Après les évènements du mercredi 06 mai qui ont vu Cotonou basculé dans la violence pour la deuxième fois en l’espace de 72 heures, le chef de l’Etat, Yayi Boni, accuse la hiérarchie policière d’avoir donné carte blanche à l’opposition et menace de sévir contre le Directeur général de la Police, Louis-Philippe Houndégnon et son adjoint, Nazaire Hounnoukpè.
Jugé trop aux ordres, docile, obéissant jusqu’à être traité de servile vis-à-vis du chef de l’Etat, le Directeur général de la Police nationale Louis-Philippe Houndégnon n’est plus pour Yayi Boni le metteur en scène de ses différentes pièces. Les relations entre les deux hommes viennent de prendre un coup en raison du « tourbillon » Azannaï. En effet, autorisée par la Mairie de Cotonou, l’opposition regroupée au sein d’une organisation baptisée « Forces démocratiques », a organisé le mercredi 06 mai 2015, une marche de protestation contre l’imposture au sommet de l’Etat et surtout la tentative d’enlèvement du député Candide Azannaï, plus que jamais en conflit avec le président de la République. La veille de cette manifestation, quelques leaders de l’opposition ont rencontré la hiérarchie policière et une délégation de la Gendarmerie nationale à la Direction générale de la Police à Cotonou. Les différentes parties ont harmonisé leurs points de vue, défini l’itinéraire de la marche et ont procédé, ensemble, à la reconnaissance du terrain. A la surprise de tous ceux qui ont pris part à ces différentes démarches, un communiqué du ministre de l’Intérieur, de la sécurité publique et des cultes, Simplice Codjo, a été rendu public pour interdire la marche. Le ministre, prétextant d’une autre marche projetée par les partisans du chef de l’Etat ce même mercredi, laisse entrevoir des troubles à l’ordre public. Il fait croire, dans son communiqué provocateur, qu’il y aura des affrontements et refuse que la marche se déroule. Les hommes du Pouvoir jouant aux bons élèves, ont renoncé à organiser leur marche. Par contre, malgré les moyens mis en œuvre par le gouvernement pour étouffer la manifestation de l’opposition, rien n’a pu arrêter la colère de se déverser dans la rue. Les barricades posées par l’Armée et la Gendarmerie ont été bravées et défoncées.
La Police réagit, mais Yayi toujours fâché…
Aux premières minutes du mouvement, la Police nationale a été éclipsée par la présence des militaires et des gendarmes, non seulement sur le lieu de rassemblement à la Place de l’Etoile rouge, mais aussi sur l’itinéraire. Ce dispositif auquel la Police n’a pas été associée a été imposé depuis le Palais de la Présidence et exécuté par le patron des services des renseignements et le chef d’Etat-major des forces terrestres. Pendant que l’effervescence gagnait, au fil des heures les rues de Cotonou, le Président de la République donnait des instructions fermes à ses hommes de ne pas baisser la garde. Mais, la Police, voyant la tournure des évènements, a cherché à refaire son image devant le chef de l’Etat. La manière avec laquelle elle a repris en main le dispositif, faisant usage de lance-grenades et du gaz lacrymogène pour disperser les manifestants. Sa méthode a parfois choqué et surpris les éléments de l’Armée qui ne demandaient qu’aux manifestants de ne pas franchir la ligne rouge, sinon, c’est le feu. Ceux qui ont été témoins des scènes vécues dans la périphérique de Cadjèhoun et au grand carrefour du Codiam, peuvent témoigner de ce que, pendant que l’Armée montrait du muscle et était prête à ouvrir le feu, la Police faisait feu de tout bois. Tout cela pour quoi ? Parce que l’avancée de la marche, malgré tous les obstacles posés, a commencé par donner des sueurs froides à Yayi Boni qui menaçait le Directeur général de la Police et l’accusait d’être au service de l’opposition. Le chef de l’Etat a rendu responsables Louis-Philippe Houndégnon et son adjoint Nazaire Hounnoukpè de la situation. Quelques heures après les échauffourées, le ministre de l’Intérieur a demandé des comptes aux deux hauts responsables de la Police. Certains membres du gouvernement, en l’occurrence le ministre de la Défense nationale, a demandé qu’ils soient relevés de leurs fonctions. Car, tous voient l’implication des hauts gradés de la Police nationale dans la marche de protestation organisée le mercredi 06 mai 2015 par les forces démocratiques, malgré la prétendue interdiction du ministre de l’Intérieur Simplice Codjo.
Fidèle Nanga