La pourriture du poisson se remarque d’abord au niveau de la tête. Et à supposer que le Bénin soit un poisson, sa misère morale se voit aujourd’hui très clairement à ce que le Chef du pays (chef = tête), garant de l’unité nationale, se mêle de politique partisane en parcourant le Bénin pour soutenir les ‘‘siens’’ Béninois, candidats à la députation, au détriment, bien entendu, des ‘’autres’’ Béninois, candidats eux aussi à la députation, et qu’il n’a de cesse de traiter de bandits de Jonkey et de vendus au Fons. Et comme s’il ne suffisait pas de cette faute grave, il en rajoute en perpétrant sa politique partisane avec les moyens de l’Etat. Il se sert donc de l’argent des Béninois pour diviser les Béninois. Il faut le faire !
Et s’il le fait sans rien se reprocher, c’est que nous le faisons tous sans rien nous reprocher. A quelque poste de responsabilité qu’on nous voie, il nous est comme naturel de nous servir des moyens mis à la disposition du peuple pour nous servir nous-mêmes d’abord et, accessoirement le peuple, en maugréant et en exigeant des dessous de table. De la sorte, la misère autour de nous avance et n’avance pas vers la mer mais vers les hommes et vers nous. Mais ‘‘je m’en fous pas mal ! J’ai tiré mon épingle du jeu ! Qu’ils fassent de même !’’ Faire de même quand ils sont ouvriers-maçons, artisans, cuisiniers, etc., qu’ils payent des impôts et comptent sur le service public pour adoucir un peu leur chienne de vie ?
Contre ce je-m’en-foutisme cynique des prétendus responsables que nous sommes, s’allume, heureusement, ce que Bergson appelle ‘‘des foyers de générosité’’. Le dernier en date est le Conseil National des Anciens, présidé par le professeur René Derlin Zinsou. Réunis en son sein, des ‘‘plus de 70 ans’’ veulent s’efforcer d’arrêter le ‘‘recul des valeurs cardinales qui forment la trame des consciences’’. Un peu avant le CNA, s’est allumé l’Observatoire chrétien catholique de la bonne Gouvernance, voulu par le père Efoé-Julien Pénoukou sur la base de l’idée que ‘‘l’Eglise s’est toujours préoccupée des valeurs qui aident à promouvoir et à construire le destin et l’avenir du Bénin’’. Entre Conseil et Observatoire s’est allumée Une Nouvelle Conscience de l’ancien Premier Ministre, Pascal Irénée Koupaki. Fort de son expérience au gouvernement, il entend nous amener vers ce qui nous manque : ‘‘Ce ne sont pas vraiment les valeurs, mais bien plus. Ce sont les vertus cardinales, notamment le Courage, la Justice, la Tempérance, la Prudence, la Politesse, la Discipline et l’Amour.’’
Toute instance politico-morale au chevet de la nation malade, aura fort à faire pour renverser la vapeur qui pousse le Bénin à rejoindre le Titanic au fond des eaux de perdition : c’est la vapeur de l’ancestral bien connu et bien aimé adage : ‘‘Celui qui mange du mouton ne doit pas s’empêcher d’abattre la tourterelle qui vole au-dessus de sa tête’’. Car il s’agit de s’enrichir de tout. Car ‘‘Etre riche, c’est ne manquer de rien’’. Et peu importe si alentour les autres manquent de tout ? Non ! Car l’autre adage ancestral bien connu et bien aimé dit : ‘‘A ne vouloir porter à cuisson que sa part à soi de maïs, le feu s’éteint’’. Et tous, gros Jean comme devant, se retrouvent avec leur maïs immangeable à la main. Entre deux ou trois ‘‘sagesses’’, il faut choisir celle qui dit le ‘‘nous’’ convivial et rejette le ‘‘moi’’ létal.
Renverser la vapeur pour sauver le Bénin, c’est entendre et embrasser ce qu’écrivit Benjamin Franklin à sa mère pour lui faire admettre son dévouement ‘‘excessif’’ au service des Etats-Unis : ‘‘Je préfère qu’on dise ‘Il a vécu utile’ plutôt que ‘Il est mort riche’’’. Si l’on en croit Barack Obama, cette idée fut l’étoile qui le guida sur la voie qu’il emprunta pour ‘‘aider des gens à vivre avec une certaine dignité’’. Qui dira que le tandem Franklin-Obama n’est pas une belle constellation pour le Bénin qui se cherche entre Conseil, Observatoire et Nouvelle Conscience ? Suivre donc la constellation Franklin-Obama pour sauver le Bénin.