Initiative du ministère chargé de l’Evaluation des Politiques publiques, de la Promotion de la Bonne gouvernance et du Dialogue social, l’avènement du statut de l’entreprenant au Bénin a été soutenu par le Groupe de la Banque mondiale. Le lancement officiel de cette nouveauté, attendue pour mieux insérer certaines catégories d’acteurs économiques dans le circuit de création de la richesse, est intervenu hier mardi 5 mai au palais des Congrès de Cotonou.
Aux termes d’une présentation du directeur général de la Bonne gouvernance au ministère, Abdoulaye Gounou, il ressort que 98% des entreprises sont informelles, l’économie informelle représente 60 à 70% du PIB du Bénin, 90% de la population travaillent dans le secteur informel, plus de 50% des entreprises ont un capital inférieur à 2 millions FCFA. Or l’OHADA a créé, en 2010, le statut de l’Entreprenant pour offrir un statut simplifié aux micro et petites entreprises afin de faciliter la migration de l’informel vers le formel. C’est pourquoi il faut créer les conditions d’inversion de ces réalités, de réelles mesures d’incitation, pour amener les acteurs de l’informel à se formaliser pour que leurs efforts soient reconnus et mieux appréhendés. Dans ce cadre, une étude d’évaluation a été menée auprès de 3600 entreprises informelles de Cotonou pour mieux en saisir les réalités, et définir les stratégies idoines pour la simplification de la procédure de leur formalisation.
Ainsi que pour la mise en place d’une fiscalité adaptée à leur profil. Il s’agit de la Taxe professionnelle synthétique (TPS) payable une fois et variant de 1,25 à 2% du chiffre d’affaires, et qui entrera en vigueur pour compter de 2016. A ce propos, il est mis en place des Centres de Gestion agréés, véritables structures d’accueil et d’appui qui offrent aux entreprenants des informations, des conseils et un accompagnement pour la gestion et le développement de leurs entreprises. Et, à terme, il sera intégré la composante sécurité sociale et assurance maladie, en vue d’optimiser le statut de l’entreprenant. Mieux, auprès des partenaires bancaires l’ouverture et la tenue des comptes sont gratuites pour ces catégories d’acteurs, de même qu’elles leur offrent des facilités de découvert pour soutenir leurs activités. Toutes choses qui séduisent les cibles puisqu’à ce jour, déjà 424 personnes ont été formalisées, révèle Abdoulaye Gounou. Autant d’avantages confirmés et vantés par Josette Loupéda, comédienne et Sébastien Gnonhossou, couturier.
A cela, s’ajoute que l’entreprenant se veut être «un nouveau statut juridique simplifié ouvert à toute entreprise, personne physique, qui exerce une activité civile, commerciale, artisanale ou agricole et qui souhaite se déclarer au Registre du Commerce et du Crédit mobilier (RCCM)». Il se veut gratuit, simple, et offre le bénéfice des avantages de la formalisation : reconnaissance, accès aux services bancaires, formations (en gestion, comptabilité, fiscalité…) et accompagnement dans les relations avec les services des impôts. Il suffira, pour obtenir ce statut d’entreprenant, de se rendre au Guichet unique de formalisation des entreprises (GUFE), muni d’une pièce d’identité (carte d’identité nationale ou passeport), ou d’un extrait d’acte de naissance, puis d’une photo d’identité. Dès lors, en 8h seulement, promettent les promoteurs, le statut est validé et l’entreprenant obtient sa carte de l’entreprenant sur laquelle figurent son numéro RCCM et son identifiant fiscal unique (IFU). Bon à savoir aussi, ce statut simplifié est réservé aux entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur aux seuils de 30.000.000 FCFA (activités de négoce/commerce), de 20.000.000 FCFA (activités d’artisanat) et 10.000.000 FCFA (activités de services).
Le Bénin, pionnier de la mise en œuvre de la réforme
Olivier Fremont, représentant résident de la Banque mondiale au Bénin, dont l’institution soutient la démarche, salue sa pertinence. Il se réjouit des incidences positives qu’elle induira, tant pour les bénéficiaires que pour l’Etat.
Le statut de l’entreprenant vise à encourager la formalisation des entreprises dans les Etats membres de l’OHADA, souligne-t-il, vantant ses vertus et exhortant à mener diligemment le processus, qui a déjà connu la régularisation de 424 micro entreprenants dont les témoignages sont éloquents relativement au bien fondé de cette réforme. L’orateur fait particulièrement remarquer que depuis la révision des actes uniformes de l’OHADA consacrant l’avènement du statut de l’entreprenant, le Bénin est le tout premier pays à réaliser sa mise en œuvre concrète.
Ce dont se réjouit le secrétaire permanent de l’OHADA Dorothée Sossa, espérant que cela marquera définitivement l’envol de cette réforme et aidera à traquer la misère ; puis contribuer réellement à donner corps à la vocation de l’OHADA, de faire de l’Afrique un nouveau pôle de développement. Pour lui, les actes uniformes relatifs au droit commercial général et groupements d’intérêt économique auront montré leurs limites. D’où cette relecture des textes en 2010. Car, l’informel n’est pas seulement source de déperdition de ressources mais aussi d’insécurité pour les acteurs, qui ne bénéficient pas de certains avantages et protection liés pourtant à leur statut. De même que l’entrepreneur individuel et les membres de sa famille sont exclus du système de protection sociale et d’assurance maladie. En clair, si la plupart des acteurs économiques se nichent dans l’informel, il était utile de créer les conditions favorables d’une migration de l’informel vers le formel, explique Dorothée Sossa. Surtout que des conditions incitatives sont prévues pour accompagner les entreprenants, note-t-il, exhortant les Etats à s’engager résolument dans cette voie et envisager, pourquoi pas, une section spéciale pour les entreprenants au niveau du Guichet unique.
Pour une transformation structurelle de l’économie
Pour sa part, le ministre Antonin Dossou, s’est d’abord employé à remercier tous ceux qui, vaillamment et patiemment, ont travaillé à l’avènement de cette réforme, avant de saluer le leadership du professeur Dorothée Sossa à la tête du Secrétariat permanent de l’OHADA, en rendant plus souple les textes communautaires régissant le commerce général. Ce qui honore, se réjouit-il, le Bénin. En tant que tel, le droit OHADA apparaît comme un instrument efficace de politique économique, relève Antonin Dossou. Il plaide à son tour pour que la mise en œuvre du statut de l’entreprenant comporte de réels avantages pour le Bénin, en favorisant la transition douce de l’informel au formel ; l’informel n’étant pas en mesure d’assurer l’accumulation du capital pour induire une transformation structurelle de l’économie.
Au nom du chef de l’Etat, le professeur François Adébayo Abiola, ministre d’Etat chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, salue une réforme réussie dont la portée sera déterminante pour le Bénin, et soutenue par l’amélioration du climat des affaires. Insistant sur les performances du Guichet unique de formalisation des entreprises et la baisse des coûts de création des entreprises, de même que sur les réformes au port de Cotonou et la sécurité des installations, il soutient que l’environnement des affaires est forcément plus attrayant. Ce que devrait davantage renforcer le statut de l’entreprenant, en ce qu’il concerne la majorité des acteurs économiques, à travers le régime juridique simplifié qu’il promeut, pour aider à la transformation structurelle de l’économie béninoise ; et la garantie qu’il leur donne de contribuer effectivement à la création de la richesse nationale, autant que d’assurer leur propre sécurité sociale