le résumé des faits, le directeur de l’Inspection générale du contrôle et de l’audit de la poste du Bénin S.A a saisi la Brigade économique et financière de la Direction de la police judiciaire d’une plainte révélant suite à une vérification des répertoires des boîtes postales du bureau de poste de Cotonou PK3, des carnets à souche n° 1108 de recouvrement des redevances dont l’agent Codjo Médard Koudjagbagba à la charge. Il se dégage un déficit de vingt-deux millions quatre cent cinquante-neuf mille (22.459.000) FCFA.
A l’enquête préliminaire, M. Codjo Médard Koudjagbagba a reconnu les faits mais soutient qu’il n’a détourné qu’un montant de sept cent mille (700.000) FCFA.
Devant le magistrat instructeur, il a lors de l’interrogatoire de première comparution, nié les faits.
A l’interrogatoire à fond, il déclare avoir ramassé un carnet à souche n°1108 qu’il a utilisé en le dessouchant et que les fonds détournés s’élèvent à cent quatorze mille (114.000) FCFA.
Pour éviter d’éveiller tout soupçon et prouver le payement des redevances par les clients, il inscrivait régulièrement les numéros desdits reçus dans le répertoire de payement et par la suite brûlait systématiquement les carnets à souche.
A la barre, ce lundi, M. Codjo Médard Koudjagbagba, a reconnu avoir détourné de l’argent mais pas à hauteur du montant de vingt-deux millions quatre cent cinquante-neuf mille (22.459.000) FCFA mis à sa charge.
Le montant de sept cent mille (700.000) FCFA et les cent quatorze mille (114.000) FCFA sont acceptés et surtout le dernier montant avec description du mode opératoire par lui-même. En fait, les recouvrements se font réellement sans le versement des fonds, tout en prenant soin de brouiller la piste à partir des reçus, des carnets de souches et des répertoires.
Par ailleurs, il a reconnu avoir dit dans l’une de ses déclarations qu’il allait payer les 22.459.000 FCFA mis à sa charge en vendant son terrain et en y ajoutant ses salaires sans pouvoir démontrer le mode opératoire de ce montant mis à sa charge.
Au sujet de ces différentes déclarations d’aujourd’hui au cours des débats de vérité, il explique qu’ils étaient onze (11) agents ayant joué ce rôle de recouvrement.
Le ministère public, représenté par Apollinaire Dassi, au regard de ces débats, a dit dans sa réquisition que l’envie de gain facile entraîne des gens à se trouver en conflit avec la loi. Il poursuit pour dire que l’accusé a reconnu les faits mis à sa charge mais, a contesté le déficit de 22.459.000 FCFA. Enumérant des ordonnances et lois prises au Bénin qui punissent différemment et selon la fourchette du montant détourné lorsque les preuves sont établies, il se pencha sur le cas de M. Codjo Médard Koudjagbagba pour dire à la cour de se référer à l’ordonnance 79-23 du 10 mai 1979 et non à la loi récente pour punir l’accusé car, celui-ci a reconnu à toutes les étapes avoir dissipé de l’argent de l’Etat.
S’adressant au président, Avognon Saturnin, il lui dit : "M. le président, votre tâche est difficile !".
L’avocat, Me Yaya Pognon, dit que certes son client a détourné de l’argent à la Poste mais, qu’il va falloir déterminer le montant. En plus, les débats ont confirmé que les sommes ne sont pas détournées par lui seul. Son incarcération lui a fait perdre tout, sur le plan social et professionnel. "Vous n’aurez rien fait de trop en lui accordant une chance. Il a déjà passé 08 ans en prison", a-t-il fait remarquer au président de la cour.
La partie civile représentée par l’agent judiciaire du Trésor public, Me Sévérine Lawson, s’est opposée à cette façon du ministère public d’apprécier et d’orienter la Cour vers une telle ordonnance qui n’arrangerait pas les choses en faveur de l’Etat. Pour elle, l’accusé est bien coupable du détournement des 22.459.000 FCFA et doit subir les conséquences qui en découlent, donc doit rembourser la somme due. Et demande au ministère public et à la défense de ne pas semer de confusion dans les esprits quant au choix à opérer entre les ordonnances réprimant les détournements de deniers publics.
La Cour s’est retirée et est revenue déclarer le sieur Codjo Médard Koudjagbagba coupable courant 2005 à 2007 de détournement de la somme supérieure ou égale à 700.000 FCFA et le condamne à 05 ans de travaux forcés en mettant à sa charge les frais de justice.
La partie civile soutient mordicus la culpabilité de l’accusé et exige que l’accusé rembourse à l’Etat l’intégralité des 22.459.000 FCFA plus 2.000.000 FCFA pour dommages et intérêts.
La défense et le ministère public trouvent qu’il y a présomption dans ce dossier et qu’il convient de ne payer que les fautes que l’on a commises.
La Cour s’est à nouveau retirée et est revenue pour condamner l’accusé à 05 ans de travaux forcés, tout en mettant les frais de justice à sa charge et renvoyant l’examen des intérêts de la partie civile à une session ultérieure pour leur permettre de régler une fois pour toute de façon irréfutable avec toutes les preuves le montant réel détourné par l’accusé.
Les assesseurs du président de la Cour, Avognon Saturnin, étaient Damienne Lima Dossa et Georges Toumatou. Me Alain Cakpo a tenu la plume.
ABP/JMN/TB