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Entretien exclusif avec Pascal Todjinou, ancien président de la CENA: «C’est regrettable qu’aucune élection ne soit organisée sous Yayi dans la paix, dans la sérénité et sans inquiétude depuis 2006 »
Publié le lundi 13 avril 2015  |  Le Confrère de la Matinée
Pascal
© Autre presse par DR
Pascal Todjinou, Secrétaire Général de la Conféderation Générale des Travailleurs du Benin (CGTB)




La Commission Electorale Nationale Autonome (CENA) a lancé officiellement ce vendredi à minuit la campagne électorale pour les législatives du 26 avril prochain. Une autorisation d’opération de charme des candidats qui sont, jusque-là, dubitatifs sur la tenue ou non à bonne date de cette joute électorale. Le bras de fer qui oppose le gouvernement de Boni Yayi et le président du Cos-Lépi au sujet du décaissement ou non de la somme demandée par cet organe n’a pas arrêté la Céna dans la poursuite normale de son chronogramme. Tendons-nous véritablement à un report des élections au Bénin ? Quel regard portent aujourd’hui les organisations syndicales ? C’est pour avoir leur son de cloche que nous nous sommes rapprochés du secrétaire général de la Confédération Générale des travailleurs du Bénin (CGTB), ancien président de la CENA, Pascal Todjinou, qui nous confie que les Béninois ont tous leur yeux rivés sur la Cour constitutionnelle, seule institution habileté à décanter cette situation confuse.


Le CONFRERE DE LA MATINEE : La campagne électorale a démarré ce 10 avril sur fond d’incertitude par rapport à la tenue des législatives. Comment appréciez-vous cela ?

Pascal TODJINOU : Monsieur le journaliste, j’avoue que j’ai de grandes inquiétudes, de très grandes inquiétudes et j’aimerais avant tout vous avouer quelques choses. En 2008, quand j’étais président de la CENA, tout ce qui s’est passé avec moi se répète aujourd’hui. Je suis donc parmi les plus heureux pour faire constater que depuis l’avènement du Président Thomas Boni Yayi au pouvoir, aucune élection n’a été faite dans la paix et dans la sérénité sans inquiétude et sans traîne et c’est vraiment dommage. Aujourd’hui, la cour constitutionnelle a rendu une décision et je ne trouve pas quiconque, à moins de foutre notre démocratie en l’air, qui pourra remettre cela en cause. Elle a pris une décision et tout le monde sait que les décisions de la cour sont sans recours. De ce fait, le 26 avril 2015, les législatives auront lieu à moins que cette cour constitutionnelle voudrait ravaler ses vomissures. Jusqu’à la date d’aujourd’hui, la délivrance des cartes électeurs reste le mystère pour toute une nation ; or, selon les textes, le Cos-Lépi dispose de quinze jours pour cette opération et si cela n’atteignait pas tout le monde, la CENA prend le relais et le fait pendant huit jours. Mais, quel délai disposons-nous encore aujourd’hui encore que lesdites cartes ne sont même pas prêtes maintenant ? Supposons même qu’elles sont prêtes, que ferait-on de tout ce dispositif à mettre en branle pour cette opération ? Tout ce scénario, il faut avoir le courage de le dire, ressort de l’entière responsabilité du gouvernement en place. Je l’affirme sans ambages et personne ne peut me convaincre du contraire. Le peuple, tout comme moi, s’en fout du jeu politique. Il a fallu que le gouvernement mette au profit du Cos-Lépi des moyens nécessaires et si ces moyens sont mal exploités, alors, même s’ils sont à l’Assemblée nationale, on pourra aller les prendre.

Vous n’incriminez donc pas le Cos-Lépi ?

Non et non. Je ne pourrai en aucun cas accuser le Cos-Lépi. Il faut vous dire que nous, responsables syndicaux, avions rencontré les membres du Cos-Lépi et avions également visité les locaux de cet organe. Nous avions constaté avec grand soulagement que les agents sont dévoués et travaillent avec acharnement. Nous avions, lors de cette visite, proposé au Cos-Lépi de former plusieurs équipes afin de rattraper le temps. Et ils ont suivi ces conseils. Je pense pertinemment que si le gouvernement avait mis à temps les moyens à la disposition du Cos-Lépi depuis longtemps, le travail aurait été déjà fait et bien même. Pour une opération que vous voulez faire en un temps record et en même temps vous mettez des moyens à la disposition des acteurs goutte à goutte, ça ne peut donner que ce que nous constatons tous. Les négociations qui devront se faire ne pouvaient jamais être par presses interposées. Le gouvernement Yayi a l’habitude de livrer les autres et ce n’est pas du tout normal. Moi-même j’ai été victime lors de mon passage à la tête de la CENA en 2008 lorsqu’on avait tout fait pour m’empêcher de bien mener mes travaux.

Sacca Lafia a menacé, courant la semaine dernière, de démissionner afin de se consacrer à la campagne électorale qui a démarré puisqu’il tient à son siège au parlement. Sur quelle base voudrait-il se faire élire selon vous ?

Monsieur le journaliste, Sacca Lafia n’a pas menacé de démissionner. Il a plutôt affirmé que si le gouvernement devrait continuer comme cela, en restant camper sur sa position, qu’il préférerait aller battre campagne comme tous les autres candidats que de rester coincer dans les quatre coins du mur de son bureau à Cotonou. S’il le dit ainsi, il a parfaitement raison. J’ai l’impression que le gouvernement veut le maintenir ici à Cotonou pour l’empêcher d’aller sur le terrain et de convaincre son électorat. La conséquence directe de cette volonté du gouvernement, c’est qu’il ne sera pas élu.

Mais pour être élu, il faut que les Béninois votent et ce ne serait pas possible sans les cartes d’électeur…

Là, la faute est à qui ? A lui, Sacca Lafia ou au gouvernement qui s’entête dans les décaissements de fonds ? A l’allure où vont les choses, étais-je à sa place, je ferais la même chose. On veut tout faire pour le maintenir ici et l’empêcher de se faire élire afin de le ridiculiser. C’est le jeu habituel du gouvernement en place.

Tendons-nous vers un décalage des dates des élections aujourd’hui ?

Décalage ou pas, cela dépend du gouvernement. Nous qui sommes des électeurs, nous sommes prêts à aller accomplir notre devoir citoyen. Moi personnellement, j’attends vivement la réaction de la cour constitutionnelle pour vraiment constater si cette cour est à l’image de notre démocratie obtenue sans effusion de sang et au prix de lourds sacrifices. Les dirigeants actuels du pays n’avaient du tout pas participé à cette bataille dans les années 80, 90. Je ne veux pas savoir si nous tomberons dans une impasse électorale. Seule la cour a le perchoir et tout le peuple l’attend de pied ferme.

D’aucuns vous soupçonnent d’avoir des accointances avec le gouvernement en place surtout avec son chef et pourtant vous vous affichez autrement pour des interventions publiques. Pourriez-vous nous confirmer cette rumeur ?

Vous voulez que je confirme quoi Monsieur le journaliste ? Je ne confirme rien. Ce sont eux qui ont vu que j’ai des accointances avec le Président de la République non, alors, ils pourront vous le confirmer. Mais d’ailleurs, dites-moi Monsieur le journaliste, est-ce interdit d’avoir ces accointances ? Si j’entretenais véritablement une telle relation avec le Président de la République et que je faisais réellement partie de ce camp, je ne serais pas à ce niveau aujourd’hui. Je serais déjà élevé à un niveau plus haut avec de plus hautes fonctions. En fait, je ne m’inquiète même pas une seconde pour ces affabulations. Des gens écrivent de n’importe quoi sur ma personne sur les réseaux sociaux. Mais je fais fi de tout. Si c’était même le cas, ne croyez-vous pas que le gouvernement serait capable, comme dans bien d’autres cas, de m’exposer en dévoilant tous mes stratagèmes ? Je tiens néanmoins à préciser qu’en tant que responsable syndical, il y a des contacts que nous prenons pour préparer le terrain pour des négociations et discussions. Ceux qui ne le savent pas écrivent et racontent de n’importe quoi sur les gens. Je persiste et je signe que je n’ai jamais mis pied ni chez Yayi ni au Palais de la marina à titre personnel. Je me rends au palais suite à une invitation officielle. Yayi ne garde pas ses choses-là heureusement et si j’avais, ne serait-ce qu’une toute petite accointance avec lui, il ne raterait jamais l’occasion de le balancer en public devant vous, professionnels des médias.

Votre mot de la fin ?
Je voudrais conclure en invitant les travailleurs à se mobiliser davantage car ce qui se prépare pour le peuple béninois est dangereux. Si ça se déclenche, ce sont les pauvres béninois qui mettront leur natte sur la tête pour des destinations inconnues. Il faut une large mobilisation de tout le peuple béninois pour aller contre ce qui se passe dans le pays.
Propos recueillis par
Josaphat FINOGBE
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