Les cinq jours de fête et de magnificence des musiques béninoise et africaine, à travers la première édition du Festival international de musique du Bénin (FIMuB) ont pris fin depuis le 3 mai dernier sur les sites retenus à cet effet. Les organisateurs s’apprêtent sans doute à faire leur bilan. Sans les devancer, on peut soutenir que ce numéro zéro n’a pas été une réussite.
Osons le dire tout de suite. La première édition du Festival international de musique du Bénin (FIMuB) organisé du 29 avril au 3 mai dans les villes de Cotonou, Bohicon et Parakou n’a pas connu un succès. Si au lieu de voir la réalité en face, de travailler à soigner ce festival naissant pour l’aider à devenir la seconde béquille qui soutient la promotion internationale de la culture béninoise sur le plan international, on se caresse le nombril pour se contenter d’une quelconque satisfaction, on n’aura pas fait œuvre utile.
Beaucoup ont, en effet, pensé que le ralliement à la cause de ce festival et la participation active de certains acteurs culturels et musiciens qui l’avaient rejeté dès sa conception, est signe de succès, ou même un indice de réussite. Soit ! Cela aurait pu l’être si les conditions de ralliement n’avaient pas été négociées au guichet. Mais le drame n’est pas là. Que des Béninois, des acteurs culturels de surcroît vivent d’un festival béninois, vivent de ses restes ou même vivent dans son dos, il n’y a pas péril en la demeure. Le mal est encore un peu plus profond. Il s’est joué sur le terrain de la préparation, de l’organisation, de la tenue et du déroulement du FIMuB lui-même. De sorte qu’au finish, beaucoup pourraient garder à l’esprit les observations de certains qui n’ont pas hésité à parler de « cinq jours de gâchis, de millions engloutis… »
Accouchement forcé pour un bébé prématuré
Les premiers acteurs culturels qui ont lancé des pierres dans le jardin du FIMuB avaient peut-être raison, estimant qu’un évènement de cette envergure devrait être conçu et préparé avec plus de dextérité, dans un cadre assez concerté pour ne laisser aucune place à l’impréparation et à l’amateurisme. Pourtant, cela a fini par arriver. Déjà, à l’occasion de la conférence de presse tenue le mercredi 15 avril dernier au ministère en charge de la Culture pour rassurer que tout se met en place et que le festival annoncé comme le frère siamois du FITHEB qui, lui aussi, après plus de deux décennies de vie, peine à retrouver ses marques et avance à pas hésités, se déploiera dès le 29 avril date de sa concrétisation, beaucoup de réactions ont fusé pour s’étonner du forcing avec lequel on tentait de le faire naître et de l’organiser.
Mais face à ces craintes, les organisateurs eux jouaient la carte de l’apaisement. Ils disaient avoir de bonnes cartes en main et il n’y avait pas de raison à ne pas y croire. Richmir Totah, premier responsable du FIMuB et donc le commandant de bord n’a plus de preuve à faire. C’est un homme d’expériences. Un acteur culturel de haut vol qui a roulé sa bosse dans mille et un évènements culturels au Bénin et au-delà des frontières nationales. Sa carte de visite tout comme son carnet d’adresses était assez fourni pour faire un festival de musique au Bénin. D’autres membres du comité d’organisation peuvent aussi se vanter d’en avoir dans les jambes. Mais cela ne fut malheureusement pas suffisant pour accoucher d’un mignon FIMuB. De sorte qu’au finish, l’accouchement était assez douloureux et le bébé, obligé de sortir prématurément des entrailles est venu, non plus en prince comme annoncé, mais plutôt éclopé et donc, privé des cris du cercle de famille qui devrait être là pour l’applaudir à grands cris.
Repenser le fond, la forme… Retravailler le FIMuB
La première édition du Festival international de musique du Bénin (FIMuB) n’est pas sans acquis. Sa tenue a permis à des artistes béninois de se mettre en vedette, de prester devant des acteurs culturels venus de loin, parfois même de très loin. Il a aussi été utile à certains artistes béninois qui sans doute avaient perdu le sens du Live. Cela ne s’est pas toujours fait dans la facilité pour certains d’entre eux. Il y avait donc assez de grains, pour ne pas dire des déchets par endroits. Le public aurait donc pu s’en offusquer, mais il n’y en avait pas. C’est en effet là, l’un des mérites de ce festival. C’est qu’il offre du spectacle, parfois même du bon spectacle devant des sièges quasiment vides. Déjà à la cérémonie d’ouverture par exemple, le siamois du FITHEB s’est ébranlé dans une salle rouge du palais des Congrès de Cotonou assez clairsemée. L’ambiance sur place n’était pas non plus celle des grands jours.
Que dire des rencontres professionnelles ? Désolation et déception ! Même si on peut concéder les autres ratés du FIMuB, il y a lieu de présenter une note sévère pour les rencontres professionnelles dudit festival, tenues dans un hôtel de Cotonou, bien excentré par rapport aux différents sites de l’évènement. Pourtant, ce qui est communément admis, c’est de circonscrire des manifestations du genre dans un périmètre restreint pour y mettre plus de vivacité et d’ambiance. Mais là n’est pas encore le plus important. Ces rencontres dont les thèmes sont pourtant évocateurs n’ont pas retenu l’attention de grand monde. Les artistes béninois n'ont pas brillé par leur présence. A peine une vingtaine de participants ont suivi les premières communications et il faut encore extirper de cet effectif, la forte mobilisation de délégués étrangers.
Côté financement, il n’y a rien à se mettre sous la dent. Le budget gracieusement mis à disposition par le gouvernement (principal, si non unique bailleur de fonds) est évalué à plus d’une centaine de millions de francs CFA. 130, précisent certains qui reprochent aux organisateurs, en plus de la précipitation, d’avoir fait porter une charge trop lourde au Fonds d’aide à la Culture. In fine, comme le musicien Sagbohan Danialou, on peut dire tout simplement «c’est une première édition. Attendons…pour analyser les effets positifs et les imperfections».
Josué F. MEHOUENOU