Cotonou - Le banquier d’affaires Lionel Zinsou, nommé Premier ministre du Bénin 10 mois avant la fin du mandat du président Thomas Boni Yayi, dit vouloir "s’occuper des vraies gens" et donner "les bons exemples" pendant le court délai qui lui est imparti.
A la question - qui agite la sphère politique et les médias - de savoir si ce Franco-Béninois a été choisi pour être le dauphin de M. Boni Yayi à la prochaine présidentielle, en février 2016, ce métis à la carrure imposante
s’insurge du haut de ses deux mètres: "Dans quelle grande démocratie a-t-on vu un chef d’Etat dire +Voilà mon dauphin, vous pouvez l’élire+?"
La nomination jeudi de ce normalien de 60 ans, neveu de l’ex-président béninois Émile-Derlin Zinsou, a surpris la classe politique du petit pays côtier (10 millions d’habitants) d’Afrique de l’Ouest.
Il a reçu l’AFP au milieu de sa collection d’oeuvres d’art, dans sa résidence d’un quartier huppé de Cotonou, exposant, dans ce qui ressemble pourtant bien à un programme de campagne, sa volonté d’aller à la rencontre des "vraies gens" et de tenter de résoudre leurs problèmes quotidiens dans les 10 derniers mois du mandat de M. Boni Yayi - la passation des pouvoirs avec le vainqueur de la présidentielle est prévue en avril 2016.
Il a déjà visité le port de Cotonou, poumon économique du Bénin, avec tout son gouvernement après son premier conseil des ministres.
"Ce qui m’importe le plus, ce serait qu’on puisse dire qu’on a pris de petites mesures proches des gens (...) Les gens ont besoin de la lumière pour que leurs enfants fassent leurs devoirs, ils ont besoin de ne pas être envahis par l’eau chaque fois qu’il y a une saison des pluies un peu forte (...), ils ont besoin de toute une série de choses qui concernent l’école, le logement, l’accès aux soins", énumère-t-il.
- Relancer un pouvoir affaibli -
Le président Boni Yayi, également économiste de formation, avait été élu en 2006 avec une image de pourfendeur de la corruption, écornée depuis par plusieurs scandales financiers. Son parti a remporté les législatives en mars, mais sans majorité absolue. Et l’opposant Adrien Houngbedji, son principal adversaire à la présidentielle de 2011, a été élu en mai à la tête de l’Assemblée nationale.
La nomination surprise de M. Zinsou est perçue par les commentateurs comme une façon de donner un nouveau souffle à un second mandat durant lequel le président s’est affaibli politiquement.
Après être passé par l’entreprise Danone, le cabinet du Premier ministre français Laurent Fabius dans les années 1980 et la banque Rothschild, le nouveau Premier ministre béninois était, jusqu’à la semaine dernière, à la tête d’un des plus gros fonds d’investissement d’Europe, PAI Partners. Il aime se comparer aux jeunes Africains de la diaspora, nombreux à rentrer dans leur
pays pour y apporter leur expérience acquise à l’étranger.
Peu diversifiée et sous-développée, l’économie du Bénin s’appuie essentiellement sur l’agriculture et le commerce de transit et de réexportation vers son puissant voisin et principal partenaire, le Nigeria.
M. Zinsou a joué un rôle-clé lors de la table ronde pour le financement du développement économique du Bénin, en juin 2014 à Paris, où des bailleurs de fonds publics et privés se sont engagés à injecter plusieurs milliards d’euros dans de grands projets.
L’un de ces projets vise notamment à faire du Bénin une plateforme logistique englobant plusieurs infrastructures, dont un port en eau profonde, un nouvel aéroport et la voie ferrée Cotonou-Niamey.
Une des missions du nouveau chef de gouvernement, explique l’intéressé, sera de s’assurer que ces programmes sont appliqués.
Ennemi de l’"afro-pessimisme", M. Zinsou préside la Fondation franco-africaine pour la croissance, institution créée en décembre 2013 pour dépoussiérer les relations économiques entre la France et le continent. Un rôle qu’il dit vouloir continuer à assumer.
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