Cotonou, 2 juil 2015 (AFP) - Le président français François Hollande, en visite à Cotonou, a fait jeudi l’éloge du Bénin, "référence" démocratique en Afrique, envoyant un message aux dirigeants d’autres pays du continent tentés de s’accrocher au pouvoir.
Saluant la "Constitution respectée" et les "élections régulières" de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest, M. Hollande, en visite à Cotonou dans le cadre d’une tournée africaine éclair, a rencontré son homologue béninois Thomas Boni Yayi, qui a récemment annoncé qu’il ne briguerait pas de troisième
mandat conformément à la Constitution.
Le Bénin constituait la première étape d’une tournée qui conduit le chef de l’Etat en Angola, où il a atterri jeudi soir, puis au Cameroun où il se rendra vendredi soir. La dernière visite d’un président français au Bénin remonte à 1983, François Mitterrand à l’époque.
"Vous êtes une référence sur le plan démocratique. Si je suis ici, c’est
pour montrer qu’il y a des exemples à donner", a déclaré M. Hollande après sa
rencontre avec M. Boni Yayi, soulignant que le Bénin a connu "trois
alternances démocratiques en 25 ans".
La situation dans cette ex-colonie française contraste avec celle du
Burundi, plongé dans une grave crise politique en raison de la candidature à
un troisième mandat du président Pierre Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005.
Dans plusieurs autres pays du continent, comme en République démocratique du
Congo ou au Rwanda, les opposants prêtent au chef de l’État la volonté de se
maintenir au pouvoir au-delà des limites posées par leur Constitution.
M. Hollande avait déjà mis en garde les dirigeants voulant "se maintenir à
la tête de leur pays en violant l’ordre constitutionnel" en novembre 2014,
lors du dernier sommet de la Francophonie à Dakar. On ignore s’il compte
aborder cette question dans les deux prochains pays où il doit se rendre, dont
les présidents sont au pouvoir depuis plus de 30 ans.
En Angola, où José Eduardo Dos Santos règne depuis 1979, la Constitution
adoptée en 2010 prévoit une limitation à deux mandats consécutifs, et le
principe de non-rétroactivité de la loi lui donne le droit de briguer un
nouveau mandat en 2017.
Au Cameroun, où Paul Biya est au pouvoir depuis 1982, la Loi fondamentale a
aussi été modifiée en 2008 et la limitation des mandats présidentiels
supprimée. La réforme avait engendré des émeutes qui avaient fait plus de 100
morts.
- ’Fait divers grave’ -
La visite de M. Hollande au Bénin a eu lieu moins de deux semaines après la
nomination à la tête du gouvernement de l’homme d’affaires franco-béninois
Lionel Zinsou, très proche du ministre français des Affaires étrangères
Laurent Fabius et possible candidat à la succession de M. Boni Yayi.
"François Hollande donne l’impression de venir adouber un conseiller", juge
le journaliste et écrivain français Antoine Glaser, spécialiste des relations
entre la France et l’Afrique.
La présidence a rejeté tout soupçon d’"ingérence" française, soulignant que
la visite était programmée "bien avant" le changement de gouvernement.
A Cotonou, M. Hollande a visité deux sites présentés comme des modèles de
coopération économique franco-béninoise et rencontré la communauté française.
En Angola, il s’agit d’une visite essentiellement économique visant à
diversifier les échanges de la France au-delà du secteur pétrolier.
Le président français ira vendredi au Cameroun: ce pays "fait face, à cause
de Boko Haram, à une mise en cause de sa sécurité", a-t-il expliqué.
Après plusieurs attaques sanglantes du groupe islamiste nigérian, le
Cameroun s’est engagé militairement, aux côtés de ses voisins concernés, dans
la lutte contre les insurgés.
La France, quant à elle, a déployé depuis l’été 2014 quelque 3.000 soldats
dans cinq pays du Sahel (Mauritanie, Mali, Tchad, Burkina Faso, Niger) pour
contrer la menace jihadiste dans la région, dans le cadre de son opération
"Barkhane".
L’image de "Barkhane" a été ternie cette semaine, avec la révélation que
deux soldats des forces spéciales françaises stationnées au Burkina Faso
étaient soupçonnés d’attouchements sur deux fillettes franco-burkinabè de
trois et cinq ans.
Les deux hommes, renvoyés jeudi matin en France, ont aussitôt été placés en
garde à vue.
A Cotonou, le président Hollande a parlé d’un "fait divers grave". Mais il
a estimé que ça ne devait "pas être mis en rapport avec ce qui s’est passé en
Centrafrique", un scandale de viols présumés d’enfants dans lequel 14
militaires français sont soupçonnés.
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