L’un des conseils du juge Angelo Houssou a désapprouvé la violation des libertés de son client au cours de la conférence de presse qu’il a animée hier mercredi 10 juillet 2013 dans les bureaux de son cabinet. Me Alain Orounla a souligné que le juge Angelo Houssou, l’auteur de l’ordonnance de non-lieu général dans les affaires dites tentative d’empoisonnement du Chef de l’Etat et de tentative de coup d’Etat, craint sérieusement pour sa vie.
Le juge du 6ème cabinet d’instruction du Tribunal de première instance de Cotonou, Angelo Houssou est « pris en otage », « séquestré » ou encore « assigné à résidence ». Selon Me Alain Orounla, le magistrat n’est plus libre de ses mouvements depuis plusieurs semaines et vit carrément sous surveillance policière. « Depuis le 18 mai le juge Houssou vit un état de siège. Son domicile est quadrillé par des forces de l’ordre et d’autres forces non identifiées. Il semblerait même que certains agents aient pris leur quartier dans un immeuble en face de celui du juge. A l’intérieur de son domicile, il y a une présence constante et permanente d’une dizaine d’agents. Quelques uns, six ou sept, en tenue militaire qui passent la nuit sans qu’on ne sache qui sont ces gens, qui les a envoyés et quel est rôle ils sont appelés à jouer, a-t-il dénoncé. Et de poursuivre : « … Ce qui est préoccupant, c’est ce qui se passe dans sa propre maison où ces gens en uniforme le surveillent presqu’aux toilettes. Lorsque le juge se rend au travail, parce qu’il continue de faire son office, il est systématiquement suivi par ces mêmes gens dont deux s’imposent dans son véhicule. Et le reste soit en voiture, soit à moto, le suit partout ». Pour lui, c’est une situation inquiétante qu’imposent des "gens non identifiés" au juge Angelo Houssou. Une situation qui peut créer de graves ennuis au fonctionnaire de justice selon l’avocat. « Ces gens sont armés. Ils passent la nuit au domicile du juge. Ils violent son intimité. Ils écoutent ses conversations et rendent compte au fur et à mesure de chaque déplacement et de chaque fait et geste du juge à l’intérieur de son domicile. Le juge craint de faire l’objet d’une bavure (…) On ne sait jamais, il peut y avoir d’accident », a-t-il alerté.
« Braquage des libertés »
Me Alain Orounla s’est, par ailleurs, indigné contre la situation de fait imposée à son client. Pour lui, « le dispositif militaire illégalement mis en place » au domicile du juge Houssou et qui « cache quelque chose de grave » est « dangereux ». « Cet état de fait est un braquage des libertés. Et c’est contraire à la Constitution et aux lois en application en République du Bénin », a-t-il affirmé. Et d’expliquer : « Il n’y a aucune notification officielle de la part des différentes autorités pour informer le juge de ce qu’on veut le protéger et le juge n’a jamais demandé ce type de protection. A travers les médias et les différents communiqués passés par certaines autorités, on a prétendu que cette sécurisation s’imposait aux motifs que des individus ne seraient pas contents, des décisions rendues par le juge Houssou le 17 mai ; décisions qui ont été plus ou moins confirmées par la Chambre d’accusation le 1er juillet dernier, donc les mécontents doivent l’être davantage. Mais nous n’avons pas observé une opération de sécurisation des juges de la Chambre d’accusation ». Pour l’avocat, les faits dénoncés sont d’autant plus graves qu’ils concernent un magistrat, qui plus est un magistrat de siège. « Le juge Angelo Houssou est certes un citoyen, mais pas un citoyen ordinaire. C’est un citoyen investi de l’autorité de rendre des décisions de justice. Et cet office est protégé par les lois qui le rendent indépendant et qui interdisent à toute personne de l’inquiéter à raison des décisions qu’il a à apprendre. Or c’est précisément ce pourquoi on doit lui garantir la liberté qui est à l’origine de l’étau qu’on a serré contre lui parce que nul ne peut prétendre ici que la situation que vit le juge n’est pas en rapport avec les décisions qu’il a rendues. Le magistrat en sa qualité de juge de siège est indépendant. Et son indépendance doit être protégée par le premier d’entre nous, c’est-à-dire le Président de la République », a-t-il confié. Me Alain Orounla confiera également que le juge Houssou a écrit au ministre de la Justice pour l’interpeller sur la présence de ces individus qui ont pris d’assaut sa maison et qu’aucune réponse officielle ne lui a été adressée si ce ne sont les interventions télévisées du ministre de l’Intérieur. « Une plainte pénale a été déposée pourtant la situation n’a pas changé. Bien au contraire, elle empire. C’est pourquoi nous alertons l’opinion nationale et internationale, les autorités de notre pays les plus hautes parce qu’apparemment, il semblerait qu’elles ne soient pas au courant ou qu’elles soient mal informées ou désinformées. Il y a un drame qui se joue. Et nous interpellons le Chef de l’Etat », a pour finir déclaré Me Alain Orounla.