Pour éviter que le report des élections prochaines ne soit la résultante des divergences financières opposant le Cos-Lépi, qui a requis dernièrement 3.241.286.344Fcfa pour la confection et la distribution des cartes d’électeurs, et le Ministère de l’économie et des finances (Mef) qui lui, refuse de décaisser cette somme, les acteurs de la société civile béninoise ont rencontré le mercredi 08 avril 2015, les différents protagonistes. Ainsi, M. Julien Oussou de Wanep-Bénin, M. Martin Assogba de l’Ong Alcreer, M Gustave Assah de Social Watch, Mme Fatoumatou Batoko-Zossou de la Coalition nationale pour la paix (Cnp), Mme Léontine Konou Idohou de la Pascib, et Mme Antoinette Fakamè Dadjo de Rifonga-Bénin, ont donné hier jeudi 9 avril 2015 au Codiam de Cotonou, une conférence de presse pour restituer ces audiences. Insistant que la paix n’a pas de prix, ils convient le Mef à décaisser les fonds requis, quitte à commanditer après les élections, un audit pour en évaluer la gestion par le Cos-lépi. Lire la restitution.
‘’L’urgence de conjurer le péril sur les élections d’avril et mai 2015’’
Restitution des audiences d’écoute du COS-LEPI et du Ministère des finances.
Alors qu’ils ne s’y attendaient plus du tout du fait de précédentes déclarations du Président du Comité d’Orientation et de Supervision de la Liste Electorale Permanente Informatisée (COS-LEPI), les béninois ont été surpris par le dernier appel de fonds de 3 241 286 344 Francs CFA formulé par le COS-LEPI pour financer, entre autres, la confection et la distribution des cartes d’électeurs. La réaction du Ministère des finances annonçant un virement de 611 580 000 Francs CFA a sonné une mobilisation urgente de réseaux et d’organisations de la société civile actives dans la gouvernance au Bénin.
Ainsi, le mercredi 8 avril 2015, lors d’audiences d’écoute du COS-LEPI, de la Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) et du Ministère des Finances, les représentants de ALCRER1, CNP2, PASCIB3, RIFONGA4, Social Watch5, WANEP6ont rencontré successivement le Président du COS-LEPI, l’Honorable SACCA LAFIA, son Chargé de budget, l’Honorable Nicaise FAGNON, la Vice-Présidente de la CENA, Mme Geneviève BOKO-NADJO, le Ministre des Finances, M. Komi Koutche accompagné de 3 de ses collaborateurs dont le Directeur de Cabinet.
Nous remercions toutes ces personnalités pour nous avoir, d’une part, reçu spontanément sans demande préalable d’audience et d’autre part, entretenu la délégation de façon franche et ouverte sur ses préoccupations relatives à la tenue à bonne date des élections des 26 avril et 31 mai 2015. De l’analyse des nombreuses informations et réponses obtenues des uns et des autres, nous retenons : Du fait de ce qui s’y passe (a) un péril nous guette (b) et nous devons agir en toute urgence (c) pour préserver notre paix relative.
a- Que se passe-t-il ?
1- D’importantes divergencesentre le COS-LEPI et le Ministère des Finances en ce qui concerne le budget de l’organe. Selon le Ministère, des réductions substantielles ont été apportées aux projets de budget sur la base d’études minutieuses. Le COS-LEPI juge ‘’non fondées’’ ces réductions et dénonce n’avoir pas toujours été impliqué dans les révisions budgétaires. Ainsi, face au Ministère des Finances qui affirme avoir régulièrement validé et notifié le budget au COS-LEPI, ce dernier évoque les versions et avenants au budget pour déclarer l’absence de budget final validé et notifié.
2- Des divergences sur les besoins financiers restant, à couvrir, qui sont estimés par COS-LEPI à 3 241 286 344 Francs CFA (y compris des soldes de contrats avec des opérateurs technologiques et des indemnités de mars à mai) dont seulement 611 580 000 (pour la distribution des cartes) sont reconnus par le Ministère des Finances qui qualifie la différence de ‘’Doublons’’ car figurant déjà dans les lignes des budgets ayant fait l’objet des précédents décaissements.
3- Pour justifier la nouvelle demande, le COS-LEPI évoque :
- les nombreux retards dans la mise en place des fonds (plus de 24 mois de fonctionnement au lieu de 8 mois initiaux, …)
- les prorogations (35 jours au lieu de 15 jours budgétisés pour l’audit participatif, 21 jours au lieu de 10 pour l’enregistrement complémentaire, 7 jours de ratissage de complétude,) qui ont été nécessaires à l’atteinte de l’objectif légal de 95% des populations en âge de voter.
Réponse du ministère : le ministère soutient que ces surcoûts ont été pris en compte dans le budget arrêté et notifié en Octobre 2014 au COS-LEPI.
4- Des difficultés de fonctionnement en rajoutent aux difficultés techniques d’un processus pressant et urgent. En effet, le délégué du contrôleur financier affecté par le Ministère au COS-LEPI s’occupe, dans le même temps, de 5 institutions de la République. La surcharge de travail induite ralenti certaines diligences sans compter les conséquences des indisponibilités et lenteurs de certains membres du COS-LEPI. Pour preuve, le dernier courrier de sollicitation de 3 241 286 344 Francs CFA a été adressé au Ministère des Finances le 27 mars 2015 pour des activités relatives aux cartes d’électeurs planifiées pour prendre fin le 31 mars 2015.
5- Du fait que des agents et des prestataires mobilisés travaillent jour et nuit au COS-LEPI, une réévaluation du budget ou une autre demande complémentaire de fonds est possible pour chaque journée sans activité du fait d’indisponibilité de ressources.
6- Des déficits de dialogue entre les acteurs malgré le comité de suivi en place et qui se réunit par quinzaine. Par exemple, la demande complémentaire de 3 241 286 344 Francs CFA relative aux besoins à couvrir pour atteindre la distribution des cartes d’électeurs n’a pas été évoqué ni discuté en comité de suivi. Le COS-LEPI a plutôt communiqué par courrier et le Ministère a répondu par la presse.
7- Selon le Ministère, tous les montants mis à la disposition du COS-LEPI l’ont été par ordre de paiements à régulariser avec l’appui d’un régisseur et d’un délégué du contrôleur financier détachés auprès du COS-LEPI. Des comptes rendus de ces agents détachés, il ressort des problèmes relatifs au non-respect de certaines procédures. La conséquence est une crise de confiance entre le Ministère et COS-LEPI.
8- Contrairement au Ministère des Finances et au délégué du contrôleur financier qui estime que, les fonds actuellement mis à la disposition du COS-LEPI suffisent largement pour finir leur mission jusqu’à la distribution des cartes, les membres de COS-LEPI arguent de ne pouvoir distribuer les cartes avec les fonds actuellement disponibles.
A la CENA,
9- Face au retard de la distribution des cartes d’électeurs, un retard en violation déjà de l’article 183 du code électoral, la CENA se demande si elle doit poursuivre les préparatifs ou simplement les arrêter jusqu’à la disponibilité des cartes d’électeurs. Signalons que le dépôt des candidatures pour les élections locales est déjà hypothéqué étant donné que la copie de la carte d’électeur figure aux pièces à fournir.
Ces constats nous placent dans une situation de risques.
b- Qu’est-ce qui nous guette ?
10- Le report des élections aussi bien législatives que municipales, communales et locales du fait que, à la date du 8 avril 2015, seulement 3 millions environ de cartes d’électeurs sont en cours de plastification et la livraison du matériel pour plastifier les 1 million 500 mille autres cartes d’électeurs reste bloquer et hypothéquer. Signalons que la confection des cartes d’électeurs était planifiée pour être terminée depuis le 31 mars 2015.
11- Des perturbations majeures du processus devant conduire à la distribution des cartes d’électeurs du fait des impayés des émoluments aux agents et des factures des prestataires du COS-LEPI. En effet, les agents mécontents grognent avec un fort risque de boycott du reste du processus. La délégation a trouvé sur place un groupe de manifestants devant le COS-LEPI qui réclament leurs DUS. Ces perturbations seront probablement accentuées par les absences imminentes des membres de COS-LEPI qui seront aussi absorbés par les campagnes électorales pour leur réélection.
12- L’exclusion des béninois de l’extérieur des élections présidentielles de 2016 du fait des risques de pertes de temps qui rendraient légalement et techniquement impossible les travaux complémentaires devant intervenir dès juin-juillet 2015 pour leur intégration à la Liste Electorale Permanente Informatisée (LEPI).
13- La perte ou l’altération, à tout moment, de nos données personnelles actuellement disponibles dans le cadre de la LEPI corrigée du fait d’importantes faiblesses signalées dans la sécurisation de ces données. ‘’Un crash et toutes ces données peuvent être perdues’’7.
c- Que proposons-nous ?
Partant de l’exigence, non négociable, que les élections à venir doivent se tenir impérativement aux dates retenues par la Cour Constitutionnelle (26 avril et 31 mai 2015),
Convaincu que la paix n’a pas de prix et que tout le budget national du Bénin ne saurait ramener la paix en cas de conflit,
Sachant qu’un audit technique et financier du COS-LEPI est prévu au terme de l’article de la loi pour apprécier les dépenses par rapport à l’orthodoxie financière,
Nous en appelons au leadership du Chef de l’Etat, Chef du gouvernement à travers le Ministère des Finances à :
14- La convocation d’une séance urgente de travail avec le COS-LEPI pour :
- définir et libérer les ressources financières complémentaires nécessaires au paiement de tous les besoins urgents bloquant le processus de distribution des cartes,
- définir et traiter les autres besoins pouvant faire l’objet de reconnaissance de dettes payables sous réserves de l’audit technique et financier.
15- Renforcer l’équipe de contrôle financier afin de la rendre relativement plus disponible aux côtés du COS-LEPI pour les besoins spécifiques de la période sensible faite d’urgences à résoudre.
Recommande au COS-LEPI
16- De prioriser, en urgence, le paiement des dépenses relatives à la plastification et la distribution des cartes d’électeurs puis aux indemnités, tout au moins partielles, des agents mobilisés à la tâche.
17- D’attribuer des reconnaissances de dettes pour des dépenses susceptibles d’être soldées au terme de la mission du COS-LEPI et de l’audit technique et financier prévu par la loi.
Appelle le peuple béninois tout entier et les organisations de la société civile
18- A prendre conscience du nouveau péril sur les élections à venir et, par ricochet, la démocratie et la paix afin de s’impliquer pour une distribution, en temps record, des cartes d’électeurs une fois rendues disponibles,
19- S’engager dans le plaidoyer, auprès du parlement, pour que les attributions actuelles du COS-LEPI soient retournées à la CENA désormais plus pérenne.
Ont signé,
ALCRER , CNP , PASCIB ,
RIFONGA , Social Watch, WANEP