Le débat sur la révision de la Constitution béninoise fait rage et occupe les esprits. Certains esprits commencent d’ailleurs par s’échauffer. Or, le Bénin est actuellement dernier dans la plupart des domaines. Nous avons donc encore d’énormes défis à relever. Et ces défis méritent de la part du Chef de l’Etat une attention et une concentration totales.
Le président de la République est un économiste. Yayi Boni est aussi un personnage actif, et même super actif. Il a d’ailleurs montré par le passé une envie de changer et faire bouger les choses. Il a donc l’aptitude pour développer le pays à lui confié. Est-ce la dure réalité de la politique qui l’a éloigné des objectifs qu’il s’est fixés en 2006 ? Ou simplement, le défi du redressement du Bénin est une charge trop lourde ? Si sa propension à réviser vaille que vaille la Constitution n’est pas l’arbre qui cache la forêt, le président de la République doit désormais s’atteler à développer son pays, et relever les défis qui l’imposeront comme homme d’Etat et un grand homme après son départ en 2016. Le temps pour y parvenir est très court. Il a ouvert beaucoup de chantiers…Or, le quotidien des Béninois actuellement se résume aux délestages récurrents et aux factures exorbitantes. Nous vivons une époque difficile. Tout le monde a d’ailleurs noté la tendance du moment à l’achat des groupes électrogènes. Les plus nantis d’entre nous s’en sortiront plus ou moins. Les autres, le Bon Dieu s’en chargera ! Mais il est une évidence : à l’instar de l’essence et du pétrole qui coulent à flots chez le grand voisin de l’Est, le Bénin aussi dispose de biens d’atouts naturels pour disposer de l’énergie électrique en qualité et en quantité suffisante. Il suffit de s’y atteler. Le président de la République lui-même écrivait dans son Agenda pour un Bénin nouveau à la veille de la présidentielle de 2006, que notre « économie subit les contrecoups de la mauvaise gestion du secteur énergétique, dont les conséquences sont l’insuffisance et le coût élevé de l’électricité, ainsi que les pénuries chroniques sur le marché des produits pétroliers ». Plus loin, il poursuit : « S’agissant de l’énergie électrique, la stratégie de l’Etat visera la diminution des coûts à travers l’incitation des opérateurs privés à s’impliquer dans les activités du secteur…et la construction du barrage hydroélectrique d’Adjarala ». Et pour conclure, en bon économiste il promet : « Au total, les réformes à mettre en œuvre devraient permettre d’améliorer l’efficacité de l’activité économique à travers la disponibilité à moindre coût de l’énergie électrique ».
Vœux pieu ?
Yayi Boni avait pendant sa campagne de 2006, comme on peut le constater, posé un bon diagnostic de la situation énergétique déséquilibrée et bancale de l’économie béninoise. Malheureusement, au fil du temps, il s’est éloigné de ces préoccupations essentielles. Résultat : on peut noter avec une pointe de déception que sept ans après son arrivée au pouvoir, il n’a pu relever son défi majeur : fournir l’énergie électrique de qualité et à moindre frais pour redynamiser l’économie béninoise. Or, si le Ghana est l’un des pays prospères de la sous-région aujourd’hui, c’est en raison d’un pari gagné à 2 niveaux : la lutte contre la corruption et la mauvaise gestion d’une part, et la bonne qualité de l’énergie électrique fournie d’autre part. Chez nous, la centrale électrique d’Alègleta est jusque-là est incapable de fournir 1 mètre cube d’énergie. Alègleta est un gros investissement pour rien. Donc un éléphant blanc. Quant au barrage d’Adjarala, c’est devenu un fantôme pur et simple. On en parle plus, et le sujet est déjà enfoui dans les tréfonds de nos mémoires. Conséquences : plus de 50 ans après l’accession à l’indépendance, le Bénin reste largement à la merci du hasard, et ne maîtrise guère son indépendance énergétique.
Corriger le tir et atteindre l’émergence
Est-ce qu’on peut véritablement construire une économie émergente sans la maîtrise de l’énergie ? On se rappelle de la bataille que les Européens ont menée pour domestiquer le charbon, et ensuite l’énergie électrique, avant de passer au solaire et au nucléaire. Bataille dure et âpre qui justifie d’ailleurs la prospérité actuelle. Le temps n’est plus donc à la révision. Le Chef de l’Etat doit mettre toute son énergie, le peu de temps qu’il lui reste, pour faire ce que lui-même a dit en 2006 : « Au total, les réformes à mettre en œuvre devraient permettre d’améliorer l’efficacité de l’activité économique à travers la disponibilité à moindre coût de l’énergie électrique » (Agenda pour un Bénin nouveau p.35) . Il peut toujours corriger le tir, s’il s’y investit véritablement. Il faut employer le temps qui nous sépare de 2013, pour trouver un début de solution à la crise énergétique et aux délestages intempestifs. L’offre de Sébastien Ajavon, président du patronat, pendant le dialogue secteur privé/public est une occasion en or à saisir. Il s’agit du barrage hydroélectrique de Kétou, pour lequel le Bénin a obtenu une subvention de 150 milliards de francs de Cfa de la part de la coopération turque.