Par le dernier remaniement technique du Gouvernement, le Président de la République a procédé à un redéploiement de son équipe. Ainsi, trois transferts de portefeuilles sont intervenus, concernant tous des Dames.
Mais, la plus notable des changements de fauteuil ministériel concerne Madame Réckya Madougou qui a troqué son poste de Ministre de la Micro-Finance contre celui de Ministre de la Justice, un ministère régalien ! Nos analyses sur cette Ronde des Dames, notamment sur les challenges qui attendent Madame la Garde des Sceaux dans ses nouvelles fonctions, dans le monde tumultueux de la Justice…
Pour un cadeau empoisonné, c’en est un!
Pour celle qui a dirigé de manière exemplaire (sans scandale notable, cela s’entend) le secteur de la Micro-Finance depuis bientôt cinq années, un poste créé tout spécialement pour son entrée au Gouvernement, c’est comme sortir un crocodile de son marigot ! Oui, dans son marigot, au ministère de la Micro-Finance, Madame Réckya Madougou s’y sentait bien, s’y plaisait bien. Elle qui a su donner une âme à un portefeuille ministériel presque vide au départ. Une vacuité qu’elle a su remplir en s’entourant d’une équipe de jeunes dont la majorité est issue du sérail de la Jeune Chambre Internationale, une organisation de formation au Leadership.
Or, voici que Madame la Ministre est envoyée dans un nouveau département ministériel qui s’est illustré depuis quelques temps par les mouvements de contestations intermittentes, tout en étant au cœur des réformes prioritaires à mener par l’Etat, notamment avec le Millenium Challenge Account. C’est donc un cadeau empoisonné que Madame Réckya Madougou s’est vue offrir.
Un nouveau Challenge pour une «Dame de Fer»!
Cependant, il faut également prendre cette nomination, avec plus de positivisme et moins de préjugés. En effet, c’est aussi une consécration pour une Dame qui n’est pas une vieille routière de la chose politique. Avec à peine cinq années de présence continue, brillant par sa stabilité au ministère de la Micro-Finance, elle vient d’être appelée à quitter son «petit monde» pour le «grand univers de la Justice», en prenant les commandes d’un ministère régalien. C’est alors une belle promotion, une progression fulgurante!
Il s’agit maintenant pour Madame la Ministre de déployer tout le Leadership dont elle est capable, pour faire douter les vieux briscards qui ne vont pas se gêner pour lui tendre toutes sortes de pièges, qu’elle devra déjouer.
Un autre challenge consiste à bien conduire (sans chercher à les diriger, ce que les Magistrats abhorrent par-dessus tout) ses nouveaux collaborateurs, en usant de tact pour ne pas froisser les hommes en robes, en faisant attention à ne pas susciter le mécontentement de corporations qu’on sait très vindicatives – un paradoxe – puisqu’elles sont censées être les garantes de la Justice.
Blanche-Neige au milieu des loups!
Sans vouloir faire référence au conte de fées, c’est l’image qui résume le mieux notre analyse. En effet, telle Blanche-Neige, voici Madame Réckya Madougou envoyée au milieu des loups. La meilleure manière pour elle de réussir à ne pas se faire croquer, c’est de savoir rester impartiale et équitable, des caractéristiques liées au poste lui-même, la Justice, dont elle doit incarner toutes les vertus, elle qui désormais, à la différence de Blanche-Neige, se pare de Glaive et de Balance. Peut-être que Madame la Ministre pourra compter sur sept nains providentiels pour l’accompagner dans sa mission : Une équipe composée de professionnels aussi bien de la justice que de la communication, puisqu’elle est également la nouvelle porte-parole du Gouvernement.
Les grands défis… Et les facteurs clés de la réussite!
Là où une autre Dame a déjà échoué, dans ce milieu au machisme à peine contenu, comment Madame Réckya Madougou peut-elle espérer réussir ? Peut-être en comptant sur sa volonté de progresser, d’aller de l’avant et son refus de tourner en rond, de rester immobile, caractères dont elle a fait montre par le passé, avec l’historique campagne contre la révision constitutionnelle : «Touche pas à ma…»
Dans tous les cas, la nouvelle Garde des Sceaux devra développer un Leadership novateur qui n’a plus rien à voir avec les actions de marketing qui avaient cours au ministère de la Micro-Finance.
Certes, il lui faudra beaucoup communiquer pour éviter de sombrer dans la vague déferlante des revendications corporatistes qui ne manqueront pas de la solliciter dès sa prise de fonction. Cependant, il s’agira d’une communication professionnelle, efficace, pour être dans son rôle de porte-parole du Gouvernement, tâche qui ressemble à une rose épineuse. D’un côté, elle la propulse au devant de la scène, en la mettant constamment sous les feux de la rampe, en tant que porte-parole. D’un autre côté, cela lui créera de gros problèmes pour trouver les meilleurs mots afin de justifier les nombreuses frasques de son chef, pour défendre un gouvernement confronté à de nombreux scandales, dont le dossier de la mise en accusation devant la Haute Cour de Justice, de certaines personnalités de l’Etat.
Un seul facteur déterminant qui nous permettra, dans un futur plus ou moins proche, d’apprécier le passage de Madame Réckya Madougou à la tête du ministère de la Justice : la Vérité!
Pour terminer avec une note moins rêche, méditons sur cette sagesse orientale qui nous parle et qui parlera certainement à Madame la Ministre en ces «moments troubles» où elle va prendre possession de son cadeau empoisonné : «Pour pouvoir faire Justice, il faut savoir servir la Vérité. Pour vivre au milieu des moutons, il faut savoir être un lapin malicieux, sans être un renard rusé, ni faire le chien. Pour fréquenter les tigres, il faut savoir être un chat, un peu dedans, un peu dehors, et non faire le lion. Pour échapper aux loups à vos trousses, il faut savoir être une belle gazelle agile, et non un énorme rhinocéros.»
