Lors de l’installation officielle des députés de la 7ème législature, la doyenne d’âge, Rosine Soglo était à cœur-ouvert avec l’assistance. Elle a souhaité que l’Assemblée nationale se penche résolument aux questions de développement, afin de sortir le pays des sentiers battus. Pour y arriver, elle réclame la démission des députés corrompus.
Je suis très heureuse de vous savoir tous présents ici, ce matin. Je n’ai pas encore accepté ma cécité. Et, je suis désolée de ne pas pouvoir vous admirer tous dans votre splendeur. J’espère que vous n’avez pas passé tout le temps chez le Bokonon, cette nuit, pour savoir si tout va bien. Cela étant, je suis très contente. Je vous souhaite la bienvenue dans l’hémicycle pour la septième législature. J’espère qu’elle va se dérouler comme la sixième sous la dextérité du président Nago qui s’est beaucoup donné. C’est dommage parce que j’aurai aimé l’écouter encore avec beaucoup de plaisirs, même si de temps en temps, je n’étais pas toujours d’accord sur le consensus. C’est un monsieur qui aime le consensus. Je trouve qu’en politique, on ne peut pas toujours parler de consensus. Je voudrais dire ceci que nous sommes la deuxième institution de l’Etat. Pour cela, je voudrais que nous respections cette auguste Assemblée.
Il me serait désagréable de savoir que parmi, se cachent comme des repères, des gens qui ne sont pas très catholiques ayant des cadavres dans leur placard qui sont ici, alors qu’ils sont des fossoyeurs de l’économie nationale. Je dis haut et fort ce que je pense. J’assume tout pour pouvoir dire ce qui est vrai. Je sais qu’on me dit que toute vérité n’est pas bonne à dire. Mais, il me plaît de dire que je ne suis pas d’accord. Je sais que beaucoup de mes collègues acceptent ce que je suis en train de dire. Je ne suis pas d’accord que notre institution soit le repère où des gens viennent se cacher parce qu’il y a l’immunité parlementaire pour ne pas répondre de leurs actes devant la justice. Ce n’est pas bien du tout. Nos collègues concernés doivent avoir le courage de se démettre de leur fonction. Ce serait bien. Je ne veux pas m’appesantir là-sus. Je ne nomme personne. Mais, je dis ce que je dis. Cela étant, le Bénin, le Dahomey que j’ai connu, le quartier latin d’Afrique, où en sommes-nous aujourd’hui ? Le Bénin n’existe plus. Il n’y a plus rien. Qu’est-ce que nous allons laisser à nos enfants et moi à mes petits enfants ? Rien du tout. Il n’y a pas d’infrastructures. Il n’y a rien. Le pays se meurt.
Le pays est mort. Ok ! La pauvreté, c’est un vain mot de parler de pauvreté. Il y a un célèbre homme politique qui a dit : « Si vous voulez commander un peuple, affamez-le… ». A partir de ce moment-là, vous pouvez avoir tout ce que vous voulez de ce peuple-là. Le Bénin est affamé et vendu. On se croit aux bas empires. Le pays est pillé alors qu’il y a des gens qui n’ont pas un repas par jour. C’est une honte que nous en sommes-là aujourd’hui. Les jeunes et les femmes, depuis bientôt 10 ans, qu’est-ce qu’on fait pour eux ? Les femmes, on leur donne 30000 f si vous montrez une carte de ne je sais quoi. Ce n’est pas ça, gouverner un pays. J’ai parlé de scandales. On en a tellement au point où l’on ne sait plus là où l’on est. Le dernier, c’est la Hollande qui crie et veut s’en aller. Trois milliards, par-ici, cinq milliards par-là. De quoi, parlons-nous ? C’est du Bénin ? Notre cher Dahomey ? Ce pays qui a tenu tête quatre années dure face à l’envahisseur ? Ce n’est pas vrai. Je crois rêver. Les amazones, où elles sont ?
Nous sommes Dahoméens. Même, l’envahisseur nous a laissés Dahoméens. Le Bénin, voilà ce que ça donne des Béninois. Vos enfants ne savent même plus parler Français. Le Français n’est pas notre langue maternelle. Il est notre langue de travail et pour nous comprendre entre nous. Alors, parlons-la correctement. Regardez les journaux. C’est du n’importe quoi. L’argent, on jette, alors qu’il n’y a pas à manger, il n’y a pas de développement. Les scandales, oui. On est pire que les pintades : « Akouyè ! Akouyè !... ». Voilà ce qu’est devenu notre pays. Vous seriez en train de dire que la veille-là n’a qu’à se taire. Pourquoi me tairais-je ? Si je n’ai pas la vue, Dieu m’a donné au moins le langage pour la communication. Regardez le Président ! Il communique matin, midi et soir. Vous avez tort de me laisser doyenne d’âge. Je vais en profiter une fois encore. Après terminato. Aujourd’hui, comment je suis-là ? Je suis belle, même si Hercule oublie de me le dire de temps en temps.
Peut-être pour la dernière fois, parce que doyenne d’âge, doyenne d’âge, on finit par en avoir assez. Je voudrais un sursaut. Quand les Béninois vont se lever, nous sommes capables de beaucoup et de meilleur. Balayons la corruption. Nous avons marché sous le soleil contre la corruption. Quelle rigolade ! Il paraît que quelqu’un sait amuser avec la jarre de Guézo. Il avait raison. Si tous les fils du pays pouvaient se lever pour colmater les trous de la jarre, ça ira mieux. Comme le dit le Président Kérékou : « Le pauvre ! Cette dame, pour l’arrêter, il faut un fusil… ». Comme personne n’a ici de fusil, je ne voudrais pas que cela finisse dans le sang. C’est vrai qu’on a nous prévenus qu’on allait mettre le pays à feu et à sang. Je plains nos enfants qui sont à l’extérieur et qui sont obligés de risquer leur vie en Méditerranée et ailleurs. Ils sont tabassés parce que l’Afrique est incapable de donner à manger à ses enfants, alors qu’elle regorge de tout. Comme le dit un Américain : « Si vous voulez cacher quelque chose à un nègre, mettez-le dans un bouquet. Il ne le lira jamais… ». Les nègres sont tout. Là, c’est erroné. La France est la cinquième puissance du monde grâce à l’Afrique. Quand ils seront là, jamais nous n’aurons la paix. Alors, il faut les bouter dehors et avoir enfin
l’auto-dépendance tout court. Nous ne devons pas être à la remorque des francs Cfa, le franc des colonies. Voilà, là où nous en sommes. Nous sommes incapables de dire : « Non ». Pourquoi nous sommes ici, si nous ne sommes pas capables de dire d’arrêter tout ça ? Nous sommes capables d’avoir une monnaie. On peut dire : « Non ». Je compte sur vous, mes chers collègues pour faire des lois dont le pays a besoin. C’est ça. L’union fait la force. Laissons les problèmes de clivage politique de côté. Prenons garde. Nos enfants diront : « Non, on a assez… ». Si mes propos blessent quelqu’un parmi nous, je lui demande pardon. Je suis une femme qui partage avec vous ce que je crois et que vous croyez vraiment. J’en suis sûre.